C'est une page de l'histoire de Marseille et de la vie politique française qui se tourne définitivement. Jean-Claude Gaudin, l'ancien maire de la cité phocéenne, est mort a-t-on appris ce 20 mai 2024. Il avait 84 ans.
Celui qui restera dans les mémoires comme l'édile de la deuxième ville de France pendant un quart de siècle a occupé tous les mandats électifs jusqu'à la vice-présidence du Sénat. Célibataire, sans enfant, fils d'un maçon et d'une employée des corderies, Jean-Claude Gaudin était professeur d'histoire-géographie. Il a enseigné cette matière durant une quinzaine d'années. Sa véritable passion, c'était la politique. Ce catholique pratiquant est entré en politique comme on entre en religion, à 26 ans. En 1965, il a été élu conseiller municipal de Marseille, sur la liste du maire sortant Gaston Defferre. Son parti, le CNI (Centre national des indépendants) était membre de la majorité municipale avec les socialistes, les radicaux et la droite non-gaulliste.
Il a siégé dans la majorité municipale jusqu'en 1977, avant de se brouiller avec Defferre qui adhérait au Programme commun de la gauche. En 1983, il a conduit la liste d'opposition à Gaston Defferre, qui sera réélu avec un peu moins de 52% des voix. En 1978, Jean-Claude Gaudin bat un socialiste et devient député. Après l'élection de François Mitterrand, il a résisté à la vague rose de 1981, ce qui lui a valu de présider le groupe UDF de l'Assemblée.
Son parcours politique a épousé les tribulations de la droite non-gaulliste : Républicains indépendants, CNI, démocratie libérale, UDF, UMP, Les Républicains. Brièvement conseiller départemental, il aura occupé la plupart des mandats électifs.
Aux régionales de 1986, la liste UDF que conduisait Jean-Claude Gaudin est arrivée de peu en tête devant la gauche. Il s'est allié avec le Front national pour diriger la région, suscitant une violente opprobre. Le dessinateur du Monde, Plantu, l'a par exemple dessiné avec des mouches qui volaient autour de sa tête. Il a été réélu en 1992, cette fois sans avoir besoin des voix du Front national de Jean-Marie Le Pen, venu se présenter dans la région.
Jean-Claude Gaudin a aussi goûté à la vie politique nationale et a longuement siégé au Sénat (1982-1995, puis 1998-2017). Il a été le vice-président de la Chambre haute. Il a aussi présidé le groupe UDF de l'Assemblée pendant neuf ans.
Il a quitté momentanément le Sénat pour entrer au gouvernement d'Alain Juppé comme ministre de l'Aménagement du Territoire, de la Ville et de l'Intégration (1995-1997). Il y a créé les zones urbaines sensibles par la loi sur la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville.
Mais le mandat qu'il aura préféré est celui de maire de Marseille, sa ville. Il a mis fin au règne de la gauche en 1995 et s'est maintenu au pouvoir pendant 25 ans, jusqu'en 2020. Comme son mentor Gaston Defferre, il soignait ses réseaux, notamment le syndicat Force ouvrière, mais aussi les amicales de boulistes et les francs-maçons.
Sa faconde, sa (fausse) bonhomie et ses bons mots lui ont attiré une certaine bienveillance, y compris de ses adversaires, qui dénonçaient ses reniements et ses coups tordus, mais qui "l'aiment bien". Jean-Luc Mélechon, avec qui il a siégé au Sénat, le ménageait. "C'est un faux gentil", disait de lui le président du Sénat Gérard Larcher.
Il pouvait aussi se fâcher avec ses amis politiques, comme Renaud Muselier, à qui il avait promis sa succession. "Il a été un mauvais maire car il n'aura pas préparé sa succession", disait le dauphin déçu en 2018. "Muselier m'a souvent malmené", a souligné Jean-Claude Gaudin sur RTL en 2021.
Sa gestion de la ville a fait l'objet de nombreuses critiques. Les ressources humaines de Marseille et le temps de travail des agents municipaux ont fait l'objet d'une enquête du Parquet national financier. Pour se défendre, Jean-Claude Gaudin a invoqué la nécessité de préserver "la paix sociale". Il a été condamné à une faible amende et 6 mois de prison avec sursis.
En 2014 pour son dernier mandat, il a été réélu avec le soutien de Jean-Noël Guerini, ancien baron socialiste de Marseille. Sa "plus belle élection", dira-t-il, avec 61 sièges sur 101. La fin de son mandat de maire est marquée par l'effondrement de deux immeubles, rue d'Aubagne, en novembre 2018, dans lequel huit personnes ont trouvé la mort. Jean-Claude Gaudin, 79 ans alors, ne semblait pas prendre la mesure de cette catastrophe et a refusé de démissionner.
Ce drame a terni son bilan et est devenu le symbole de l'inaction de la municipalité sur le mal-logement. Dans ses mémoires, Maintenant je vais tout raconter, il explique que cet effondrement a laissé en lui "une trace indélébile". Invité de RTL, Jean-Claude Gaudin a expliqué que "ce drame terrible [le] hant[ait] tous les jours". "Il y a eu huit morts, j'y pense sans arrêt", confiait-il.
Jean-Claude Gaudin avait annoncé dès juin 2017 qu'il ne se représenterait pas. Il a alors soutenu Martine Vassal, mais elle fut battue par le Printemps marseillais. Cette liste soutenue par toute la gauche se veut "citoyenne", avec à sa tête la médecin marseillaise Michèle Rubirola. Elle démissionnera plus tard pour raison de santé et a laissé sa place de maire à son premier adjoint, le socialiste Benoît Payan.
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