Incident au procès de Redoine Faïd : quel est le statut des repentis ?

Le visage de l’homme sans visage est à nouveau public. Le procès de Rédoine Faïd a été suspendu vendredi 6 octobre, jusqu'à lundi, après la diffusion par erreur dans la salle du visage d'un accusé comparaissant caché. La scène s'est déroulée jeudi 5 novembre dans l'après-midi, au tout début de l'interrogatoire d'un homme qui comparaissait dissimulé derrière un paravent. Cet homme, qui est accusé dans l’affaire de l’évasion de Redoine Faïd, est en fait un repenti. Il était à la barre, caché, avant que d’un seul coup son visage n’apparaisse sur tous les écrans de la salle, ce qui n’aurait jamais dû arriver. 

Un incident inquiétant car cet accusé n’a pas participé directement à l’évasion du célèbre braqueur. Il lui est reproché d’avoir mis en relation le clan des Faïd avec des bandits corse, le clan Mariani, lié au gang de la Brise de mer. Il y aurait eu un deal : que le clan corse aide Redoine Faïd à sortir de prison, et en échange il ferait assassiner des membres d’un clan rival. Tous les accusés nient cette transaction. Le repenti, lui, a raconté ce deal aux enquêteurs, ainsi que d’autres éléments sur le clan Mariani.

Cet homme vit désormais sous une fausse identité, à l’étranger et avec ses trois enfants. Il a physiquement changé et sa femme se dit très inquiète. "Ce n’est pas rassurant que le public ait pu le voir et qu’une photo de lui circule sur Internet, quand on sait la haine féroce que lui voue le clan Mariani", a-t-elle prévenu. Une erreur gravissime qui met en lumière le statut de ces repentis, largement popularisés dans les œuvres de fiction, notamment sur la mafia. 

Une dizaine de bénéficiaires en France

Ces repentis sont protégés en échange des informations qu’ils fournissent. Une commission, composée de magistrats et de policiers, est chargée d’examiner leurs demandes. Elle peut décider de protéger très largement quelqu’un qui décide de donner des informations. Cette pratique est très importante notamment dans les enquêtes concernant notamment la mafia, où personne ne parle jamais (ou presque). Les repentis permettent ainsi de rentrer à nouveau dans le fonctionnement de ces clans secrets où règne l’omerta.

Quand quelqu’un décide de parler, un changement d’identité peut lui être offert ainsi qu’une protection physique pour assurer sa sécurité. Il peut également bénéficier d’une formation professionnelle pour refaire sa vie, ou encore d’une prise en charge financière pour lui permettre de payer ses avocats. Ces frais diminuent cependant au fil des années. Ce programme permet aussi une réduction de peine en échange des informations qu’il peut fournir, ce qui explique pourquoi tout cela doit rester secret.

Le nombre de bénéficiaires de ce programme reste très secret. Il n’existe, bien évidemment, aucune liste de noms. Une dizaine de personnes en bénéficient en France en ce moment, selon les estimations. Ils sont pour la plupart liés à des trafics de drogue et des règlements de compte. Un repenti qui ne respecte pas les règles peut même être exclu du programme. C’est le cas de l’homme dont l’identité a été révélée au procès de Redoine Faïd, pour des raisons qu’on ne connaît pas. Il a été exclu du programme de repenti qui lui avait permis de disparaître jusqu’à ce que sa photo n’apparaisse jeudi, sur les écrans du tribunal.