"C'est du cinéma" : à la prison de la Santé, des détenus sceptiques face aux fouilles XXL des cellules

Le ministre de la Justice fait le bilan de l'opération "fouilles XXL". Menée "dans l'ensemble des maisons d'arrêt de France", la campagne de fouilles lancée fin novembre a permis "la saisie de 1.789 téléphones portables, 2.558 objets dangereux et 13 kilogrammes de drogues", a détaillé Gérald Darmanin sur X, mardi 30 décembre. Le garde des Sceaux Gérald Darmanin entend que ces fouilles deviennent "plus systématiques". Il a annoncé qu'il prendrait en janvier "une instruction" en ce sens. 
 
Cette opération avait été lancée dans l'objectif affiché de notamment lutter contre le narcotrafic, certains continuant leur activité en milieu carcéral grâce aux téléphones introduits clandestinement et massivement en détention. Toutes les maisons d'arrêts de France sont concernées, c'est à dire les prisons où sont incarcérés les prévenus, ceux qui attendent d'être jugés, et les condamnés à de courtes peines. 

Des fouilles sectorielles, d'ampleur, ont été réalisées dans chacun de ces établissements. Le but affiché : renforcer l'étanchéité de ces maisons d'arrêt, avec en parallèle un vaste plan de sécurisation à 29 millions d'euros, appelé "zéro portable en prison".

Portables et cannabis

À la prison de la Santé, une fouille XXL en date du 4 décembre a permis de saisir une trentaine de téléphones portables, du cannabis, et des armes artisanales ont été saisis. RTL a pu visiter les coursives de la maison d'arrêt, avec la sénatrice écologiste Anne Souyris, où une surveillante ouvre la porte d'une cellule du QH5. Un quartier qui compte 428 détenus, pour seulement 195 places. 

Derrière la porte, trois hommes, en jogging et claquettes chaussettes, se font cuire des steaks, avec la télévision allumée. Pour ces trois détenus, cette fouille XXL a le mérite d'être dissuasive. "Il y a moins de téléphones", confirme l'un deux, reconnaissant néanmoins qu'il y avait déjà des fouilles avant l'opération de Gérald Darmanin.

Un peu plus loin, la surveillante qui nous accompagne ouvre une cellule au hasard, à la demande de la sénatrice. Les deux détenus qui l'occupent s'empressent d'ouvrir la fenêtre, pour chasser une odeur tenace,  de cannabis. Hors micro, ces prisonniers se montrent plus sceptiques sur l'efficacité de ces fouilles.

"C'est le club Med"

Les objets illicites continuent d'entrer à l'intérieur de la maison d'arrêt, via notamment les projections de colis par-dessus les murs d'enceinte. Par la fenêtre de son bureau, un surveillant nous montre un de ces colis, atterri dans les barbelés. "Il y a un colis qui est arrivé", dit-il, sans savoir encore ce qui se trouve à l'intérieur.  

Lorsque les détenus sont pris avec un téléphone, ils peuvent être placés au quartier disciplinaire. On passe sous un portique de détection, pour y accéder. Assis sur son lit dans ce qui ressemble à une cage, une pièce totalement grillagée, un détenu est plongé dans la lecture d'un livre. Pour lui, malgré la fouille XXL, la prison de la Santé reste une passoire.

"C'est du cinéma. En rien, ça mettra fin au trafic de stupéfiants et de téléphone", comparant la maison d'arrêt au "club Med". "Si j'avais l'argent, je suis sûr que je pourrais boire du champagne tous les soirs", insiste-t-il. "Ce que fait Gérald Darmanin, c'est courageux, mais la fouille XXL (...) à part deux-trois téléphones, sert à rien." Pour ce détenu, il serait plus efficace de sécuriser l'ensemble de la prison.

Manque de personnel

Dans la foulée des fouilles XXL, Gérald Darmanin a lancé le plan de sécurisation "zéro portable en prison". Une expérimentation a été menée dans six établissements pénitentiaires  dont la prison de la Santé à Paris.

Parmi les mesures phares, des filets anti-projection, qui recouvriront les sept cours de promenades de ce site classé. Ici, surveillants et détenus se retrouvent sur un même constat : le manque de personnel. Dans ce quartier de la prison, les 428 détenus sont surveillés par neuf agents, à chaque service.

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