Affaire Yvette Brisset : le mystère du dernier visiteur de la chambre 420

Lundi 13 mai 2019, 20h40, les policiers du commissariat de Tours sont appelés pour le décès d'une pensionnaire, à l'Ehpad Les Amarantes. Il y a un problème. Pour le médecin, la mort est douteuse. Le docteur vient d’ailleurs d’émettre un obstacle médico-légal qui suspend l’inhumation de la défunte. Yvette Brisset, 92 ans, a été retrouvée sans vie dans sa chambre, la 420, aux alentours de 19h00. C'est une agente hospitalière qui a fait la découverte. 

Le corps d'Yvette Brisset est transporté à l'Institut médicolégal de Tours. Le scanner détecte un "corps étranger" dans la gorge de la victime, juste au-dessus des cordes vocales. Il s'agit d'un morceau de madeleine bloqué dans la trachée. Le légiste évoque une mort par asphyxie mécanique. Il remarque aussi que le cou de la malheureuse a été saisi au niveau des cervicales, assez vivement au point de provoquer une petite hémorragie.

Trois jours après le décès suspect d'Yvette Brisset, les enquêteurs enchaînent les auditions des employés de l'Ehpad. Elle aurait reçu une visite tardive. Celle d'un homme âgé d'environ quarante ou quarante-cinq ans, autour d'un mètre soixante-quinze, cheveux courts foncés, crâne dégarni. Le nom de cet individu ne figure pas sur le registre des visiteurs. Il s'est présenté à l'étage en demandant si le repas du soir avait été servi. 

Le mobile du viager

La défunte possédait un petit patrimoine immobilier. Un appartement inoccupé à Tours et une maison à 25 kilomètres, dans le village de Montbazon. Un bien en viager pour lequel un homme, Alain Jousselin, versait 558 euros de rente mensuelle. Deux semaines après la mort d’Yvette Brisset, Alain Jousselin, 60 ans, est entendu par les enquêteurs. Il confirme être le mystérieux visiteur de la vieille dame. Il lui a bien rendu visite le 13 mai au soir. 

Au soir du 13 mai, il s’est rendu à l’Ehpad à moto pour récupérer des clés oubliés dans la chambre. Il a donné une madeleine à Yvette. Elle a émietté elle-même le gâteau. Selon lui, elle se débrouillait. Il est ensuite sorti dans le couloir pendant que la pensionnaire continuait à manger ses madeleines. Quand il l’a retrouvée, elle avait des miettes sur le cou. Il n’a pas remarqué qu’elle avait les yeux grand ouverts, ou encore la bouche béante remplie de biscuit. Il pensait qu'elle dormait. 

Jeudi 23 mai, Alain Jousselin est mis en examen pour l’assassinat d’Yvette Brisset. Il dément en bloc. Le juge estime qu’il a voulu précipiter la mort de la victime pour en finir avec ce viager. Le sexagénaire est placé en détention provisoire. "Ce qui l'a desservi c’est qu'il était pompier et on se dit comment un pompier peut donner une madeleine à quelqu'un qui a du mal à déglutir", indique Christian Panvert, correspondant RTL à Tours et dans la région Centre.

Un verdict couleur grise

Un an et demi après la mort d’Yvette Brisset, le juge d’instruction de Tours entend pour la dernière fois le suspect Alain Jousselin. Lors des interrogatoires, le suspect a changé dans ses explications. Au final, il reconnaît qu’il amenait fréquemment des pâtisseries à la vielle dame. Selon lui, elle les mangeait sans aucune difficulté, et personne à l’Ehpad ne l’avait jamais mis en garde contre cette pratique. 

Mercredi 11 mai 2022, Alain Jousselin, 63 ans, fait face à la cour d’assises d’Indre-et-Loire, à Tours. Interrogé pendant près de quatre heures, l’accusé continue à clamer son innocence. Il est acquitté. En 2023, le prévenu comparaît en appel. Il est à nouveau acquitté pour l'assassinat d'Yvette Brisset mais condamné à trois ans de prison pour homicide involontaire. 

Le verdict n'est ni blanc ni noir. La partie civile le considère comme "un peu surprenant". "S'il avait été acquitté totalement, nous aurions pu solliciter l'indemnisation des ses trois années de détention provisoire", explique Me Abed Bendjador, avocat d'Alain Jousselin, dans L'Heure du Crime, sur RTL.

Les invités de "L'Heure du Crime"

- Christian Panvert, correspondant RTL à Tours et dans la région Centre.
- Me Abed Bendjador, avocat au barreau de Tours. Avocat d'Alain Jousselin.

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