INVITÉ RTL - Inondations en Espagne : la France est-elle préparée pour ce genre de scénario ?

La région de Valence, en Espagne, a été balayée par les pires inondations jamais vécues depuis près de 20 ans. Le dernier bilan fait état d'au moins 95 victimes et de dizaines de disparus. Routes bloquées, ponts brisés, torrents de boue… Certains villages sont totalement inaccessibles, le gouvernement espagnol a annoncé un deuil national de trois jours. 

"Ce qui me surprend surtout, c'est le bilan humain de la catastrophe, qui est exceptionnellement lourd pour une démocratie moderne. On a entendu ce qui n'a pas fonctionné en matière d'alerte précoce, en termes d'évacuation... Il y a malheureusement eu beaucoup de ratés qui auraient sans doute permis d'épargner pas mal de vies humaines", constate François Gemenne, chercheur spécialiste des questions de géopolitique de l'environnement et co-auteur de rapports du GIEC.

"Il faut tirer des leçons très importantes de ce qu'il vient de se passer à Valence à la fois en termes d'alerte des populations, d'évacuation des populations, mais également en termes de gestion de l'aménagement du territoire. Il y avait trop d'habitations en zone inondable, les sols étaient trop artificialisés. Ça veut dire qu'il faut d'urgence mettre en place des plans d'adaptation à la fois dans le court terme, dans le moyen et dans le long terme", alerte le chercheur.

Il va falloir réduire nos émissions mais il va falloir également nous adapter aux impacts du changement climatique

François Gemenne, chercheur spécialiste des questions de géopolitique de l'environnement

Se préparer à ce genre de catastrophe, "c'est un chantier gigantesque", prévient François Gemenne. "Il va falloir revoir énormément de choses en matière d'aménagement du territoire. On a construit énormément en zone inondable, les inondations et les activités économiques sont directement en danger. La question de l'artificialisation des sols se pose avec une acuité aigüe", énonce-t-il. 

Le Premier ministre Michel Barnier a présenté un plan national d'adaptation au changement climatique la semaine dernière. "C'est un pas dans la bonne direction", félicite le chercheur. "Ce plan était attendu depuis longtemps. (...) On voit bien l'urgence d'avoir ce type de plan d'adaptation. En France, on a pris conscience à l'été 2022 de notre propre vulnérabilité par rapport aux impacts du changement climatique. On s'est rendu compte que ces impacts, ce n'était pas forcément pour les autres, ni pour les pays lointains. Il est absolument urgent de réaliser que ces plans ne sont pas du tout des plans défaitistes ou un renoncement aux politiques de décarbonation de l'économie", ajoute-t-il.

"Aujourd'hui, il va falloir réduire nos émissions mais il va falloir également nous adapter aux impacts du changement climatique. Il ne s'agit plus de choisir, il va falloir faire l'un et l'autre", conclut François Gemenne.