"Je sens que la date d’exécution approche" : un Américain raconte sur RTL depuis sa prison comment il a découvert l'héritage de Robert Badinter

Un immense portrait de Robert Badinter orne déjà la façade du Panthéon, ce jeudi 9 octobre 2025. Dans quelques heures, le célèbre avocat, l’homme qui a permis l’abolition de la peine de mort, y fera son entrée.

Son combat contre la peine capitale, toujours appliquée aujourd’hui dans 47 pays du monde, continue d’être porté par ses héritiers idéologiques. L’un d’eux s’appelle Albert Marques. Présent à la soirée des 25 ans d'Ensemble Contre la Peine de Mort, il est pianiste américain de jazz. Depuis de longues années, il se bat contre la condamnation à mort de son meilleur ami aux États-Unis, et Robert Badinter est pour lui une source d’inspiration.

D'ailleurs dans son sac de voyage, ce jour-là, se trouvent des livres écrits par Badinter et une copie du discours intégral de 1981. Il puise dans ces textes les arguments pour soutenir le combat qu’il mène pour son ami Keith Lamar, qui attend son exécution dans les couloirs de la mort, dans l’Ohio. Détenu depuis 37 ans, ce dernier est accusé d’avoir participé à une émeute ayant causé la mort de plusieurs personnes. Des faits qu'il a toujours nié.

"Je n’imaginais pas qu’un gouvernement pouvait tuer légalement"

Depuis sa cellule d’isolement de la prison correctionnelle de l’Ohio, Keith confie à son ami par téléphone : "Je pleure parfois. Je sens que la date d’exécution approche. L’attente est pesante, mais en même temps, je suis optimiste grâce à tout le travail qu’on fait pour m’éviter de mourir."

C’est en prison qu’il dit avoir découvert Robert Badinter : "Je dois admettre que j’ai découvert récemment son héritage. En 1981, j’avais 12 ans et je n’imaginais pas qu’un gouvernement pouvait tuer légalement quelqu’un. Ce que Robert a fait, c’est planter des graines pour l’avenir."

Dans leurs recours juridiques, Albert et Keith utilisent désormais les arguments de l’ancien ministre français : "Quelle est la marge d’erreur acceptable avec la peine de mort ? La peine de mort est irréversible", clame Albert, en référence au discours de 1981. L’exécution de Keith Lamar est prévue pour le 13 janvier 2027.

Des avocats mobilisés

Dans les pays où elle est encore appliquée, la peine de mort se combat aussi dans les tribunaux. C’est ce que faisait Robert Badinter avant de devenir ministre. Richard Sedillot, porte-parole d'ECPM et avocat, a choisi de poursuivre cette mission, comme il l’explique : "J’ai défendu une jeune femme qui encourait la peine de mort au Burundi. J’ai assisté des accusés qui encouraient la peine de mort en Mauritanie. J’ai défendu Serge Atlaoui. Je continuerai à en parler le plus longtemps possible."

Robert Badinter avait lui-même encouragé cette transmission de son vivant, comme le rappelle Raphaël Chenuil Hazan, directeur général d’Ensemble contre la peine de mort, et proche de l’ancien ministre : "Avec ceux qui poursuivent son combat, nous déjeunons ensemble tous les mois afin de faire le point. Où en est-on au Maroc ? Aux États-Unis ? Comment peut-on avancer ? Quelles sont les pistes ? Voilà ce qui l’intéressait."

Albert, Raphaël et bien d’autres seront présents au Panthéon ce soir, pour accompagner Robert Badinter.

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