ÉDITO - A69 : "On se croirait dans les 'Shadoks'", raille Isabelle Saporta

Un immense chantier actuellement à l'arrêt. Le projet de l'A69 entre Toulouse et Castres est contesté par des mouvements écologistes. L'État a fait appel de la décision de la justice d'arrêter les travaux. Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, était sur place, samedi 12 avril, dans le Tarn. Il souhaite un "équilibre" entre développement et environnement pour de tels projets. 

Vive l'équilibre ! Ce mot est désormais un synonyme de : "ça n'avance pas. Mais on continue comme ça". On se croirait dans les Shadoks, ces volatiles étranges qui passaient leur vie à pomper, et dont la devise était : "plus ça rate, plus on a de chance pour que ça marche". On piétine quand même depuis près de deux mois.

Le tribunal administratif a arrêté les travaux de l’autoroute A69 fin février. L’État a annoncé avoir fait appel fin mars. Il a lancé une demande complémentaire de sursis à exécution pour suspendre les effets de la décision du tribunal, qui, si et seulement si la cour d'appel administrative y fait droit, pourrait permettre de recommencer les travaux. Ouf !

La décision sera connue au mois de mai. C'est aussi à la mi-mai que le Parlement examinera une proposition législative par un autre biais, encore, de relancer les travaux. Vous vous rendez compte de ce pataquès ahurissant ? Tribunaux, appel, recours, lois... tout ça pour finir 53 km d'autoroute ?

Une inaction perpétuelle ?

On a créé un monstre juridico-administratif qui nous entrave. Du coup, il reste aux politiques la procrastination camouflée sous du "bla bla bla" volontariste. Pour les OQTF, comme pour le narcotrafic, comme pour l’insécurité comme pour les autoroutes, on tape du pied et on gonfle le torse mais force est de constater qu’il ne se passe rien. 

On est magistralement coincés dans du sur place. Sous la IIIe République, Henri Queuille avait prononcé une phrase très intéressante. "Il n'est pas de problème qu'une absence de solution ne finisse par résoudre”, avait-il dit. Espérons qu'il ait raison et que de notre inaction perpétuelle naîtra la lumière. Mais ne parions pas trop sur la solution miraculeuse, elle me paraît pour le moins audacieuse.