"Jean-Pierre n'est ni homme ni femme. Il ne se sent ni homme ni femme. Il ne peut devenir ni homme ni femme. Et il ne veut devenir ni homme ni femme". Ces propos sont ceux de Bertrand Périer, l'avocat de Jean-Pierre, un individu intersexe de 65 ans dont la demande que la mention "sexe neutre" figure sur son état civil est examinée mardi 21 mars par la Cour de cassation.
Né "sans pénis ni vagin" ainsi que sans "testicules ou ovaires", Jean-Pierre, absent à l'audience, veut simplement "que soit reconnu" ce qu'il est "depuis la naissance", a-t-il expliqué, lundi 20 mars. "Quand je me regarde nu dans un miroir, le matin ou le soir, je vois bien que je n'appartiens pas au monde des hommes ni à celui des femmes", a décrit ce psychothérapeute qui dans l'est de la France.
S'il a été "affublé" - selon ses propres dires - d'un prénom masculin, c'est parce que sa "mère voulait un garçon". Son avocat a dénoncé le fait qu'il vit "avec un état civil qui n'est pas le sien" alors que "le seul objectif juridique et social" de cette procédure est pourtant de "refléter l'identité réelle" d'une personne.
Pendant longtemps, Jean-Pierre a vécu dans le secret. À 42 ans, il s'est marié, a adopté avec sa femme un enfant et en août 2015, un juge des affaires familiales de Tours (Indre-et-Loire), sa ville de naissance, a accepté que la mention "sexe neutre" figure sur ses papiers d'identité. Seulement, en mars 2016, la cour d'appel d'Orléans (Loiret) a rejeté le jugement, craignant alors de "reconnaître, sous couvert d'une simple rectification d'état civil, l'existence d'une autre catégorie sexuelle". Retour donc à la case départ pour Jean-Pierre.
La nature n'est pas binaire
Bertrand Périer, avocat de Jean-Pierre
"La nature n'est pas binaire, s'est agacé l'avocat de Jean-Pierre. Je ne vois pas pourquoi, là où la nature n'est pas binaire, le droit le serait". Selon lui, dans le texte qui régit l'état civil, rien ne dit ainsi d'apposer "homme ou femme" après la mention sexe, la mention "neutre" peut donc tout aussi bien être acceptée.
Mais pour l'avocat général, Philippe Ingall-Montagner, qui a demandé le rejet du pourvoi, il appartient au législateur de régler une question "aussi fondamentale". "Il y aurait trop d'incertitude à faire autrement. Créer une nouvelle catégorie de personne, c'est quelque chose qui excède l'office du juge", a-t-il tranché. La Cour de cassation rendra son arrêt concernant la demande de Jean-Pierre le 4 mai.
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