INFO RTL - Évasion de Mohamed Amra : le logisticien présumé de la cavale du narcotrafiquant interpellé

C'est dans le pavillon d'un père de famille sans casier judiciaire que les enquêteurs de la PJ, appuyés par les gros bras de la BRI, ont surgi le 2 septembre, à six heures du matin, dans une petite rue des faubourgs de Rouen. A.N., 37 ans, est pourtant soupçonné d'être un des rouages essentiels de la cavale de neuf mois qui a suivi l'évasion sanglante de Mohamed Amra, le 14 mai 2024, qui a couté la vie à deux surveillants pénitentiaires.

Le suspect, qui affirme n'avoir aucun lien avec les faits et qui reste présumé innocent, a été mis en examen pour association de malfaiteurs criminelle et placé en détention le 5 septembre dernier d'après les informations de RTL. Les enquêteurs de l'Oclco (Office de lutte contre la criminalité organisée), estiment que les indices recueillis démontrent son "rôle prégnant" dans "l'organisation des déplacements successifs" de "la Mouche", le surnom d'Amra depuis son adolescence. 

Ce sont les téléphones saisis au moment de l'interpellation du narcotrafiquant en Roumanie, le 22 février 2025, qui ont permis de caractériser le rôle présumé du logisticien. Jusque-là ce proche d'Amra, surnommé "Zepec" dans leurs échanges, avait intéressé de près les policiers dès le début des investigations, notamment pour sa propension à changer en permanence de téléphone - 7 boitiers et 15 lignes différentes entre l'évasion en mai 2024 et l'arrestation d'Amra en février 2025 - mais sans pouvoir le relier à la cavale malgré des surveillances poussées. 

Des échanges quotidiens

L'exploitation des portables roumains révèle que, lors son séjour final de quinze jours à Bucarest, Mohamed Amra était en contact avec A.N. tous les jours, via des messageries cryptées. Les téléphones établissent aussi, selon les investigations, que "Zepec" fait partie de ceux qu'Amra a contactés le 23 février pour tenter de corrompre les policiers roumains, en faisant miroiter des virements mirobolants en cryptomonnaies contre sa libération - une tentative de corruption immédiatement démasquée et aujourd'hui ajoutée aux chefs de mise en examen. Enfin, les deux amis échangent sur les prochaines destinations de fuite possible, vers l'Albanie ou l'Ossétie du Sud, une région séparatiste pro-russe de Géorgie.

Peu à peu, en remontant le temps, la PJ va positionner encore plus précisément le suspect sur la gigantesque toile des complices présumés de la Mouche. Le 22 octobre 2024, d'après les enquêteurs, A.N. supervise le départ du fugitif de sa planque de Compiègne pour en gagner une nouvelle, à Rouen, dans un duplex situé à proximité de la Sablière, le quartier d'enfance de "la Mouche". C'est lui qui trouve l'appartement via une connaissance d'Amra qui a une dette envers le trafiquant et qui est menacé de mort et de violences envers sa famille. L'ADN d'Amra a depuis été identifié dans le duplex, ainsi qu'une connexion à un compte de Playstation en ligne, activé avec l'une des adresses mails attribuées au narcotrafiquant. 

Dossier tentaculaire

Nouveau changement de planque le 8 janvier 2025, là encore présumément supervisé par "Zepec", dont le téléphone borne quotidiennement dans le secteur du nouvel appartement situé cette fois-ci près du centre-ville de Rouen. 

Arrive enfin l'exfiltration vers la Roumanie du 5 février 2025. Dans la journée, A.N. fait plusieurs déplacements, possiblement pour récupérer une fausse carte d'identité pour le compte d'Amra, d'après les enquêteurs. Et cela en compagnie d'un comparse, identifié par son pseudo "le faussaire" dans ses conversations présumées avec Amra. Ce comparse L.N., qui nie également son implication, a lui aussi été mis en examen début septembre, soupçonné d'avoir fourni les documents d'identité au nom de "Nicolas D.".

Entretemps, un "transporteur" a été recruté. Il s'agit une nouvelle fois du débiteur d'Amra, celui qui a déjà fourni le premier appartement de Rouen. De nouveau menacé, il expliquera en garde à vue qu'il n'a pas eu le choix. Là encore, l'implication du logisticien A.N. est soupçonnée, fournisseur présumé du téléphone occulte configuré spécialement pour le "transporteur" pour le trajet vers l'Europe de l'Est. Ce dernier a loué un coupé Mercedes blanc, ainsi qu'une Renault Clio qui servira de véhicule "ouvreur" jusqu'à la frontière allemande, 20 kilomètres en amont sur l'autoroute. Le tout sera payé en liquide après le retour de Bucarest.  

À 22h30, Mohamed Amra teint en roux et muni d'une fausse identité sort de sa planque et rejoint la Mercedes dans une rue de Rouen. Il a encore changé plusieurs fois de téléphone et de carte SIM mais la PJ est à ses trousses, proche de le localiser. Quelques jours plus tard le trajet vers Bucarest est reconstitué, la police romaine activée et "la Mouche" finalement interpellée. Suivent plusieurs vagues d'interpellations jusqu'à la dernière en date début septembre. 46 complices présumés sont désormais mis en examen dans ce dossier tentaculaire. 

Contacté par RTL l'avocat de A.N. n'a pas souhaité commenter ces informations. 

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