Deux chiffres inquiètent particulièrement pour ce deuxième trimestre : les pertes nettes de la Société Générale, 1,26 milliard et de Natixis, filiale du groupe BPCE, qui regroupe Banque Populaire et Caisse d’Epargne. 57 millions d’euros de perte nette. Evidemment, que les banques soient dans le rouge, ce n’est jamais une bonne nouvelle. Et que ce soit pour la Société Générale, comme pour Natixis, ça secoue en interne.
Hier, en même temps que ces mauvais résultats, Natixis a annoncé se séparer de son Directeur Général. De son côté la Société Générale explique vouloir se restructurer, diminuer les coûts parce qu’entre une conjoncture économique floue, des taux de rendement très bas et les évolutions des modes de vie, les représentants le disent, il va falloir s’adapter.
Bon, mais une fois qu’on a dit ça, ces groupes bancaires restent quand même solides. Ils ne sont pas en danger de mort. D’ailleurs, un autre groupe la BNP Paribas qui a publié ses chiffres vendredi dernier, s’en est même plutôt bien sortie, avec des bénéfices en repli certes, mais toujours dans le vert.
Déjà, on a mis l’économie sous cloche, donc aussi une partie de l’activité bancaire, et forcément, c’est visible dans les comptes. Ce n’est pas irrémédiable. Ensuite, ces chiffres s’expliquent par la technique du hamster. Vous savez le petit rongeur qui stocke de la nourriture dans sa bouche. Et bien les banques ont fait pareil : elles se sont remplies les joues, avec des réserves d’argent en stock.
La Société Générale a multiplié ses provisions par 4, par rapport à l'an dernier. Un matelas financier, en attente, pour compenser les pertes si jamais des entreprises ou des clients se retrouvaient en faillite. Ça évidemment ça plombe les comptes, mais c’est aussi nécessaire. Et puis il y a un troisième élément, plutôt rassurant pour la suite, c’est que depuis la mi-mai, les activités repartent. Ce qui fait dire à un représentant du secteur qu’a priori, "le plus dur est derrière eux".
À l’heure actuelle il faut rester prudent. Évidemment, la santé des banques va aussi dépendre d’une éventuelle reprise de la Covid-19 et du choc pour l’économie. Mais ce qui est sûr, c’est que le contexte n’est pas le même. À l’époque, après 2008, c’est tout le château de cartes du système bancaire, qui s’effondrait, qui déferlait sur l’économie réelle. Les entreprises, les particuliers, en submergeant tout le monde.
Là aujourd’hui, c’est l’inverse. Ce sont les entreprises qui souffrent et qui s’accrochent aux banques, un peu comme à un phare dans la tempête. En demandant des emprunts avec ou sans garantie de l’État, en obtenant de étalements d’échéances pour les factures.
Alors oui, à l’avenir, les banquiers risquent d’être plus sélectifs, oui il va falloir insister pour qu’ils n’oublient pas les petites PME. Mais aujourd’hui la Fédération bancaire française le dit : ils sont en état d’absorber le choc, le réseau est solide et il devrait tenir.
À l’heure actuelle, oui : les dividendes sont gelés. Jusqu’au 1er janvier 2021 au moins. C’est la Banque Centrale Européenne (BCE) qui a pris cette décision. Ce qui n’empêche pas plusieurs banques françaises d’espérer, en cas de reprise, le déblocage d’une partie de ces dividendes. Celles-ci continuent d’envisager un petit pécule pour les actionnaires si la situation s’améliore.
Si la crise n’est pas la même qu’en 2008, c'est parce que les banques sont plus solides. La régulation européenne est passée par là, et heureusement. L’Autorité bancaire européenne a exigé des banques qu’elles gardent des réserves d’argent, un coussin de liquidité, pour ne jamais se retrouver à sec.
Figurez-vous que les lobbys bancaires ont bien tenté, juste avant la crise, de faire assouplir cette règle jugée trop contraignante. S’ils avaient obtenu gain de cause, tout le monde s’en mordrait les doigts aujourd’hui. Ces réserves-là, amassées, pas toujours de bon cœur, prouvent bel et bien leur utilité. Ce qui signifie deux choses, 1. les banques ont certes la capacité de s’en sortir et d’entrainer avec elle, l’économie dans un cercle vertueux, Mais 2, la condition c’est aussi que les États, que les régulateurs, continuent de les surveiller, d’y jeter un œil, et même un regard particulièrement vigilant.