Depuis plusieurs mois, l’exode urbain s'accélère, selon l'institut national de la statistique et des études économiques (Insee) (*). Il s'agit d'un mouvement contraire au puissant exode rural qui a commencé en France au XIXᵉ siècle pour peupler les villes.
Pour l’année 2022, à Paris, les départs sont trois fois plus importants que les arrivées, c’est l’écart le plus important du pays et il ne cesse d’augmenter depuis 2018. Les villes de plus de 700.000 habitants hors Paris, les grandes métropoles françaises, subissent aussi une hémorragie mais plus faible : les arrivées comptent pour 85% des départs, ce qui veut dire qu’elles se vident aussi, mais plus lentement.
À l’autre extrémité, ce sont les agglomérations de moins de 50.000 habitants qui profitent le plus de ces mouvements, avec 128 arrivées pour 100 départs. Et plus encore la périphérie de ces agglomérations, c’est-à-dire quasiment les zones rurales, 147 arrivées pour 100 départs.
Et certaines régions sont plus attractives que d’autres. La star, c’est la Bretagne, avec deux fois plus d’arrivées que de déménagements, suivie de près par la Corse, la Nouvelle Aquitaine et l’Occitanie. À l’inverse, l’Île-de-France, les Hauts-de-France et le Grand-Est sont les régions les plus déficitaires.
L’Insee y voit la conséquence de l’essor du télétravail, qui permet de s’installer au vert tout en continuant à travailler à distance. Et c’est vrai que les départements les plus quittés sont aussi ceux où les emplois de bureaux sont les plus importants : ceux de l’Île-de-France, le Rhône et la Haute-Garonne.
Autre facteur, démographique celui-ci, le vieillissement, avec l’augmentation du nombre de retraités, nombreux à quitter les métropoles actives pour trouver le calme des campagnes, souvent dans leur région d’origine.
Mais alors, y a-t-il de quoi inverser le rapport de force démographique entre les villes et les campagnes ? Selon les derniers chiffres de l’Insee, il y a un tiers de Français des champs, contre deux tiers de Français des villes.
En fait, l’exode rural a commencé vers 1850, avec l’industrialisation progressive du pays qui a aimanté les paysans dans les zones urbanisées. En 1930, les deux France sont, au plan démographique, de taille identique. Mais celle des villes va prendre l’ascendant, nourrie par de puissants flots jusqu’en 1975. À cette date, les flux se tarissent, commencent même à s’inverser. Et débute alors le développement des couronnes, autour des villes, qui se poursuit aujourd’hui.
Voilà donc en réalité longtemps que les villes ont perdu leur dynamique au profit de leurs banlieues et des agglomérations de petite taille, voire des zones rurales. La Covid-19 et le télétravail n’ont fait qu’accentuer et accélérer l’évolution. Il a fallu cent ans aux citadins pour dominer les ruraux, peut-être en faudra-t-il autant pour que la campagne prenne sa revanche.
(*) Plutôt que d’attendre les données du recensement, toujours très longues à exploiter, l’Insee a travaillé à partir de deux sources qui donnent une photo très actuelle de nos migrations intérieures. Le fichier des réexpéditions définitives du courrier à la Poste, qui recense les déménagements, et celui des immatriculations de véhicule, tout aussi précis et actualisé. Et ces deux sources convergent.
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