Juliano Verbard : un gourou nommé "Petit lys d'amour"

Samedi 9 août 2007, un couple se présente au commissariat de Saint-Denis, capitale de l'île de la Réunion. Ils viennent déposer une plainte pour des viols répétés sur leur fils de douze ans et pour agressions sexuelles sur leur autre garçon de neuf ans. Les parents accusent un homme, le dénommé Juliano Verbard, 21 ans, surnommé "Petit lys d'amour". Il dirige une association religieuse, le Cœur immaculé et douloureux de Marie, installée sur la commune de Saint-Paul. 

Juliano Verbard est interpellé, mais nie les faits. Ses fidèles, autour de cinq cents, protestent contre l'incarcération de leur gourou qu'ils présentent comme inoffensif. Tous les huit de chaque mois, il les convie dans son jardin, sous un cocotier. La Vierge Marie lui apparait et il peut lui parler. Le couple qui a porté plainte est lui menacé, insulté. "C'est une île marquée par les croyances, par les coutumes. Dès que ça touche la religion, ça fait beaucoup de dégâts", indique Bernadette Loubier, ancienne rédactrice en chef du Quotidien de la Réunion qui a suivi l’affaire.

Lundi 9 juillet 2007, Alexandre Telahire, douze ans, disparait, puis réapparait le lendemain à la gendarmerie, sain et sauf. Il raconte qu'un de ses amis, Guillaume Maillot, 20 ans, avec qui il parle religion, l'a emmené avec trois hommes dans une voiture. Il a passé la nuit dans une maison, puis on l'a ramené près de chez lui.

Pourtant, un mois plus tard, vendredi 3 août dans la soirée, Alexandre Telahire est à nouveau enlevé. Cette fois, sous les yeux de sa mère et de son petit frère, cinq hommes cagoulés le bâillonnent et le ligotent, avant de le jeter dans le coffre d'une voiture. Les autorités soupçonnent Juliano Verbard d’être derrière le rapt. La maman, Catherine Telahire, est effondrée : "J'ai peur d'un sacrifice". Le gourou pédophile est introuvable.

Des fidèles qui protègent leur gourou

Juliano Verbard peut compter sur le soutien de ses fidèles, prêts à tout pour le défendre. Les nombreuses gardes à vue ne donnent rien, tout le monde se tait. Mais après 48 heures de traque, un des ravisseurs présumés craque et mène la police dans une maison. On y découvre Alexandre vivant, prostré dans une pièce. Juliano Verbard est là, terré sous un 4X4.

Mardi 7 août, treize personnes, dont le gourou de la secte et le numéro deux, son amant Jean-Fabrice Michel, sont mises en examen. Juliano Verbard va être jugé pour l'enlèvement, pour les viols et agressions sexuelles des deux frères. Il écope de dix-huit ans de prison, mais très vite "Petit lys d'amour" est libéré par ses adeptes. 

"La difficulté dans cette affaire a été de savoir si c'était lui-même, Juliano Verbard, qui donnait tous ses ordres, ou si ce gourou a été dépassé par ses adeptes, qui voulaient que cette organisation perdure. Parce qu'ils savaient que Juliano Verbard allait tomber dans les griffes de la justice", explique Bernadette Loubier, invitée dans L'Heure du crime. 

L'homme fini par se rendre quelques mois plus tard. Mercredi 6 avril 2011, il apparait devant la Cour d'assises de la Réunion, à Saint-Denis. Il est jugé avec quinze disciples, pour les deux enlèvements en 2007 d'Alexandre Telahire. Les experts décrivent un homme qui a fait de l'église du Cœur douloureux et immaculé de Marie une secte. Juliano Verbard est condamné à neuf ans de prison. Entre trois et huit ans pour les complices.

Les invités de "L'Heure du crime"

- Me Nicolas Normand, avocat au barreau de Saint-Denis (La Réunion) et avocat de Juliano Verbard.
- Bernadette Loubier, ancienne rédactrice en chef du Quotidien de la Réunion, elle a suivi l’affaire pour le Quotidien de la Réunion.

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