Il est 2h30 du matin, le 4 mars 2008 au moment où a lieu un coup de théâtre. Un homme passe le sas du commissariat de Puteaux-La Défense. Il présente une pièce d'identité au nom de David Sagno, 33 ans, sans domicile fixe. "J'ai tué deux femmes", annonce-t-il. Il évoque d'abord la mort, en 2002, de Maria-Judite Araujo, une femme de ménage de 48 ans au moment des faits.
L'homme revendique aussi l'assassinat, un an plus tôt, de Marie-Agnès Bedot, une femme de 45 ans, mère de trois enfants, sous les arches du Pont de Neuilly. Le problème, c'est que Marc Machin, jeune homme âgé de 19 ans aux moments des faits, a déjà été condamné pour ce meurtre à une peine de 18 ans de réclusion criminelle. Les traces ADN retrouvées sur les corps des deux victimes sont comparées avec celui de David Sagno : il est bel et bien le véritable meurtrier.
Daniel Zagury, psychiatre légal et expert judiciaire auprès de la cour d'appel de Paris, l'a examiné après sa dénonciation en 2008. Il revient dans Les Voix du Crime, sur ce double meurtrier au comportement trouble. Qui est véritablement David Sagno ? Comment cet homme n'a-t-il pu livrer ses vérités que plusieurs années après les faits ?
Il avait eu un parcours précocement très instable
Daniel Zagury, expert-psychiatre
Élevé en grande banlieue parisienne au sein d'une famille de neuf enfants, David Sagno est décrit comme un garçon "timide". En 1994, il effectue son service militaire dans la marine, duquel il sortira un an plus tard. Le jeune homme, qui a du mal à garder un emploi stable devient sans domicile et découvre l'alcool. En 1995, à la veille de ses 21 ans, il poignarde une femme à un arrêt de bus de Brest et sera placé en détention provisoire pour violence avec arme.
Pendant plusieurs années, l'homme de 33 ans erre dans des parkings de La Défense et Neuilly-sur-Seine. Son parcours chaotique a un impact sur lui. Plus jeune, il raconte voir sa mère battue par son père et reste marqué par ces évènements. "Ce qui était assez frappant, c'était le fait que lui, il avait eu un parcours précocement très instable, alors que le reste de la fratrie semblait beaucoup plus stable, avec des professions, que lui n'était pas parvenu à acquérir", explique Daniel Zagury.
On voyait qu'on n'avait pas affaire à un malade mental qui était totalement déstructuré
Daniel Zagury, expert-psychiatre
Mis en examen pour assassinats en mars 2008, Sagno est examiné par des experts-psychiatres. Parmi eux, Daniel Zagury, qui se rappelle de leur première rencontre. Il fait la connaissance d'un homme lettré, au comportement saisissant. "D'abord, c'est quelqu'un qui s'exprimait très bien, avec un langage plutôt châtié, recherché (...). On voyait qu'on n'avait pas affaire à un malade mental qui était totalement déstructuré", explique-t-il. "On pouvait communiquer avec lui, on posait des questions, on avait des réponses et il y avait une interaction".
Daniel Zagury et les enquêteurs se questionnent lors de l'expertise sur le profil psychologique de David Sagno. Ce dernier explique qu'un double maléfique l'a poussé à passer à l'acte afin de commettre ces deux crimes, desquels il semble détaché. Plusieurs années après les faits, après s'être mu longuement, David Sagno et ses aveux ont changé la face d'une affaire où un innocent a été placé au cœur des accusations. Au bout de sept longues années derrière les barreaux, Marc Machin est libéré de prison le 7 octobre 2008.
Ce n'est qu'en 2010, deux ans après les aveux de David Sagno, que Marc Machin, voit enfin sa condamnation annulée. Un mois plus tard, les experts psychiatres rendent leur rapport. : ils considèrent celui qui s'est rendu comme un psychotique comme quelqu'un évoluant entre les pensées magiques et les délires. Sagno présente un état dangereux "extrême". Son discernement était certes altéré, mais n'était pas aboli au moment des meurtres.
En février 2012, David Sagno est devant la cour d'assises des Hauts-de-Seine de Nanterre. "S'il n'est pas fou, il est malade", précise d’emblée son avocat, Bérenger Tourné. À propos des deux meurtres au Pont de Neuilly, celui qui dit avoir répondu à un double maléfique est finalement condamné à 30 ans de prison, assortis d'une peine de sûreté de vingt ans.
En août 2024, le pôle criminel des cold-cases de Nanterre se penche sur le parcours criminel de David Sagno. Il s'agit de vérifier si cet homme, emprisonné depuis 2008, n'aurait pas commis d'autres meurtres de femmes. Les psychiatres qui l'ont examiné, assurent que David Sagno présente un "certain nombre de facteurs repérés chez les tueurs en série". Le condamné sera virtuellement libérable en 2032, il sera alors âgé de 58 ans.
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