Pourquoi la France néglige ses atouts scientifiques
ÉDITO - La France est le troisième pays le plus innovant du monde. Et pourtant, aucun candidat à la présidentielle n'a de projet pour valoriser notre exceptionnel capital scientifique.

L’essentiel du premier débat de la primaire de la gauche a porté jeudi 12 janvier sur l’économie. Beaucoup de propositions ont été mises sur la table. Mais comme lors de la primaire de la droite, il n'y a pas eu un mot pour valoriser et construire un projet autour de notre exceptionnel capital scientifique et d’innovation. C'est dommage, car deux grands classements internationaux nous positionnent au troisième rang mondial, derrière les États-Unis et le Japon, et loin devant tous nos voisins et amis européens en termes de créativités et de dépôts de brevets à dimension mondial.
Comme si, par exemple, les 3.398 brevets du Commissariat à l’énergie Atomique et énergies alternatives n'existait pas dans ce pays, alors que c'est l’institution publique de recherche la plus dynamique au monde devant la Californie. Le CNRS est juste derrière. Nous disposons du gisement le plus précieux, celui de la matière grise, et on continue de débattre de l’économie du XXe siècle.
Pourtant, nos atouts sont parfaitement identifiés : une situation géographique bénie des dieux, une démographie inaltérée, des formations de scientifiques et de financiers de classe mondiale dans des centre d’études publiques et privés qui sont parmi les tous meilleurs et dont la densité est exceptionnelle au niveau mondial. Nous disposons même d’un outil redoutable : le crédit impôt recherche, qui fait de la France un paradis fiscal de la recherche et du développement.
C'est bien de penser à taxer les robots. C'est bien aussi de réfléchir à les fabriquer en France
Christian Menanteau
Aujourd'hui, l’électronique au sens large et la santé monopolisent 50% de l’innovation. Une chance : ce sont deux secteurs où nous avons une tradition d’excellence. L’école française de mathématiques domine son domaine ; et nos sciences de la vie peuvent, à notre échelle, rivaliser avec les États-Unis. Les bases sont là. On peut même, sans prétention, penser que le potentiel français est l’un des rares qui puisse contrarier l’ambition de la Silicon Valley de mettre la main sur l’économie du futur. Celle de la connaissance, de l’intelligence artificielle et de la biotechnologie.
Pour passer à la vitesse supérieure, il nous manque une vision à long terme qui nous permettrait de séduire nos voisins européens pour qu’il nous épaulent. Il faudrait aussi une organisation économique et sociale nationale qui libère les talents et ces richesses souvent étouffés par nos rigidités bureaucratiques. Bref, il faudrait que nos responsables politiques s’emparent de ces dossiers sérieusement et pointent la barque vers ces terres promises. C'est bien de penser à taxer les robots. C'est bien aussi de réfléchir à les fabriquer en France.