Iwao Hakamata (souvent appelé par erreur Hakamada) n'est pas seulement un nom dans les annales judiciaires du Japon : c'est celui d'un homme qui a passé plus de la moitié de sa vie sous la menace d'une exécution. Ancien boxeur devenu ouvrier dans une usine de miso, il est accusé d'avoir tué son employeur et la famille de celui-ci en 1966. La maison de ses employeurs avait été incendiée après les meurtres, et Hakamata avait été rapidement arrêté. Il avait alors avoué être l'auteur de ces meurtres après avoir subi des interrogatoires brutaux pendant des semaines, mais il s'était ensuite rétracté. Deux ans plus tard, en 1968, il a été condamné à mort.
Cependant, en 2014, après des décennies passées derrière les barreaux, des tests ADN ont révélé que les preuves majeures qui l'avaient condamné ne correspondaient pas à son profil génétique. Libéré après 46 ans d'attente dans le couloir de la mort, Hakamata reste pourtant dans une situation judiciaire incertaine. Le parquet japonais a fait appel, contestant la validité des tests ADN, et en 2018, une cour a annulé sa libération, bien que Hakamata n'ait pas été renvoyé en prison.
Le point culminant de cette bataille judiciaire a eu lieu en octobre 2023, lors d'un procès en révision très attendu. Malgré les doutes émis par les experts et les irrégularités évidentes relevées dans l'enquête initiale, les procureurs ont une nouvelle fois requis la peine de mort, insistant sur la culpabilité de l'accusé "au-delà de tout doute raisonnable". Le verdict qui a été rendu ce jeudi est crucial : Hakamata a enfin été acquitté par le Tribunal de Shizuoka lors de son procès en révision. Il reste cependant deux semaines à attendre pour que ce jugement soit définitif, car les procureurs peuvent encore faire appel.
Le cas d'Iwao Hakamata a suscité l'attention internationale, mettant en lumière le système judiciaire japonais, où les interrogatoires sont souvent longs et menés sans la présence d'avocats, et où les aveux obtenus sous la contrainte jouent un rôle central dans les condamnations. Selon le quotidien Asahi Shinbun, les interrogatoires d'Hakamata avaient duré près de 430 heures, dont une partie a été enregistrée. Ces enregistrements révèlent que, pendant certaines séances, seule la voix des enquêteurs est audible, suggérant une pression importante exercée sur l'accusé.
La libération de Hakamata en 2014 avait initialement été perçue comme une avancée dans la reconnaissance des droits des accusés au Japon. Mais la décision de rouvrir l'affaire, malgré les doutes sérieux sur la validité des preuves, relance les débats sur l'équité des procès et la place des droits de la défense.
Le Japon fait figure d'exception parmi les pays industrialisés en maintenant la peine de mort. Aux côtés des États-Unis, il est l'un des deux seuls membres du G7 à pratiquer encore les exécutions capitales. Selon les sondages, la population japonaise reste largement favorable au maintien de la peine capitale, une position que les dirigeants politiques n'ont jamais remise en question.
En décembre dernier, plus de 100 personnes étaient encore sous le coup d'une condamnation à mort dans les prisons japonaises. Le sort des condamnés est souvent marqué par une grande incertitude, les dates des exécutions n'étant communiquées aux prisonniers que quelques heures à l'avance, ce qui amplifie l'angoisse des détenus condamnés.
Le cas d'Iwao Hakamata, en plus de poser des questions sur la peine de mort, a soulevé des inquiétudes quant à la justesse des procès au Japon, où des erreurs judiciaires peuvent mener des innocents à attendre des décennies, sans certitude, leur exécution.
Le verdict attendu ce 26 septembre 2024 ne concerne pas seulement l'avenir d'Iwao Hakamata, mais aussi l'image du système judiciaire japonais. Son innocence, enfin prononcée par la justice japonaise, représente une victoire historique pour la défense des droits humains dans le pays.
Quoi qu'il en soit, Iwao Hakamata aura passé 88 ans à se battre, soutenu en permanence par sa sœur Hideko, dont 46 sous la menace constante de la mort, dans un pays où la peine capitale reste profondément ancrée dans la société.
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