Affaire André Kaas : pourquoi a-t-il été accusé à tort du meurtre de sa femme, Sylviane ?

Dimanche 5 avril 1992, André Kaas, 40 ans, et ses quatre enfants rentrent dans leur luxueuse propriété, près du village normand d'Anneville-Ambourville. Ils sont alors surpris de trouver le portail de la villa ouvert. Ils notent aussi que la voiture de Sylviane Kaas, la mère de famille pourtant restée à la maison, n'est pas là. C'est alors qu'en rentrant à l'intérieur du domicile, ils découvrent le corps sans vie de celle qui allait bientôt fêter ses 41 ans, une plaie à la tête et du sang à la poitrine. Elle a reçu trois balles de 22 Long Rifle. Les gendarmes penchent tout de suite pour un cambriolage. Des tableaux sans grande valeur et des bijoux ont été emportés. La voiture de la victime sera, de son côté, retrouvée dans la soirée, sur le parking d'une cité de Rouen.

Six mois après la mort de Sylviane Kaas, une rumeur court : le mari aurait-il quelque chose à voir avec le meurtre ? En tout cas, l’assurance-vie de Sylviane, et ses 600.000 euros, lui permet aussitôt de remettre à flot ses affaires alors qu’il était au bord de la ruine. L'homme est placé en garde à vue. Par ailleurs, les témoignages de deux dealers viennent enfoncer le clou : le premier dit avoir eu vent du meurtre d'une femme, commandité par un notable et maquillé en cambriolage, le deuxième livre le même scénario ainsi que les noms des deux hommes qui auraient fait le coup. Le trio est donc mis en examen et écroué à la prison Bonne-Nouvelle de Rouen.

Mardi 13 juin 1995, André Kaas, 44 ans, est libéré. Les confrontations avec ses principaux accusateurs ont tourné à son avantage. Le premier dealeur qui l'avait dénoncé a indiqué qu'il avait raconté n'importe quoi pour obtenir un traitement de faveur après son arrestation, le second explique avoir dit ce que voulaient entendre les policiers. André Kaas est donc convaincu qu’on va le laisser tranquille, mais le parquet de Rouen fait appel.

La piste du marchand de lithographies à creuser

"Dans cette affaire, il n'y a pas d'acharnement judiciaire, mais simplement un manque d'imagination : il reste des pistes jamais explorées", avance Me Patrick Ben Bouali, l'un des avocats du mari. D'ailleurs comment aurait-il pu organiser à l'avance son assassinat alors qu’elle n’aurait jamais dû être à la maison ?

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Et puis, il y a ces interrogations autour du chien de garde de la maison. "Si quelqu'un rentrait en cassant un carreau, le chien l'aurait violemment mordu, directement. Mais quelqu'un est rentré avec la clé. C'est quelqu'un qui connaissait le chien. Dans cette maison, on le retrouve enfermé dans la pièce où les employés de maison le nourrissaient. Un chien ne mord pas la main qui le nourrit. Les vétérinaires ont vérifié s'il n'avait pas été drogué, et ce n'est pas le cas. Il fait 42 kg et il n'a mordu personne", indique André Kaas, mari de Sylviane Kaas. Et son avocat, Me Philippe Sarda d'ajouter :
 "Ce sont des questions qui se posaient déjà à l'époque sur lesquelles on n'a jamais eu de réponse parce qu'il n'y a jamais eu de recherche."

Mercredi 16 octobre 1996, André Kaas, 45 ans, quitte la prison. Il souhaite que soit rouverte la piste de Thierry D.S, un marchand de lithographies itinérant qui faisait du porte-à-porte. Au printemps 1992, quinze jours avant le meurtre de Sylviane Kaas, il s'est présenté à la maison d'Anneville-Ambourville posant tout un tas de questions sur la demeure, son fonctionnement, la présence des chiens... Les gendarmes, qui ont repris l'affaire après les policiers, s'interrogent sur le profil de cet homme qui a déjà agressé une femme. Le nouveau suspect est entendu par le juge d'instruction. On lui montre un portrait-robot dressé à l'époque du meurtre. Il a alors cette réflexion surprenante : "On dirait que c'est moi, on dirait que vous avez pris ma photographie". Malgré les doutes, le marchand de lithographies n'a pas été poursuivi.

Lundi 10 décembre 2007, l'ex-promoteur André Kaas s'est vu accorder 103.0000 euros de dommages et intérêts pour avoir passé 1.041 jours en détention provisoire pour rien. Son innocence avait été reconnue avant même un procès aux assises. En 2024, ses avocats ont demandé de nouvelles investigations à propos de nouveaux éléments transmis par leur client.

Les invités de "L'Heure du crime"

- André Kaas, mari de Sylviane Kaas.
- Me Philippe Sarda, avocat au barreau de Paris, avocat des enfants de Sylviane et André Kaas.