Double infanticide de Drouville : comment une mère de famille "loin des stéréotypes" a-t-elle pu assassiner ses deux enfants ?

L'histoire troublante d'une mère meurtrière. Le 15 février 2022 aux alentours de 13h30, à Drouville (Meurthe-et-Moselle), Ingride Van Der Kellen étouffe ses deux jeunes enfants, âgés de neuf mois et deux ans et demi, dans sa voiture. La doctorante de 37 ans, décrite comme une "mère parfaite" par ses proches, menait une vie de couple affectée avec Jean, son compagnon.

"Quand je prends connaissance d'absolument tout dans le dossier, je découvre qu'il y a un climat de dépression, d'alcoolisme, de violence au sein du couple", raconte Me Sahra Amm, l'avocate d'Ingride van der Kellen pour Les Voix du crime. Derrière ce double infanticide, se cache l'histoire d'une femme alcoolique et fragile psychologiquement.

Exaspéré des problèmes d'addictions d'Ingride, Jean lui annonce sa décision de mettre fin à leur relation le matin des faits. L'homme, qui souhaite partir avec leurs deux enfants, "prévient qu'il va partir et chercher un logement Airbnb à l'étage de la maison", rapporte Me Amm. Une décision que la femme de 37 ans refuse catégoriquement. Cette dernière assène un coup de marteau à Jean, qui parvient à s'enfuir et à rejoindre la gendarmerie puis l'hôpital local.

Certains disent qu'elle était complètement dépressive et que son discernement est altéré. D'autres vont considérer qu'elle ne l'est absolument pas.

Me Sahra Amm

Quelques heures plus tard, aux alentours de 20h00, et après une poursuite, les gendarmes identifient Ingride van der Kellen. La trentenaire est au volant de sa voiture, ses deux enfants sont retrouvés morts sur le siège passager. Très vite, elle est placée en garde à vue à la gendarmerie de Lunéville (Meurthe-et-Moselle). L'enquête met au jour que cette mère meurtrière, née à Lisbonne, a également été marquée par la violence dans son enfance.

"Elle fuit une situation, au Portugal, dans laquelle elle a été frappée et abusée par son père. Sa mère l'a abandonnée à la naissance, elle n'a plus vraiment d'attache là-bas et elle vient poursuivre ses études en France", explique Me Sahra Amm. La femme de 37 ans avait plusieurs fois tenté de se suicider et avait consulté un psychiatre qui lui avait prescrit des antidépresseurs, une dizaine de jours avant les faits du 15 février 2022.

À la suite de sa garde à vue, Ingride Van Der Kellen est internée à l'Unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA) de Laxou (Meurthe-et-Moselle) avant de rejoindre la détention classique. Elle fait l'objet d'une série d'examens psychologiques et psychiatriques face à plusieurs experts, qui laissent place à des débats. Ces derniers souhaitent savoir si la maladie a eu un impact sur son crime.

Pour moi, c'est vraiment la peine qu'on réserve aux plus grands criminels.

Me Sahra Amm

"Certains disent qu'elle était complètement dépressive et que son discernement est altéré. D'autres vont considérer qu'elle ne l'est absolument pas. C'est très compliqué d'apporter une conclusion générale à tout ça", confie Me Sahra Amm. Deux ans et demi après les faits, le 9 décembre 2024, s'ouvre le procès d'Ingride Van der Kellen à la cour d'assises de Nancy.

Au terme de son procès, le 13 décembre 2024, Van Der Kellen est finalement condamnée à 30 ans de réclusion criminelle, assortie d'une peine de sûreté de 15 ans. "Je m'attendais à ce que ce soit élevé, peut-être pas autant. Pour moi, c'est vraiment la peine qu'on réserve aux plus grands criminels", affirme Me Amm. 

Malgré la sévérité de sa condamnation, la femme de 37 ans n'a pas souhaité faire appel. "Aujourd'hui, elle envisage l'avenir, puisqu'elle voudrait aller faire sa peine au Portugal. Elle est soulagée du poids du procès parce qu'elle avait très peur d'être confrontée au mal qu'elle a fait aux victimes (...). Il ne faut pas oublier que Madame Van Der Kellen, c'est une personne cultivée qui a fait de longues études. On est loin des stéréotypes", poursuit l'avocate.

 >> Les Voix du crime sont avocats ou avocates, enquêteurs ou enquêtrices, proches de victimes, de suspects ou de coupables. Ces témoins-clefs se confient au micro des journalistes de RTL. Des témoignages inédits, qui apportent un éclairage nouveau sur la justice et les grandes affaires criminelles d’aujourd’hui.


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