Le lundi 3 juillet 2000 au matin, Louise Phillips, ressortissante britannique de 21 ans, franchit la porte d'un commissariat de Tokyo. Elle vient signaler la disparition depuis deux jours de sa meilleure amie, Lucie Blackman, également âgée de 21 ans.
Louise Phillips est mal
à l'aise en faisant cette déclaration. Elle se garde bien de dire que sa copine
disparue, et elle-même, sont hôtesses dans des clubs de nuit. Les
deux Anglaises n'ont pas de visa de travail, juste des visas touristiques de 90
jours, comme la grande majorité des étrangères qui travaillent dans ce
qu'on appelle ici le "commerce de l'eau". Cette terminologie cache en réalité toutes les activités du monde de la nuit.
La police japonaise ne s'inquiète
pas outre mesure de cette absence. Les autorités remplissent toutefois une fiche de
renseignements. Lucie Blackman, Britannique, domiciliée à Sevenoaks, dans le
Kent en Angleterre, fille de Tim et Jane Blackman, respectivement promoteur
immobilier et réflexologue.
Dans l'après-midi, Louise Phillips se rend à l'Ambassade de grande Bretagne. Cette fois, elle ne cherche pas à travestir la vérité. Elle indique que Lucie, arrivée début mai au Japon, travaille au bar de nuit "Casablanca", au sixième étage d'un immeuble de Roppongi. Samedi, elle a accepté un rendez-vous en dehors de ses heures de service avec un de ses clients.
En quittant l'Ambassade, Louise reçoit
un coup de fil, un appel masqué. Un homme qui parle un mauvais anglais. Il
assure que Lucie Blackman va bien mais qu'elle ne rentrera pas avant au moins
une semaine. Il explique que Lucie a rejoint une nouvelle religion, un
groupe qui pourrait être une secte. Lucie ne peut pas lui parler car elle est
en cours avec les autres élèves…
La famille Blackman débarque
à Tokyo. Enlèvement monté par une secte religieuse ? Par un gang mafieux
de proxénète ? Geste d'un maniaque isolé ? La police n'a pas de piste
précise et l'enquête va prendre du temps à avancer. "C'est très difficile de faire reconnaitre votre cas lorsque vous êtes un étranger au japon", constate Richard Werly, journaliste pour Le Temps et ancien correspondant à Tokyo.
"Les juges japonais n'ont pas beaucoup de coopération internationale, le système judicaire japonais ne regarde pas du côté de l'occident, il est très hermétique", continue-t-il en direct à Jean-Alphonse Richard dans L'heure du Crime ce 9 février. Ce n'est que 7 mois plus tard que le corps de Lucie Blackman sera finalement retrouvé, démembré et enterré dans une grotte, en bord de mer...
- Richard Werly, journaliste pour Le Temps. Ancien
correspondant à Tokyo
- Richard Lloyd Parry, rédacteur en chef du "Times" en Asie. Il est auteur du livre « Dévorer les
ténèbres » aux éditions Sonatine.
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