Tout en haut de son dossier à la Protection Judiciaire de la Jeunesse, une éducatrice spécialisée a écrit il y a quelques mois : "abandonné de toutes parts, errance certaine, cet enfant doit être protégé". Placé en foyer depuis l'âge de 9 ans, P. a vécu une pré-adolescence marquée par la délinquance de rue. Les policiers l'arrêtent sur des points de deal à Sorgues, à Carpentras, à Nîmes. "Il va même aller jusqu'à Paris accompagner un copain de galère, dont la mère va nous appeler pour savoir à qui est ce môme" témoigne Hélène Berrier, éducatrice à la PJJ du Vaucluse.
"Ses deux parents sont incarcérés, mis en cause dans deux procédures distinctes pour trafics de stupéfiants", avait souligné le Procureur Nicolas Bessone quelques jours après l'assassinat de Nessim Ramdane, chauffeur VTC marseillais de 37 ans. L'adolescent qui a pressé la détente du revolver, involontairement selon lui, est un fugueur chronique. Il s'est échappé d'un centre éducatif fermé de Nîmes au printemps dernier. "Rapidement, on est dans une absence d'ancrage familial, affectif, il n'a personne a qui s’identifier et surtout il n’a plus rien à perdre. Sa vulnérabilité l’amène à devenir dangereux, car il n'a aucune perspective", analyse l'éducatrice, secrétaire régionale du syndicat SNPES Pjj Fsu.
Avant d'être placé à Nîmes, P. a été mis en examen pour tentative d'extorsion à l'encontre d'une dame âgée de Carpentras. Très agité en garde-à-vue, les fonctionnaires vont le passer au dépistage : il est positif à la cocaïne. Son dossier indique aussi qu'il a été brutalisé dans certains quartiers où il trainait. "Avoir en face quelqu'un de si jeune, c'est un interrogatoire difficile à oublier" témoigne une magistrate qui a croisé sa route.
Une vie d'errance plutôt que de loger dans une structure comme il en a côtoyé dans son enfance. "Certains jeunes deviennent maltraitants entre eux. Certains sont rejetés. L'Aide Sociale à l'Enfance manque cruellement de moyens pour placer ces ados dans des cadres qui leur conviendraient mieux. Chacun devrait avoir un suivit individualisé" pointe Hélène Berrier.
Pas assez de maisons, ni de petites structures. Des centres éducatifs fermés dont les adolescents s'évadent sans peine. Entre cinq et dix places seulement pour le département du Vaucluse. Le syndicat SNPES réclame leur fermeture pour "dysfonctionnement" et davantage de centres éducatifs ouverts. De nouveau attrapé sur un point de deal, en fugue, le jeune meurtrier présumé va connaître sa première détention fin juin 2024, pour non-respect de son contrôle judiciaire. Il sort le 28 août. Un mois plus tard, il est recruté sur le réseau social Snapchat pour tuer un homme qu'il ne connaît pas, contre la promesse de 50.000 euros.
Arrêté sur dénonciation de son commanditaire, P. est aujourd'hui de nouveau emprisonné dans le quartier mineurs d'une maison d'arrêt, loin de Marseille. "Et ce qui est dommage, c'est que l’État n'a débloqué des moyens qu'après le crime" révèle l'éducatrice de la PJJ. "Davantage de médiation, d'activités, de suivi psychologique pour ce jeune. Mais je crains qu'entre le trauma et son parcours, avec en plus une longue peine de prison, il soit difficile de le réinsérer. C'est surtout triste que cela arrive après la mort de quelqu'un. Il aurait dû être pris en charge avant. Ce passage à l'acte grave, c'est exceptionnel mais des gamins comme ça, aussi carencés, fascinés par l'argent du trafic, nous en accompagnons plein."
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