Éviter l'humiliation. C'est la consigne donnée par Emmanuel Macron dans l'affaire Royal, selon Le Canard Enchaîné. Le président de la République a néanmoins approuvé le courrier envoyé par le Quai d'Orsay à Ségolène Royal où "il est envisagé" de mettre fin à ses fonctions après ses différentes prises de position sur la réforme des retraites ou encore les "gilets jaunes".
"Je comprends par cette lettre que le président de la République va mettre fin à mes fonctions à un prochain Conseil des ministres puisque je n'ai pas l'intention de renoncer à ma liberté d'opinion et d'expression garanties par la Constitution", a-elle prévenu mardi sur Facebook. Elle sera "vraisemblablement" démise de ses fonctions lors du Conseil des ministres du vendredi 24 janvier, selon l'AFP qui cite une source proche de l'exécutif.
Entre l'ambassadrice des pôles et l'exécutif, les tensions se faisaient de plus en plus pesantes. En cause : les vives critiques de l'ex-ministre socialiste envers la politique sociale du gouvernement. Ségolène Royal a d'ailleurs fustigé à plusieurs reprises "l'ego machiste" de l'exécutif.
En quelques années, les relations entre l'ancienne ministre et le président de la République se sont détériorées. Pourtant, tout avait bien commencé entre les deux personnalités politiques qui se connaissent depuis des années. Pour cela, il faut remonter le temps à l'année 2014. Ségolène Royal sort de sa traversée du désert et devient ministre de l'Environnement, sous la mandature de François Hollande. Emmanuel Macron, lui, est tout juste nommé ministre de l'Économie.
Entre méfiance et curiosité, les deux ministres vont apprendre à faire connaissance. "Il a du talent, ce petit, disait à l'époque Ségolène Royal, comme le rapportait Le Figaro. Et en plus, il est bien élevé". Une relation que va cultiver le ministre. Pendant deux ans, "Emmanuel passait une tête à peu près tous les dix jours", racontait-on dans le cabinet de la ministre, cité par le journal. Politique, environnement, industrie, cohésion gouvernementale... Les discussions seront fournies.
Ségolène Royal n'hésitera pas à partager avec lui son expérience sur la campagne présidentielle dès décembre 2016 après l'annonce de candidature de l'ancien ministre de l'Économie. "Tu sais Emmanuel, la politique c'est dur. Tu crois que tu as pensé à tout mais ça ne se passe jamais comme prévu. Une élection présidentielle, c'est au-delà de ton imagination", lui soufflait-elle.
L'ancien ministre de l'Écologie avait mis en garde son ancien collègue du gouvernement sur ses adversaires politiques : "Tu ne dois pas laisser respirer Marine Le Pen. Il faut que tu te positionnes en frontal face à elle, coup pour coup, meeting contre meeting". Une stratégie que l'actuel président de la République n'avait pas hésité à mettre en pratique lors des élections européennes de 2019.
Leur relation va ainsi se construire sur le soutien de Ségolène Royal envers Emmanuel Macron. Lorsque ce dernier lance En Marche, des rumeurs soufflent qu'elle pourrait être présente à ses côtés en tribune. Il n'en sera finalement rien mais ce sera le début d'une alliance entre une candidate à l'élection présidentielle et un futur président. L'ancienne candidate à la présidentielle soutient celui que les proches de François Hollande décrive comme "incontrôlable" ou "désobéissant". Des remarques formulées jadis contre elle.
En 2017, Ségolène Royal est nommée par Emmanuel Macron en tant qu'ambassadrice des pôles arctique et antarctique. Mais cela marquera aussi la fin de leur entente. Ses détracteurs disent de l'ancienne ministre qu'elle parle toujours, au moment où elle veut obtenir un poste ou juste après avoir raté un poste. "Ségolène Royal serait bien redevenue ministre de l’Écologie, après la démission de Nicolas Hulot. Elle n’aurait pas dit non à une haute fonction européenne. En fait, si l’ancienne candidate à l’élection présidentielle sent la société, elle a toujours été une très mauvaise tacticienne politique", souligne Olivier Bost, éditorialiste politique chez RTL.
En novembre 2018, Ségolène Royal revendique sa liberté de parole avec la publication de son livre Ce que je peux enfin vous dire. Y figure quelques passages consacrés à l'actuel président de la République. Il "confond sans doute l'autorité et la juste autorité", avertit-elle. "Le mythe de l'homme seul, héritier des rois de France et de Napoléon, ne tient pas en démocratie. Surtout avec 24% des voix au premier tour", ajoute-t-elle l'accusant de refaire "les mêmes erreurs" que François Hollande.
À cela s'ajoute les violentes critiques de Ségolène Royal contre Emmanuel Macron à l'aube des "gilets jaunes". Le 22 octobre 2018, soit un mois avant les premières contestations contre le président, Ségolène Royal dénonçait les hausses successives du diesel, annoncées par le gouvernement. "Cette taxation sur l'essence et le gasoil, c'est juste faire des impôts supplémentaires et utiliser l'écologie pour faire ses impôts supplémentaires, n'est pas honnête", déclarait-elle.
Cette déclaration marquera le début d'une série de critiques à l'encontre du gouvernement. Européennes, réforme des retraites, écologie... Tous les sujets seront abordés par Ségolène Royal. "Ce qui pêche, aujourd'hui, c'est la concentration du pouvoir entre les mains de quelques-uns qui décident pour 60 millions de Français", assénait-elle récemment, en dénonçant "l'ego machiste" de l'exécutif".
"L'âge pivot, c'est quelque chose qui n'était pas dans le programme présidentiel d'Emmanuel Macron et qui n'a rien à faire dans cette réforme". Et "la seconde proposition qui concerne la commission de financement, c'est tout simplement une demande de démocratisation du processus", a-t-elle ajouté.
"Cet état désolant qui est dû à une brutalité politique doit cesser", a-t-elle insisté en appelant de nouveau au retrait du texte. "Ce qu'on attend du Premier ministre ce matin, c'est du bon sens et c'est de l'empathie par rapport à ce qui se passe et c'est d'arrêter d'être sur cet égo machiste qui consiste à dire : on l'a dit, on le fait", a-t-elle critiqué. Elle critique aussi la proximité d'Emmanuel Macron avec "le monde du business mondialisé".
La phrase de trop ? Ségolène Royal "critique le gouvernement très fortement depuis quelques semaines, est-ce que c'est bien compatible avec un poste d'ambassadeur qui appelle une certaine réserve ? On peut se demander", a tonné la ministre de la Transition écologique Élisabeth Borne, trois jours après l'envoi de la lettre ministérielle.
Dans Le Point, un proche d'Emmanuel Macron a expliqué : "Il n’a échappé à personne qu’elle (Ségolène Royal, ndlr) revient dans les médias au moment où Bernard Cazeneuve sort un livre. Le meilleur moyen d’apparaître comme le seul recours possible, c’est de tuer les autres", s'est-il amusé.
Désormais, Ségolène Royal est libre de s'exprimer contre le gouvernement et le président de la République. Les tensions entre les deux personnalités politiques ne sont pas prêtes de s'apaiser. L'ancienne candidate socialiste à la présidentielle a illico dénoncé une campagne "diffamatoire" à son égard pour la "faire taire". Et désormais, elle ne cache plus son désir de nouvelle candidature en 2022. Contre Emmanuel Macron ?
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