Que disent les candidats sur l'encadrement des gros salaires, et notamment ceux des patrons du CAC40 ? Cela fait suite à la polémique, mercredi 12 avril, concernant le salaire de Carlos Tavares qui dirige Stellantis, l'ex-PSA Peugeot Citroën : un peu plus de 19 millions sur l'année 2021. Parce que les ventes sont bonnes, la marge du groupe excellente, la fusion avec FIAT-Chrysler sur les rails.
Carlos Tavares a
rempli tous ses objectifs. Mais 19 millions quand on sait que le salaire moyen
d'un agent de production chez Peugeot, c'est 1.988 euros brut par mois. On va
faire simple, en 2021, Carlos Tavares a gagné 10.000 mois de salaire d'un agent
de production. C'est comme si cet ouvrier d'usine avait commencé à travailler en 1189 sous le règne de Richard Cœur de Lion.
Évidemment, la comparaison s'arrête-là. Mais c'est pour dire qu'évidemment il ne s'agit plus d'une réaction
objective, assise sur les performances exceptionnelles du patron. On est sur
du symbole.
D'ailleurs les
actionnaires n'ont pas validé la rémunération de Carlos Tavares en Assemblée
Générale, mardi. C'est une tendance
de plus en plus forte ces dernières années. Les actionnaires ne signent plus
les yeux fermés. Ils se révoltent contre ces rémunérations très importantes.
Mais le vote de mardi en Assemblée Générale n'est que consultatif. Carlos Tavares touchera son salaire.
Le vote n'est-il pas
contraignant ? En France, oui. Depuis la loi Sapin
2. C'est ce qu'on appelle le "say on pay". Mais pas aux Pays-Bas. Or, Stellantis, entreprise née de la fusion entre Peugeot, Citroën, Fiat et
Chrysler est une entreprise de droit hollandais.
Est-ce que Marine Le Pen ou Emmanuel Macron prévoient d'encadrer les salaires de ces grands patrons ? C'est assez peu présent dans les programmes alors que ça avait été un marqueur fort de la campagne de François Hollande.
Emmanuel Macron va faire plaisir aux écologistes et aux mélenchonistes qu'il cherche à séduire en ce moment car c'est lui le plus volontariste sur cette question. Il souhaite que les critères de performance qui donnent droit à ces bonus et à ces salaires importants soient indexés sur des performances environnementales ou sociales.
En gros, une politique de réduction chiffrée des émissions de CO2 ou une meilleure représentation des femmes dans l'entreprise (ce sont les critères ESG, extra-financiers). Quand ils sont atteints, on valide les bonus. L'idée est que ce soit un cercle vertueux où tout le monde y trouve son intérêt. Charité bien ordonnée, vous connaissez l'adage.
Marine Le Pen ne
s'attaque-t-elle pas au salaire des dirigeants de grands groupes ? Pas directement. Elle s'y attaque
par le biais d'une taxation des transactions financières et d'un Impôt sur la
Fortune Financière qui remplacera l'Impôt sur la Fortune Immobilière
d'Emmanuel Macron qui lui-même remplaçait l'Impôt sur la fortune.
L'Impôt sur la Fortune Financière
n'est pas très détaillé dans le programme de la candidate mais disons que
l'idée est de taxer les plus-values réalisées sur les marchés financiers. Elle
reprendrait la grille de l'ISF donc on peut supposer que vous êtes taxés à 0,5%
au delà de 800.000 euros de plus value annuelle.
Mais cela touche-t-il la
rémunération des patrons ? En effet. Parce que vous avez souvent une
grosse part variable dans ces rémunérations. Une part qui est sous forme de
stock-options, un paquet d'actions. Dans le cas de Carlos Tavares, vous avez deux millions de salaire fixe et tout le reste en part variable, bonus, actions :
89% de la rémunération.
Qui plus est, les dirigeants sont
souvent actionnaires de l'entreprise avec des titres préférentiels. Cela veut
dire qu'ils touchent aussi des dividendes. Cette année, les actionnaires du
CAC40 devraient se partager 58 milliards de dividendes. On a battu le précédent
record de 2019.
L'idée de
ruissellement d'Emmanuel Macron a-t-elle fonctionné ? C'était son espoir quand
il a supprimé l'ISF, mais l'effet serait inexistant à ce stade
selon France Stratégie, un organisme de l'État. L'argent des transactions
financières n'a pas été réinjecté dans les entreprises.
Mais, la fin de l'ISF plus la "Flat Tax" (pas plus de 30% d'impôts sur les revenus de la bourse
ou du capital) ont stoppé l'hémorragie d'exilés fiscaux, ce qui est
quand même un point positif pour nos finances publiques. Rappelons que les 2%
de Français les plus riches représente 40% des 77 milliards de la recette de
l'impôt sur le revenu. Il vaut mieux qu'ils soient chez nous.
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