Nucléaire : quel avenir en France ? La réponse de Jean-Marc Jancovici
Jean-Marc Jancovici se penche sur la question du nucléaire en France, maintenant que le sujet dépend du ministère de l'Économie.
On a appris la disparition du ministère de la Transition énergétique au profit de Bercy. Le ministère de l'Économie récupère l'énergie et donc le nucléaire. Il y a au moins un débat qui a été tranché, qui est celui de construire des réacteurs nucléaires, ce qui recueille aujourd'hui l'assentiment d'une majorité de Français.
Ça ne veut pas dire que toutes les grandes questions sont derrière nous. D'abord, dans le fait de construire des réacteurs, il y a un défi industriel. C'est ce qui peut expliquer que ce sujet soit passé de la transition énergétique à l'industrie.
Mais pour exécuter ce plan, il faut avoir les moyens industriels. On sait aujourd'hui qu'EDF, et plus largement la filière nucléaire, cherche à embaucher plein de monde. Il n'y a pas que chez les opérateurs du nucléaire en direct qu'il va y avoir besoin d'emplois, mais aussi dans toute la filière industrielle qui approvisionne ce secteur pour faire des pompes, des vannes, des tuyaux...
De ce point de vue, la France est plutôt moins forte qu'elle ne l'était au moment où on a fait la génération actuelle de réacteurs. Il y avait une base industrielle qui était beaucoup plus forte et sur laquelle on pouvait capitaliser, notamment pour construire des réacteurs en quelques années chacun et pour des coûts qui n'ont pas été astronomiques.
Il y a un deuxième sujet qui est quelque part encore plus important : qu'est-ce que c'est que le nucléaire durable ? Malheureusement, le nucléaire durable, ce n'est pas les EPR. Les EPR n'utilisent que 0,7% de l'uranium que l'on extrait de terre.
L'uranium dans nos centrales est un isotope qui comporte 235 protons et neutrons et l'isotope dominant, dit 238, on ne peut rien en faire dans les centrales existantes. Si on se contente d'utiliser l'uranium 235, on ne peut pas avoir de l'énergie nucléaire en grande quantité pour remplacer une grande partie des centrales à charbon sur terre et pour des siècles.
Donc le vrai nucléaire durable est celui de la quatrième génération. Le débat qu'on n'a même pas ouvert en France est désormais : quand est-ce qu'on passe à la quatrième génération et est-ce qu'on construit 253 EPR ou juste ce qu'il faut pour faire le bouclage avec la quatrième génération ?
