Affaire Sylvie Bâton : Ulrich Muenstermann prenait "plaisir à faire souffrir les autres"

Il a fallu 18 ans pour identifier et arrêter l'homme qui, une nuit de printemps 1989, dans l'Yonne, avait violé et tué Sylvie Bâton. Une éternité pour la famille de cette étudiante de 24 ans promise à un avenir souriant et un casse-tête pour les enquêteurs qui ont fini par croiser la route d'un culturiste allemand qui se prenait pour Arnold Schwarzenegger.

Le vendredi 5 mai 1989, vers 19 heures, Danielle Bâton arrive dans le petit village de Sauvigny-le-Bois, tout près d'Avallon, dans l'Yonne. Elle a fait plus d'une heure de route depuis Saint-Loup-de-Varennes, en Saône-et-Loire, pour avoir des nouvelles de sa fille Sylvie.

Celle-ci doit assister le soir-même à un dîner familial mais elle n'a donné aucune nouvelle de la journée. Elle se rend alors, avec son beau-frère René, chez sa fille. La porte est légèrement entrouverte. René entre et ressort aussitôt, tétanisé. 

Danielle entre à son tour et voit sa fille nue dans la baignoire. "Pour moi, elle n'était pas morte. J'ai crié au secours puis je me suis assise à côté d'elle", racontera-t-elle.

Sylvie Bâton a été agressée avec beaucoup de violence

La police judiciaire d'Auxerre est à pied d'œuvre dans la maison du crime. Il n' y a pas de traces d'effraction sur les portes mais de toute évidence, Sylvie Bâton a été agressée avec beaucoup de violence. Elle a été violée, étranglée, et à nouveau violée, puis laissée à demi-immergée dans la baignoire. 

Un suspect incarcéré en Allemagne

Plusieurs suspects sont interrogés dans les jours et semaines qui suivent le meurtre. L'un d'entre eux, Armando Da Silva, va être inculpé pour viol et meurtre. Il va passer un an et demi en détention, mais la justice a fait fausse route. L'ADN qui l'avait désigné comme coupable va finalement le disculper et aiguiller l'enquête vers d'autres pistes. Il faudra attendre 2006 et un nouveau juge d'instruction, Charles Prats, pour qu'une nouvelle piste fiable soit étudiée.

Le juge d'instruction constate sur compte-rendu que de petites traces ADN, du sperme, avaient été retrouvées sur une couverture saisie chez l'étudiante. Mais celles-ci n'ont jamais été analysées. L'ADN, une fois analysé, est inconnu. Il fait alors une demande de vérification sur les dossiers internationaux à Interpol. L'ADN appartient à Ulrich Muenstermann, 49 ans, Allemand, ancien réparateur de télévision désormais en prison. Il a été condamné en Allemagne à la perpétuité pour le viol et le meurtre en juillet 1983 de Karen Oehme, 25 ans, la fille du patron du pétrolier Esso en Allemagne.

Muenstermann n'a été identifié qu'en 2002 dans cette affaire. Toutes ces années, ce culturiste blond de 1,80 mètre et 120 kilos, admirateur d'Arnold Schwarzenneger, avait sillonné l'Europe en camping-car. Remis aux autorités françaises en 2007, il nie les accusations. Il finit par reconnaître qu'il était dans le secteur d'Auxerre à l'époque des faits et qu'il a eu une relation sexuelle avec une jeune femme parfaitement consentante dans son camping-car. 

On ne peut rien attendre d'individus qui prennent plaisir à faire souffrir les autres

Barbara Moreau, amie de Sylvie Bâton et auteure d'une pièce de théâtre pour lui rendre hommage "Mon amie la chose"

Le 4 octobre 2011, le suspect est de retour en France, devant la Cour d'Assises de l'Yonne, où il continue de nier toute implication. Muenstermann s'en tient à une seule et même explication. Son ADN a été transporté par Sylvie Bâton en personne. L'expert psychiatre évoque toutefois un prédateur, un sadique sexuel, un homme qui jouit de l'excitation tirée de la peur de la victime. Il est condamnée à la prison à perpétuité, peine assortie d'une période de sûreté de 22 ans.

Pendant son procès, Muenstermann était "complètement impassible, pas concerné, décrit Barbara Moreau, amie de Sylvie Bâton au lycée. Généralement, "les familles attendent des réponses", poursuit-elle, mais "je crois que celle de Sylvie ne s'attendait à rien de sa part et moi non plus. On ne peut rien attendre d'individus qui prennent plaisir à faire souffrir les autres. On n'est pas sur la même planète".

Ulrich Muenstermann, désormais âgé de 65 ans, condamné définitivement à la perpétuité en France et en Allemagne, purge sa peine dans son pays. Après le procès en appel, la mère de Sylvie Bâton s'était dite soulagée et apaisée par cette condamnation...

"Deux fois la même peine, nous sommes satisfaits", indiquait-elle. Le 16 mai 2023, une stèle doit être érigée dans le lycée Jacques Amyot d'Auxerre, le lycée où Sylvie Bâton avait fait ses études. Un monument destiné à rendre hommage à toutes les femmes victimes de violences.

Les invités de "L'Heure du Crime"

- Charles Prats, dernier juge d’instruction de l’affaire
- Barbara Moreau, amie de Sylvie Bâton et auteure d'une pièce de théâtre pour lui rendre hommage Mon amie la chose

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