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DÉBAT - Le refus d'obtempérer est-il un nouveau fléau français ?

Les experts de la rédaction de RTL reviennent sur cette opération de police qui a mené à la mort d'une femme à Paris et est devenue l'un des événements marquants de ce débat des législatives.

Les secours et la police dans le XVIIIe arrondissement de Paris
Crédit : STAFF / AFP
Le refus d'obtempérer est-il un nouveau fléau français ?
00:06:15
Le refus d'obtempérer est-il un nouveau fléau français ?
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Aymeric Parthonnaud
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Le contrôle lors duquel un conducteur a été grièvement blessé et une passagère tuée par des tirs policiers samedi à Paris est en train de devenir un événement politique à quelques jours du premier tour des élections législatives. Les faits se sont déroulés le 4 juin 2022 en fin de matinée à Paris, lorsque des fonctionnaires à VTT ont voulu contrôler "une voiture avec quatre passagers dont l'un ne portait pas sa ceinture de sécurité", a relaté une source policière. 

Alors qu'ils s'en approchaient, la voiture a pris la fuite. Un peu plus loin, tandis que les policiers tentaient à nouveau de le contrôler, le conducteur a démarré et "foncé" sur les policiers qui, selon la police, ont fait usage de leurs armes et blessé gravement "le conducteur et le passager". Les deux passagers arrière n'ont pas été atteints. Une version contestée par un témoin proche du conducteur au micro de RTL. Il y a un mois et demi, un policier a été mis en examen pour "homicide volontaire", soupçonné d'avoir tué dans la nuit du 24 au 25 avril avec une arme automatique le conducteur et un passager d'une voiture qui aurait forcé un contrôle sur le Pont-Neuf à Paris.

Afin de mieux comprendre les enjeux politiques autour de cette affaire, un point sur les chiffres et les notions juridiques en présence avec les experts de la rédaction de RTL. Tout d'abord, à l'origine du drame, on semble trouver un refus d'obtempérer. 

Quelles sanctions pour les contrevenants ?

Les refus d’obtempérer semblent en progression en France, mais est-ce vrai ? Les dernières données disponibles remontent à 2019. Cette année-là, on enregistrait 24.000 refus d'obtempérer... soit un toutes les 30 minutes. C'est d'ailleurs cette statistique que Jean Castex a utilisée l'an dernier pour durcir les sanctions : doublement de la peine donc désormais 2 ans de prison, une amende doublée, elle aussi, à 15.000 euros, suspension automatique du permis de conduire, confiscation du véhicule pour ceux qui roulent sans permis et toujours un retrait de 6 points. En cas de mise en danger de la vie d'autrui, les peines sont aggravées : 5 ans de prison, 75.000 euros d'amende et 5 ans sans permis. Selon le ressenti des différents policiers et gendarmes à qui RTL a posé la question, à défaut de chiffres plus précis, cette tendance est plutôt stable.

Cela parait énorme mais il faut le pondérer et savoir que ça ne veut pas dire qu'à chaque fois la vie d'un policier ou d'un gendarme est en jeu... Un refus d'obtempérer, c'est le fait de ne pas s'arrêter quand un représentant des forces de l'ordre l'exige. Les cas de figures peuvent être multiples et parfois tragiques. Pour l'année 2019, 3 policiers et gendarmes sont morts suite à un refus d'obtempérer et il y a eu plus de 200 gendarmes blessés.

La question de la légitime défense

Les policiers parlent de "légitime défense" pour répondre à une "agression". Quand peut-on réellement invoquer la légitime défense ? Pour définir la légitime défense, il y a deux critères : il faut que la réponse soit absolument nécessaire et strictement proportionnée. En clair : que l'usage de l'arme à feu soit la seule réponse possible et qu'elle soit utilisée avec parcimonie. Ensuite, le code de la sécurité intérieure prévoit les conditions dans lesquelles un policier peut utiliser son arme dans son article L435-1. Plusieurs cas de figure sont envisagés : lorsqu'une vie est menacée, lorsque la fuite peut engendrer des décès, et évidemment, lorsqu'une voiture est impliquée, puisque, une voiture est considérée comme une arme par destination... 

Après, c'est à l'IGPN et aux magistrats de déterminer si l'intervention de la police est conforme aux règles. Par exemple, pour les tirs du Pont-Neuf où deux hommes ont été tués fin avril, le juge d'instruction a estimé qu'il y avait des doutes quant à cet état de légitime défense. C'est pour cela que le fonctionnaire a été mis en examen pour homicide volontaire.

Duel politique

L’affaire devient politique. Dans des tweets publiés ce week-end, Jean-Luc Mélenchon a dénoncé une "police qui tue". Le leader des Insoumis a aussi qualifié aussi le syndicat Alliance de "groupe factieux". Ce dernier a annoncé qu'il déposerait plainte contre Jean-Luc Mélenchon... La deuxième plainte en un mois puisque le même syndicat avait déjà annoncé qu'il le poursuivrait lorsqu'il a déclaré qu'Alliance réclamait "le pouvoir de tirer sur les gens" après le drame du Pont-Neuf. Mais tous les syndicats de policiers ne réagissent pas de la même manière. Unité-SGP, par exemple, a décidé de ne pas prendre position publiquement dans ce débat autour de la légitime défense, pour ne pas nuire à leur collègue mis en examen.

"Les policiers, les gendarmes méritent le respect. Ils font un travail courageux, difficile et risquent leur vie à chaque instant. Les insulter déshonore ceux qui veulent gouverner. Laissons les enquêtes se faire sans les utiliser comme des otages d'une campagne électorale", a répondu à Jean-Luc Mélenchon, le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.

Marine Le Pen a de son côté dénoncé les mots "d'une gravité inouïe" de Jean-Luc Mélenchon. "Il fait donc le choix du déshonneur en rompant définitivement avec les valeurs de la République française", a ajouté la cheffe de file du Rassemblement national. Ce mardi 7 juin, Jean-Luc Mélenchon a tenu à clarifier sa pensée en expliquant qu'il n'était en rien "anti-flics" mais qu'il voulait combattre les usages disproportionnés de la violence. 

L'enquête se poursuit

Du côté de l'enquête, la garde à vue entamée dimanche dans les locaux de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) des trois policiers, deux hommes et une femme qui auraient tiré sur le véhicule, a été prolongée lundi 6 juin, selon le parquet de Paris. Ils sont entendus pour "violences ayant entraîné une ITT (interruption totale de travail) de plus de 8 jours avec arme par personne dépositaire de l'autorité publique" et "violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner par personne dépositaire de l'autorité publique". 

La garde à vue a été décidée "en raison de la gravité des conséquences des tirs réalisés et afin de vérifier les conditions d'usages de leurs armes par les intéressés", selon le parquet. La passagère avant, née en 2001 selon une source proche du dossier, touchée par balle à la tête, est décédée dimanche. "La garde à vue se poursuit pour analyser l'ensemble des éléments et comprendre l'enchaînement de ces faits dramatiques", a déclaré auprès de l'AFP l'avocat des policiers, Me Laurent-Franck Liénard. "Pour mes clients, cette mesure de garde à vue est particulièrement éprouvante mais ils en acceptent le principe et collaborent pleinement aux investigations".

Le conducteur soupçonné d'avoir refusé d'obtempérer a lui été très brièvement placé lundi en garde à vue pour "tentative d'homicide sur personne dépositaire de l'autorité publique", selon le parquet. Sa garde à vue à l'hôpital en début d'après-midi a été levée peu de temps après, l'homme de 38 ans, grièvement blessé au thorax par des tirs policiers, n'étant pas en état d'être entendu à ce stade.

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