Comme chaque année aux beaux jours, la petite île de Groix a fait face à un afflux touristique dès le mois de juin. Mais cette année, les conditions d'accueil étaient dégradées : la sécheresse qui a touché la Bretagne et la France a obligé le préfet du Morbihan à prendre des mesures de restriction à l'usage de l'eau. Placée "en crise sécheresse", l'île a grandement peiné à répondre aux besoins de ses habitants et touristes. Décision a alors été prise d'installer une unité temporaire de dessalement d’eau de mer, faute de pouvoir importer de l'eau du continent, lui aussi à sec.
Cette petite usine, qui tient dans quelques conteneurs, est équipée de membranes filtrantes, qui permettent de laisser passer les molécules d’eau tout en stoppant les ions qui composent le sel. "Environ 25 % de l'eau issue de la mer peut être extraite, le sel se retrouvant concentré dans les 75 % restant", explique l'Agglomération de Lorient. Cette usine permet ainsi de produire 20m3 d'eau douce par heure, soit 20 000 litres/heure. De quoi aider Groix à tenir la fin de l'été.
L'idée a alors fait des émules. Fin septembre, une unité mobile était installée à Pointe-à-Pitre après le passage de la tempête Fiona et mardi 11 octobre dans le port corse de Managgio, situé à Rogliano.
Sur le papier, l'idée est séduisante : l'eau de mer semble être une ressource intarissable à portée de main. Alors pourquoi ne pas s'en servir lorsque les châteaux d'eau sont à sec, les barrages proches de l'étiage et que plus rien ne coule du robinet ? Tout d'abord, parce que cette solution est très énergivore et donc peu économique. Elle ne peut dès lors pas être envisagée comme une solution à long terme, mais uniquement comme un soutien en cas de stress hydrique pour les communes françaises. Mais surtout, l'ONU alerte des risques de ces usines pour l'environnement.
Comme expliqué plus haut, les filtres de ces usines de dessalement permettent de récupérer 25 % d'eau "claire". Et les 75 % d'eau restante forment ce que l'on appelle une "saumure", à savoir de l'eau chaude très concentrée en sel et autres minéraux, qui est rejetée directement dans la mer, parfois sans dilution ou traitement. Et cela pourrait avoir "de profondes répercussions sur les organismes vivant au fond des eaux (pouvant) se traduire par des effets écologiques observables tout au long de la chaîne alimentaire", s'inquiètent des chercheurs de l’Université des Nations unies, dans une étude. Ils alertent également sur le risque d'une salinisation progressive des terres.
Car, si ces petites usines peuvent sembler être une goutte d'eau dans l'océan, elles sont très courantes dans certains pays arides, notamment du Moyen-Orient. Au niveau mondial, ce sont ainsi 142 millions de mètres cubes de saumure qui sont rejetés chaque jour par les usines de dessalement. Dès lors, l'ONU milite pour un meilleur traitement de ces déchets, mais se veut plutôt optimiste : "Avec l'amélioration constante de la technologie et l'amélioration de l'accessibilité économique, nous entrevoyons des perspectives positives et prometteuses". Ces usines peuvent donc être une vraie solution pour le futur, à condition que ses fabricants investissent dans la recherche et le développement.
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