Ségolène Royal : comment #MeToo a été le déclencheur de ses mémoires
Dans "Ce que je peux enfin vous dire", Ségolène Royal consacre un chapitre entier aux attaques sexistes dont elle a été victime tout au long de sa carrière politique.
"Survivre dans un monde d'hommes". Il s'agit du titre du premier chapitre du livre de Ségolène Royal, Ce que je peux enfin vous dire, sorti le mercredi 31 octobre. L'ancienne ministre a décidé de poser sur le papier les attaques sexistes et machistes dont elle a été victime, tout au long de sa carrière politique.
Un chapitre entier y est consacré... Lorsqu'elle est nommée, en 2000, ministre déléguée à la Famille, Lionel Jospin lui justifiera son choix par cette phrase : "J'ai pensé qu'avec tes quatre enfants, tu pourrais faire l'affaire...". La même année, elle est désignée comme une "vache folle", par le président de la commission d'enquête sur les farines animales.
Le récit n'est guère plus tendre pour les années précédentes. Députée, elle doit prendre la parole sous les commentaires inappropriés - "à poil" - de ses collègues de l'hémicycle. Les années suivantes montrent aussi un mal profond qui règne en politique. En 2006, lorsque Ségolène Royal est candidate à la primaire PS, Laurent Fabius lui lâche : "Qui va garder les enfants ?". Une phrase qui la laissera bouche bée.
Libérer la parole
Ségolène Royal règle donc ses comptes avec ce "cercle des hommes blancs hétéros". "Le sexisme est un racisme, il se nourrit du même obscurantisme", écrit-elle. Quel a été l'élément déclencheur ? #MeToo. Dans les premières lignes du livre, elle explique qu'elle n'avait "pas l'intention d'écrire tout de suite" sur son expérience politique et humaine. "Mais, au moment où la parole des femmes s'est libérée, notamment avec le mouvement #MeToo, beaucoup d'entre elle m'ont demandé de témoigner", raconte-t-elle.
C'est ainsi que l'ancienne ministre a décidé d'apporter son témoignage à la longue liste qui ne cesse de prendre de l'ampleur depuis un an. Elle ajoute que "ce ne sont pas seulement des femmes" qui ont formulé cette demande, "mais également de plus en plus souvent des hommes, des hommes qui disent enfin leur stupéfaction, voire leur effroi, de découvrir ce que les femmes et les petites filles subissent au quotidien".
La raison du silence des femmes, c'est la peur de l'humiliation
Ségolène Royal
L'ancienne ministre de l'Environnement a ainsi décidé de briser le silence : "Je vais donc, de mémoire, vous dire ce que la plupart des femmes subissent en silence, en politique, et que les hommes ne subissent pas. Pour que naisse un nouveau système politique où on ne voie et n'entende plus jamais ça (...) Ce me fut difficile, parfois douloureux, d'écrire, car cela m'a fait revivre des épreuves que j'avais rangées dans ma mémoire frigorifiée".
Ségolène Royal reconnait avoir "passé un accord avec le silence". Mais ça c'était avant : "Je me suis accordé le droit de parler. Et très rapidement, ce droit est devenu un devoir. La raison du silence des femmes, c'est la peur de l'humiliation".
