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Violences policières : dans quel cas les policiers peuvent-ils user de la force ?

ÉCLAIRAGE - Après deux mois de rassemblements contre la loi Travail, la relation entre forces de l'ordre et manifestants a rarement été aussi tendue.

Des agents des forces de l'ordre munis de lanceurs de balles de défense (illustration)
Des agents des forces de l'ordre munis de lanceurs de balles de défense (illustration)
Crédit : SALOM-GOMIS/SIPA
Ana Boyrie

Depuis près de deux mois, la France est sujette à des mouvements sociaux marqués par l'opposition entre manifestants et forces de l'ordre. Des milliers de Français réclament le retrait intégral de la loi Travail, que Myriam El Khomri a défendu avec ferveur mardi 3 mai auprès de l'Assemblée nationale. L'orage gronde d'autant plus face à des violences policières qui semblent se répéter. 

Chaque rassemblement s'achève sur des débordements entre de jeunes "casseurs" et les forces de police. Les témoignages de dérapages se succèdent et envahissent les réseaux sociaux. Gaz lacrymogène, matraque, flashball... La liste des accusations s'allonge et le slogan "Tout le monde déteste la police" ne cesse de résonner lors des manifestations.

Les Français, entre peur et colère

Depuis les premières altercations entre les gardiens de la paix et la jeunesse française, Twitter s'est progressivement rempli de messages anti-police, symbolisés par le hashtag #ViolencesPolicières. La CGT s'est également positionnée, publiant une nouvelle affiche choc, montrant une colonne de CRS pataugeant dans une mare de sang. "Après les violences policières, voici maintenant officiellement la répression !", écrit le syndicat sur sa page Facebook

Noël Mamère rédige un édito dans Mediapart contre la politique du ministère de l'Intérieur à l'égard des manifestants et le maintien de l'état d'urgence depuis le 13 novembre. Il parle de "gouvernance irresponsable" et prédit un nouveau drame à la Malik Oussekine, une affaire de 1986, montrant l'incapacité de la police à distinguer les manifestants pacifiques de ces fameux casseurs. Une généralisation qui commence à être perçue et qui en inquiète plus d'un. Selon le député écologique, "les apprentis sorciers au pouvoir sont en train d'éduquer une génération à la violence". 

La riposte graduée, un usage proportionné de la force

Face à ces multiples rassemblements, la préfecture de police doit respecter une liste de consignes dans le but d'éviter les débordements. Le rassemblement du 1er mai n'a pas été une exception. Dans un télégramme rapporté par Ouest France, le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, a réclamé aux préfets, "d'exiger" des organisateurs de manifestations "qu'un service d'ordre interne structuré et identifiable soit mis en place". Un service d'ordre capable "d'isoler les fauteurs de troubles".

Le ministre donne également pour consigne "qu'il soit fait un usage proportionné et légitime de la force quand cela sera strictement nécessaire" et demande aux préfets de "rappeler aux forces les règles de déontologie qui s'imposent à elles". Ces consignes relèvent de la riposte graduée. La riposte policière doit être proportionnée à l'attaque

Quatre ripostes possibles selon la situation

Cet usage proportionné s'échelonne selon les différentes situations. Le maintien de l'ordre est donc complexe, le but étant de ne pas causer de blessés graves ou de décès parmi la foule mais aussi que les forces de l'ordre puissent se protéger elles-mêmes en cas de violence des manifestants. Selon le code de la sécurité intérieure, l'emploi de la force doit être obligatoirement précédé de sommations ("Obéissance à la loi, dispersez-vous"), excepté si des "violences ou voies de fait" sont exercées contre les forces de l'ordre. 

Le principe de gradation dans l'emploi de la force
Le principe de gradation dans l'emploi de la force
Crédit : Capture d'écran / Gendarmerie nationale

Le rapport parlementaire rendu en 2015 sur le maintien de l'ordre, par Pascal Popelin, établit dans ce cas quatre ripostes. Le recours à la seule force physique telle que la charge ou la formation de barrages. Elle peut être accompagnée de l'usage d'armes telles que les matraques, les boucliers, les bombes à poivre ou encore les lanceurs d'eau. Si cela ne suffit pas, après une nouvelle sommation, les grenades lacrymogènes instantanées peuvent être projetées. Enfin, seulement en cas "d'ouverture du feu sur les représentants de la force publique", les gendarmes et les CRS peuvent riposter au fusil de précision.

Des forces de l'ordre indignées qui se mobilisent

Les forces d'ordre essaient tant bien que mal de respecter ces consignes. Nicolas Comte, secrétaire adjoint du syndicat Unité police SGP FO, sur RMC évoque de son côté la colère des policiers. "Depuis des semaines, nos collègues sont harcelés nuit et jour" et portent "une responsabilité qui n'est pas la leur", estime le syndicaliste. Michel Cadot décèle quant à lui sur RTL, "une fatigue" chez ceux qui, depuis des mois, "assurent la protection des Français, dans un contexte de menace terroriste", selon Bernard Cazeneuve.

C'est désormais aux forces de l'ordre de se mobiliser. Le syndicat majoritaire des gardiens de la paix, Alliance, appelle les policiers ce mercredi 4 mai, à manifester le 18 mai prochain, pour dire "stop à la haine anti-flic". Le syndicat s'indigne de "cet acharnement irresponsable à vouloir faire croire que les policiers sont des brutes sauvages qui frappent aveuglément sur la jeunesse". 

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