Une expérience est actuellement menée dans la côte des Blancs, à Cramant, dans la Marne. Dans une parcelle de 14 ares de vignes, quatre cochons de la race néo-zélandaise Kune-Kune passent leurs journées groin vers le sol, tandis que les deux autres sont dans d'autres vignes, juste au-dessus. Ils mangent les mauvaises herbes, arrachent les racines, et retournent la terre sur quelques centimètres, sans trop la labourer.
"Ces animaux sont totalement adaptés à ce qu'on recherche puisqu'ils ne pèsent pas très lourd", explique Olivier Zébic, consultant viticole et ingénieur agronome à l'origine de l'expérimentation, "35 à 45 kilos, donc ils ne tassent pas les sols contrairement à des tracteurs, des enjambeurs. Et ils ne peuvent pas lever la tête et donc ne peuvent pas atteindre les grappes et les rameaux".
La morphologie des suidés leur permet de passer sous les fils de fer, et se promènent en toute liberté. Seule une clôture électrique les empêchent de sortir de la parcelle. Et des caméras suivent leur comportement.
Le résultat est bluffant. Le travail est beaucoup plus homogène qu'avec nos outils mécaniques.
Thomas Geoffrey, responsables des vignes du Champagne Bonnaire
Trois jours déjà que les animaux s'occupent de nettoyer la parcelle où ils resteront encore une petite semaine. Un abri a été installé pour leur permettre de se reposer. Un point d'eau est aussi à leur disposition. Le responsable de vignes du Champagne Bonnaire, où l'expérience est menée, n'a qu'à les nourrir un peu, le reste de l'alimentation étant constitué de ce que les Kune-Kune mangent sur la parcelle.
"Le résultat est bluffant", estime Thomas Geoffrey, "le travail est beaucoup plus homogène qu'avec nos outils mécaniques, beaucoup plus propre. Un passage à l'année, après les vendanges et avant que la nature repousse, et ce serait possible qu'il n'y ait plus d'herbe grâce aux cochons", explique-t-il, alors que deux passages croisés à l'enjambeur sont parfois indispensables pour un résultat loin d'être parfait.
Et la méthode semble particulièrement efficace, notamment pour les vignes très pentues, où l'utilisation des engins agricoles est encore moins probante. D'autant que les déjections des cochons se transforment en matière organique particulièrement bénéfique pour les sols. Mais l'intérêt est aussi et surtout économique.
"On limite tout ce qui est casse d'outils, casse de fournitures comme les piquets de vigne. Pas de consommation de carburant. Très satisfait, vraiment. Si on pouvait étendre ça à l'ensemble de notre vignoble, ça représenterait des économies astronomiques", prévoit Thomas Geoffrey, même si les engins mécaniques auront toujours une utilité, mais beaucoup moins fréquente.
Si l'opération actuelle est gratuite puisqu'il s'agit d'une expérimentation, les cochons Kune-Kune, possiblement élevés sous nos latitudes, pourraient à terme être loués, voire achetés. Mais ce sont des centaines de suidés que seraient nécessaires pour nettoyer des parcelles de plusieurs hectares, comme celles des grandes maisons de Champagne.
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