Affaire Éric Borel : lycéen, tueur de masse fasciné par le IIIème Reich

Dimanche 24 septembre 1995, très tôt dans la matinée, les gendarmes sont appelés pour des corps retrouvés dans une maison du quartier des Aiguiers, sur les hauteurs de Solliès-Pont, à une quinzaine de kilomètres de Toulon. En rentrant chez lui, au petit matin le fils aîné a trouvé les portes fermées. Personne ne répondait. Il a pu entrer et a découvert un véritable carnage qui venait d’être commis.

Les gendarmes pénètrent dans la villa. Dans le vestibule, ils ouvrent une penderie. Un corps a été maladroitement caché sous un tas d'habits. C'est la mère de famille, Marie-Jeanne Parenti. Elle a reçu une balle entre les deux yeux. Un peu plus loin, derrière la porte de la cuisine, le père de famille, Yves Bichet, gît sur le carrelage. Il a été tué à la carabine. Puis sauvagement frappé avec un marteau pour le défigurer. Dans le salon, sous un drap, ils retrouvent le petit Jean-Yves Bichet, âgé de 11 ans et demi.

Il est 6 heures du matin. Jean-Luc Bichet, le fils aîné qui a découvert le drame, est perdu face aux gendarmes. Il est incapable de dire ce qui a pu se passer. Il déclare qu'une personne manque à l’appel dans la maison. Éric Borel, son demi-frère, 16 ans. Les gendarmes sont soudain alertés d’une agression par arme à feu, à Cuers, à une dizaine de kilomètres de Solliès-Pont. Un adolescent vient de se faire tirer dessus, devant chez lui. Alan Guillemette, 17 ans, a été touché à bout portant. 

Un exemplaire de "Mein Kampf" dans sa chambre

Deux heures plus tard, les gendarmes progressent avec prudence dans les rues de Cuers. Le tueur est introuvable. Ceux qui l’ont vu évoquent un jeune homme qui marche tranquillement, une carabine à la main. Les forces de l'ordre sont prévenues que l'inconnu se dirige vers le collège de la Ferrage. Il est alors cerné par la police. Le jeune homme se suicide d'une balle dans la tête. Il s'agit d’Éric Borel, élève du lycée Georges-Cisson à Toulon. Éric Borel est le garçon disparu de la maison de Solliès-Pont. Bilan de cette tuerie en pleine ville : 12 morts et 6 blessés graves.

Les gendarmes retournent dans la maison où Éric Borel a exterminé sa mère, son beau-père et un de ses demi-frères. Dans la chambre de l'adolescent passionné de récits militaires, des livres sur le Troisième Reich et sur les batailles menées par l'Allemagne. Un exemplaire de Mein Kampf d'Adolf Hitler. Par ailleurs, Éric avait appris à tirer avec la 22 long rifle de son beau-père. "Il a dû se prendre pour un soldat ou un stratège militaire", estime Pierre Cortes, ancien vice-procureur de la République de Toulon, dans L'Heure du Crime, sur RTL.

Quel déclic a pu faire basculer Éric Borel dans l'horreur extrême ? Aux gendarmes, ses camarades du lycée professionnel Georges-Cisson confient que depuis la rentrée, ce garçon effacé et solitaire avait changé du tout au tout. Mais en bien. Il semblait beaucoup mieux dans sa peau. À Solliès-Pont, des voisins se souviennent que, chaque matin, le lycéen et son beau-père quittaient ensemble la maison familiale. L'un pour se rendre en classe, l'autre pour aller à son travail. Ils n'échangeaient jamais un mot. Marie-Jeanne, sa mère, ne parlait jamais de son premier fils Éric.

"Un gamin violenté"

Lundi 16 octobre 1995, les gendarmes en ont terminé avec l’audition de témoins. Pas de certitudes mais des indices confirment qu’Éric Borel prévoyait depuis quelque temps de tuer sa famille puis de se lancer dans une longue cavale. Il comptait certainement partir avec son meilleur ami, Alan Guillemette, lequel a renoncé à l'accompagner. Ce qui lui a coûté la vie. 

"Ce qui m’a intéressé dans cette affaire, c’est de sortir du cliché du gamin d’extrême droite, fasciné par le Troisième Reich, qui va sombrer dans la violence. C’est un gamin violenté, pas aimé, qui rêve de retourner à Limoges où il a grandi avec ses grands parents. Il va tout faire pour y arriver", explique Bruno Masi, journaliste et auteur du livre 8 kilomètres - Une enquête sur les terres rouges du Var, une enquête de trois ans sur ce drame. 

Le docteur Jean-Henri Rivolet, médecin légiste appelé à Cuers pour la tuerie, avait raconté que cette épreuve était sans doute la plus terrible de sa très longue carrière. Face à cette liste de victimes qui s’allongeait, il avait éprouvé un sentiment de terreur et de vertige. Un mystère persiste : quel était l'état mental d'Éric Borel ? "On ne saura jamais si ce garçon, s’il avait survécu en pleine possession de ses moyens, avait un problème psychologique ou psychiatrique", indique Pierre Cortes. 

Les invités de "L'Heure du Crime"

- Bruno Masi, journaliste et auteur du livre 8 kilomètres - Une enquête sur les terres rouges du Var publié aux éditions Jean-Claude Lattès. 
- Pierre Cortes, ancien vice-procureur de la République de Toulon.

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