"Probablement le meilleur d'entre nous". Voilà comment Jacques Chirac a résumé, en quelques mots prononcés un jour de novembre 1994, toute l'estime qu'il porte à Alain Juppé. De leur rencontre en 1976 au soutien affiché par l'ex-chef de l'État à son ancien premier ministre pour la présidentielle de 2017, la relation des deux hommes a toujours été emprunte d'une confiance, d'une affection et d'un respect mutuels, qui n'auront pas toujours été profitables à Alain Juppé.
Prenant sous son aile un Alain Juppé qu'il voit comme son héritier, Jacques Chirac fera de lui l'un des hommes-clé de sa campagne présidentielle victorieuse de 1995, après douze ans de collaboration à la mairie de Paris. Cette relation qui dépasse le cadre de la simple entente aurait, dit-on, désespéré Nicolas Sarkozy, son autre disciple, au point de le conduire à rallier Édouard Balladur.
C'est donc logiquement que le nouveau président de la République installe son homme de confiance à Matignon. Le début des ennuis. L'image d'Alain Juppé pâtit des réformes difficiles qu'il doit mettre en place. "Il incarne ce que le président de la République a dénoncé durant sa campagne : la pensée unique, la technocratie, une approche comptable de la politique", dénonce L'Express du 10 octobre 1996.
L'hebdomadaire évoque pour la première fois la possibilité du remplacement d'Alain Juppé avant les législatives de 1998. S'il est précisé que les deux hommes entretiennent "les meilleures relations de travail", le loup est dans la bergerie : les difficultés d'Alain Juppé crispent son mentor.
La dissolution de 1997 marquera un premier tournant négatif dans la relation des deux hommes. D'abord opposé à cette hypothèse, Alain Juppé finit par se laisser convaincre. Il est depuis régulièrement cité comme l'un des principaux instigateurs, avec Dominique de Villepin, de la décision qui conduira la France à cinq ans de cohabitation. Une erreur que Bernadette Chirac ne lui pardonnera pas.
La fidélité d'Alain Juppé reste toutefois totale. L'affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris en restera le symbole le plus éclatant. Le maire de Bordeaux est condamné à une peine d'inéligibilité de dix ans, ramenée à un an. Il apparaît alors, aux yeux de l'opinion publique, comme celui qui aura pris les coups en lieu et place de Jacques Chirac, finalement condamné en 2011.
Plus que mon propre sort judiciaire, c'est le sien qui me préoccupait
Jacques Chirac
Un épisode relaté par l'ancien président dans Mémoires : "Cette nouvelle m'a plongé dans une profonde tristesse (...) Plus que mon propre sort judiciaire,
c'est le sien qui me préoccupait (...) Je l'ai appelé pour le réconforter, l'assurer de mon
affection, de mon amitié. Je l'ai senti terriblement meurtri (...) Je l'ai exhorté à tenir bon (...) Il considérait
qu'en raison de sa condamnation, (...) il
ne pouvait être question pour lui de se maintenir à la direction de l'UMP.
Sa décision était prise et je ne suis pas parvenu à le faire changer d'avis".
Dès lors, Alain Juppé décide de s'exiler. Cette prise de distance éloigne les deux hommes. "La relation reste affectueuse, mais les liens se sont peu à peu distendus. Les rencontres annuelles entre les deux hommes se comptent à peine sur les doigts d’une seule main. Ils peuvent passer plusieurs mois sans se voir", raconte l'éditorialiste Bruno Drive, dans Le dernier Chirac.
J'ai pris des coups pour lui
Alain Juppé
La résurrection politique d'Alain Juppé s'effectuera d'ailleurs sans son mentor de toujours, qui ne lui prodiguera aucun conseil ni ne se mêlera de ses retours au gouvernement, en 2007 puis en 2010. Mais en public, le maire de Bordeaux ne manque jamais à son devoir de fidélité. "J'ai une affection profonde pour lui (...) J'ai pris des coups pour lui mais il m'a donné ma chance et de grandes chances", confie-t-il le 29 septembre 2011 sur France 2. Tout juste évoque-t-il une "amertume passée" et avoue "ne pas attendre de pardon de Jacques Chirac".
Si Alain Juppé ne se présente pas, je vote Hollande
Jacques Chirac en 2011
Nul ne sait si les deux hommes ont évoqué de manière privée les affaires et les événements qui les ont (un peu) éloignés mais au moins Alain Juppé est-il assuré du soutien fidèle de l'homme avec qui il a dirigé le pays de 1995 à 1997. Prêt à voter pour lui en 2017, l'ex-président affirmait déjà vouloir le faire en 2011. "Si Alain Juppé ne se présente pas, je vote Hollande", expliquait-il alors. La preuve, s'il en fallait une, que Jacques Chirac reste convaincu qu'Alain Juppé est "le meilleur d'entre nous".
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