Le contrôle lors duquel un conducteur a été grièvement blessé et une passagère tuée par des tirs policiers samedi à Paris est en train de devenir un événement politique à quelques jours du premier tour des élections législatives. Les faits se sont déroulés le 4 juin 2022 en fin de matinée à Paris, lorsque des fonctionnaires à VTT ont voulu contrôler "une voiture avec quatre passagers dont l'un ne portait pas sa ceinture de sécurité", a relaté une source policière.
Alors qu'ils s'en approchaient, la voiture a pris la fuite. Un peu plus loin, tandis que les policiers tentaient à nouveau de le contrôler, le conducteur a démarré et "foncé" sur les policiers qui, selon la police, ont fait usage de leurs armes et blessé gravement "le conducteur et le passager". Les deux passagers arrière n'ont pas été atteints. Une version contestée par un témoin proche du conducteur au micro de RTL. Il y a un mois et demi, un policier a été mis en examen pour "homicide volontaire", soupçonné d'avoir tué dans la nuit du 24 au 25 avril avec une arme automatique le conducteur et un passager d'une voiture qui aurait forcé un contrôle sur le Pont-Neuf à Paris.
Afin de mieux comprendre les enjeux politiques autour de cette affaire, un point sur les chiffres et les notions juridiques en présence avec les experts de la rédaction de RTL. Tout d'abord, à l'origine du drame, on semble trouver un refus d'obtempérer.
Les refus d’obtempérer semblent en progression en France, mais est-ce vrai ? Les dernières données disponibles remontent à 2019. Cette année-là, on enregistrait 24.000 refus d'obtempérer... soit un toutes les 30 minutes. C'est d'ailleurs cette statistique que Jean Castex a utilisée l'an dernier pour durcir les sanctions : doublement de la peine donc désormais 2 ans de prison, une amende doublée, elle aussi, à 15.000 euros, suspension automatique du permis de conduire, confiscation du véhicule pour ceux qui roulent sans permis et toujours un retrait de 6 points. En cas de mise en danger de la vie d'autrui, les peines sont aggravées : 5 ans de prison, 75.000 euros d'amende et 5 ans sans permis. Selon le ressenti des différents policiers et gendarmes à qui RTL a posé la question, à défaut de chiffres plus précis, cette tendance est plutôt stable.
Cela parait énorme mais il faut le pondérer et savoir que ça ne veut pas dire qu'à chaque fois la vie d'un policier ou d'un gendarme est en jeu... Un refus d'obtempérer, c'est le fait de ne pas s'arrêter quand un représentant des forces de l'ordre l'exige. Les cas de figures peuvent être multiples et parfois tragiques. Pour l'année 2019, 3 policiers et gendarmes sont morts suite à un refus d'obtempérer et il y a eu plus de 200 gendarmes blessés.
Les policiers parlent de "légitime défense" pour répondre à une "agression". Quand peut-on réellement invoquer la légitime défense ? Pour définir la légitime défense, il y a deux critères : il faut que la réponse soit absolument nécessaire et strictement proportionnée. En clair : que l'usage de l'arme à feu soit la seule réponse possible et qu'elle soit utilisée avec parcimonie. Ensuite, le code de la sécurité intérieure prévoit les conditions dans lesquelles un policier peut utiliser son arme dans son article L435-1. Plusieurs cas de figure sont envisagés : lorsqu'une vie est menacée, lorsque la fuite peut engendrer des décès, et évidemment, lorsqu'une voiture est impliquée, puisque, une voiture est considérée comme une arme par destination...
Après, c'est à l'IGPN et aux magistrats de déterminer si l'intervention de la police est conforme aux règles. Par exemple, pour les tirs du Pont-Neuf où deux hommes ont été tués fin avril, le juge d'instruction a estimé qu'il y avait des doutes quant à cet état de légitime défense. C'est pour cela que le fonctionnaire a été mis en examen pour homicide volontaire.
L’affaire devient politique. Dans des tweets publiés ce week-end, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une "police qui tue". Le leader des Insoumis a aussi qualifié aussi le syndicat Alliance de "groupe factieux". Ce dernier a annoncé qu'il déposerait plainte contre Jean-Luc Mélenchon... La deuxième plainte en un mois puisque le même syndicat avait déjà annoncé qu'il le poursuivrait lorsqu'il a déclaré qu'Alliance réclamait "le pouvoir de tirer sur les gens" après le drame du Pont-Neuf. Mais tous les syndicats de policiers ne réagissent pas de la même manière. Unité-SGP, par exemple, a décidé de ne pas prendre position publiquement dans ce débat autour de la légitime défense, pour ne pas nuire à leur collègue mis en examen.
"Les policiers, les gendarmes méritent le respect. Ils font un travail courageux, difficile et risquent leur vie à chaque instant. Les insulter déshonore ceux qui veulent gouverner. Laissons les enquêtes se faire sans les utiliser comme des otages d'une campagne électorale", a répondu à Jean-Luc Mélenchon, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.
Marine Le Pen a de son côté dénoncé les mots "d'une gravité inouïe" de Jean-Luc Mélenchon. "Il fait donc le choix du déshonneur en rompant définitivement avec les valeurs de la République française", a ajouté la cheffe de file du Rassemblement national. Ce mardi 7 juin, Jean-Luc Mélenchon a tenu à clarifier sa pensée en expliquant qu'il n'était