Une première dans l'histoire de la Vᵉ République : un ministre en exercice comparaît devant un tribunal. En effet, ce lundi 6 novembre, le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti comparait devant la Cour de Justice de la République (CJR) pour des soupçons de prise illégale d'intérêts. Ce lundi matin, la Première ministre Elisabeth Borne lui a renouvelé sa confiance, soulignant "son excellent travail et son droit à la présomption d'innocence".
Concrètement, il est accusé d'avoir réglé des comptes avec quatre magistrats qu'il n'appréciait pas une fois en poste au gouvernement, profitant de sa position. Créée il y a trente ans lors de l'affaire du sang contaminé, la CJR est composée de trois magistrats, le reste de la Cour étant composée de parlementaires qui se transforment en juge le temps du procès, c'est-à-dire pendant deux semaines.
Avec douze membres au total, leur répartition est représentative des forces politiques actuelles : six élus proches de la majorité et six membres de l'opposition. La députée La France Insoumise Danièle Obono et Emilie Chandler, députée macroniste et membre de la commission des lois, en font partie.
La première question qui se pose est celle de la neutralité attendue de la part de la justice : les représentants de sensibilités politiques opposées parviendront-ils à mettre leurs partis de côté pendant deux semaines ? Rien n'est moins sûr. Émilie Chandler est régulièrement en lien avec le ministre et ses services, tandis que Danièle Obono est membre de l'opposition au pouvoir en place.
Il n'y a pas de pouvoir de récusation équivalent à la Cour d'assises, où les avocats ou l'avocat général peut récuser qui il veut sans donner ses raisons. En fait, c'est le même fonctionnement qu'au tribunal correctionnel : il est possible de récuser un juge, mais il faut pouvoir soutenir qu'il y a des soupçons d'impartialité. Or, il n'est pas certain que quiconque se lance dans ce petit jeu.
Si Emmanuel Macron souhaitait mettre fin à cette juridiction spéciale et avait promis de la supprimer, il n'en est rien. Depuis des années, tous les présidents veulent en finir avec cette justice d'exception, tels que François Hollande, qui avait aussi promis de l'abroger.
Sa robe d'avocat va rester au vestiaire. Il a deux avocats pénalistes à ses côtés, et l'un de ses proches prévoit une confrontation inévitable. Éric Dupond-Moretti prévoit de tout faire pour prouver qu'il n'y a pas eu de prise illégale d'intérêts. Mais les mots de l'accusation sont accablants : pour les juges enquêteurs, il a réglé ses comptes d'avocat en tant que ministre, ce qui est synonyme de conflit d'intérêts.
De son côté, le garde des Sceaux répète qu'il n'a fait que suivre les recommandations de ses services, que les procédures contre les magistrats visés ont commencé bien avant son arrivée place Vendôme.
Tout le gratin de la haute magistrature est attendu, et autant de haine réciproque. De plus, Jean Castex est attendu à la barre, ainsi que l'ancienne garde des Sceaux Nicole Belloubet. Lorsque les magistrats visés par ses enquêtes administratives s'exprimeront, il y a fort à parier que la tension se fera ressentir.
Pour preuve, Éric Dupond-Moretti avait qualifié de "cowboys", de "dingues" ou de "barbouzes" ses opposants. Mais le face-à-face le plus explosif sera celui avec François Molins, l'ancien procureur général à l'origine des poursuites. Aujourd'hui à la retraite, il n'a plus rien à perdre. Lui qui voulait être garde des Sceaux n'aurait "jamais accepté ma nomination", avait déclaré Éric Dupond-Moretti.
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