Il paraissait en bonne santé. Jean-Paul 1er, Albino Luciani, surnommé "le pape sourire", est mort subitement d'un supposé infarctus le 28 septembre 1978, alors qu'il prenait tout juste la mesure de la tâche qui l'attendait. Il avait 65 ans. Un décès si brutal qu'il a laissé le Vatican au cœur d'une affaire semant doutes, suspicions et accusations.
Si la conclusion de l'Église déclare une mort naturelle, l'hypothèse criminelle n'est pas exclue. On théorise alors l'empoisonnement, frôlant les idées complotistes.
L'accumulation de maladresses suscite aussi l'intérêt de la presse internationale, menant certains journalistes d'investigations à fouiller dans les secrets du Vatican. À l'époque, l'Église catholique fait face à des crises importantes, des affaires en cours, notamment auprès de la banque du Vatican.
Il y a des gens qui avaient des raisons de voir le pape disparaître
Yvonnick Denoël, spécialiste du renseignement
La succession à Paul VI n'est pas simple pour le jeune pape, qui débute dans ses fonctions. "Il semblerait que Luciani était assez indigné de ce qu'il découvrait dans les dossiers et qu'il avait prévu de prendre des décisions, des sanctions, révèle Yvonnick Denoël. Par conséquent c'est très tentant de se dire qu'il y a des gens qui allaient perdre leur travail. Peut être ont-ils franchi le pas ?"
La politique financière du Vatican est alors menacée par ce jeune pape qui veut retrouver une Église des pauvres, et fuir les privilèges. Un mobile séduisant pour confirmer les doutes qui planent autour de la mort du nouveau venu. Plus encore, il y a la présence d'un certain cardinal nommé Paul Marcinkus, un repenti de la mafia, relié aux banquiers du Vatican.
Rien ne laisse penser que des mafieux auraient laisser un poison dans une fiole
Bernard Lecomte, historien et spécialiste du Vatican
En pleine guerre froide, cet homme profite de la situation géopolitique pour transformer le Vatican comme une machine à cash qui opère le blanchissement d'argent de l'autre côté du rideau de fer. L'envers du décor n'est donc pas des plus paisibles et beaucoup de secrets et de manigances à hauts coûts sont entravés dans les fonds du Vatican. Cette reconstitution ne se fera que quatre ans après la mort du pape Jean-Paul Ier, lors de l'explosion de l'affaire Paul Marcinkus en 1982.
"Sur le moment (en 1978 - mort de Jean-Paul Ier) rien ne laisse penser que des mafieux suspects auraient laisser un poison dans une quelconque fiole", rectifie Bernard Lecomte, historien et spécialiste du Vatican, et d'ajouter : "Ce n'est qu'après cette affaire que l'on revient sur la mort de Jean-Paul Ier".
Malgré les accusations et les soupçons qui prédominent dans la presse, le Vatican va tout faire pour confirmer une fin de règne apaisée pour le jeune pape. Le 4 septembre 2022, une béatification a été organisée sur la place Saint-Pierre en l'honneur de l'ancien pape Jean-Paul Ier, pour lui remettre le titre de bienheureux.
- Bernard Lecomte, historien, spécialiste du Vatican auteur du livre Tous les secrets du Vatican, Perrin.
- Yvonnick Denoël, spécialiste du renseignement et auteur du livre Les Espions du Vatican, Nouveau Monde Editions.
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