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L'affaire Bernard Boursicot : espionnage, amour et trahison

Dans les années 1960, Bernard Boursicot est tombé amoureux d'une chanteuse alors qu'il travaillait à l'ambassade de France en Chine. Un amour complètement factice qui dissimule un subterfuge d'envergure pour le contraindre à l'espionnage...

Le comptable Bernard Boursicot, partage le banc des accusés avec avec le co-accusé et ami chanteur d'opéra chinois Shi Pei Pu 05 mai 1986 alors que leur procès pour espionnage s'ouvre au Palais de Justice de Paris.
Crédit : PHILIPPE BOUCHON / AFP
L'INTÉGRALE - L'affaire Bernard Boursicot : espion par amour
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L'ENQUÊTE - L'affaire Bernard Boursicot : quels secrets a-t-il révélé à la Chine ?
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Jean-Alphonse Richard - édité par Angéline Da Costa
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Une rocambolesque histoire d'espionnage. Bernard Boursicot, un jeune diplomate français, a longtemps été en poste à Pékin, où il a plus ou moins été arnaqué pour espionner pour le compte de la Chine dans les années 1970. Il est tombé dans le piège d'un amour aveugle tissé par un chanteur chinois, qui s'est fait passer pour une femme dans l'objectif d'orchestrer une escroquerie politique de haut vol. 

Bernard Boursicot pose le pied sur le sol chinois pour la première fois en 1964, à l'âge de vingt ans, où il travaille à la comptabilité de l'ambassade française. Le pays est si fermé que le jeune homme s'en remettra volontiers aux mains d'un jeune chanteur d'opéra au physique androgyne de 26 ans pour connaître le pays. Il est certain d'avoir trouvé en Shi Pei Pu son guide, mais surtout, un très proche ami. Il ignore alors que le chanteur est un agent des services chinois chargé de recruter des taupes. 

Plusieurs mois s'écoulent avant que son ami lui livre une extraordinaire déclaration : "Je n'ai jamais été un homme, je suis une femme, mais il faut que vous gardiez le secret", lui dit-il alors. Instantanément, l'amitié de Boursicot devient une passion dévorante, à tel point qu'il ne se rend pas même compte du subterfuge durant leurs rapports sexuels. 

Comment est-il passé d'amant à espion pour le compte de la Chine ?

Lorsque le Français doit être muté, elle prétend être enceinte. Une fois à l'étranger, ils garderont contact et Boursicot croit dur comme fer que son amante a donné naissance à un garçon nommé Shi Du Du. Pour eux, il fera tout pour revenir à l'ambassade de Pékin. Chose faite en 1969, où il est même monté en grade en tant qu'archiviste en charge de la valise diplomatique par laquelle transitent des documents secrets.

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Lors d'une mise en scène rocambolesque orchestrée par les espions chinois, on fait croire à Boursicot que s'il n'aide pas la Révolution, sa compagne sera alors gravement en danger. Il cède et devient un espion au service de renseignement du Parti communiste chinois. Trois fois par semaine, il fournit ainsi des documents à ses amis, quitte à puiser dans la valise diplomatique.

Il a davantage l'impression de jouer un jeu que de trahir la France. Une mission qui "l'amuse clairement" selon Julien Joly, journaliste au Mensuel de Rennes, "il est tombé dans le piège à moitié de son plein gré par ce que c'est excitant pour lui de jouer double jeu". Enfin récompensé de ses efforts, il finira par voir Shi Du Du, son fils, âgé de sept ans, pour la première fois. Un enfant qui n'appartient à aucun des deux, mais un petit Ouïghour, certainement enlevé ou acheté par l'espion. 

La fin du subterfuge

Le subterfuge va finalement prendre fin une fois Shi Pei Pu et leur faux fils se sont installés en France lorsque Boursicot travaille au Quai d'Orsay. Le couple sera arrêté en 1983 par la DST, le contre-espionnage français, et il sera inculpé et écroué pour "intelligence avec des agents d'une puissance étrangère". 

Le secret gardé si longtemps par sa compagne éclate enfin au grand jour : il s'agit bien d'un homme. Bernard Boursicot tombe des nues et se sent couvert de honte, notamment lors du procès où il assure n'avoir fait ça que par amour et n'y avoir vu que du feu. Son ancien partenaire en viendra même à lui montrer son sexe alors qu'ils sont emprisonnés. "Le monde s'écroule", relate Didier Boussard, réalisateur d'un documentaire sur cette affaire, à tel point "qu'il prend son rasoir et qu'il se tranche la gorge". 

Survivant à sa tentative de suicide, lors du procès, ses avocats répètent qu'aucun document stratégique n'a jamais été transmis aux Chinois. Bernard Boursicot et Shi Pei Pu sont condamnés à six ans de prison. Chacun de leur côté, leurs chemins ne se croiseront plus jamais, même après la fin de leurs peines. Après le procès, Bernard Boursicot avait exprimé sa désaffection totale pour Shi Pei Pu, le chanteur qui aura ruiné sa vie. 

Les invités de "L'Heure du Crime"

- Julien Joly, journaliste au Mensuel de Rennes. Il est l’auteur d’un dossier spécial Affaire Boursicot, amour, espions et trahisons paru dans le mensuel d’avril 2022.
- Didier Boussard, réalisateur du documentaire L’espion de Mao diffusé sur France 3

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