Dans le Morvan, le village de Luzy accueille réfugiés et demandeurs d'asile depuis 2018

Depuis 2018, la commune de Luzy dans le Morvan accueille 45 demandeurs d'asile. Au moment de son installation des opposants d'extrême droite n'avaient pas hésité pas à multiplier les actes d'intimidation contre l'installation de ce centre. Cinq ans plus tard, où en est-on ? Notre reporter Morad Djabari s'est rendu dans cette commune de 1.900 habitants.

Nathalie est infirmière, et bénévole pour donner des cours de français aux demandeurs d'asile ou aux réfugiés. "En ce moment, nous avons beaucoup d'Afghans principalement. Et puis nous avons un Syrien qui vient de temps en temps", raconte-t-elle. On a un couple qui lui a fait des études, ils ont un master. Donc l'assimilation se fait plus rapidement. On a un prof d'anglais syrien. Donc c'est pareil, il apprend vite."

Jalaludin est arrivé en France depuis un an. "On m'a donné un endroit où dormir en me transférant ici à Luzy, raconte-t-il. Maintenant, je suis content. Il y a de bonnes installations et la population de Luzy aide vraiment les étrangers. Je viens ici pour apprendre le français puisque si on veut vite trouver un travail, il faut qu'on parle vite français. On est vraiment heureux ici."

Des préjugés tenaces

Ces nouveaux voisins venus de loin sont quasiment devenus des habitants du village. Ils participent aux différents événements organisés par la mairie, jouent dans l'équipe de foot. Et pourtant, cinq ans plus tard, le rejet, les préjugés, l'aversion même parfois, sont encore tenaces. "C'est quand même nous qui les payons. Ils s'achètent des bicyclettes, des téléphones", avance cette dame qui dit "avoir peur d'être agressée". Aucune agression n'a pourtant été recensée dans le village depuis leur arrivée en 2018.  

Au contraire, cette autre femme qui vit dans le même immeuble dit apprécier les échanges avec ses voisins. "Je suis pour le brassage de civilisations", dit-elle. "On serait bien contents d'être bien accueillis dans leur pays. Alors il faut bien les accueillir ici, c'est normal". Malgré la réussite de ce projet, la commune divers gauche se trouve dans un bastion Rassemblement national. Dans la Nièvre, Marine Le Pen est en effet arrivée en tête au second tour de la présidentielle.  

"On a pris beaucoup de temps pour expliquer"

Jocelyn Guérin est maire de Luzy depuis 2020. Elle revient sur les difficultés qu'a rencontré le projet. "J'avais fait voter au conseil municipal, dès mon arrivée à la mairie, une délibération pour afficher cette volonté d'accueillir des gens malheureusement en difficulté. (...) On a travaillé sur le projet pour arriver à présenter le projet à la population, pour que cette arrivée se fasse le plus sereinement possible", explique-t-elle. 

"On a fait une réunion publique. Et là, ça a été plus compliqué", reconnaît-elle. "On a pris beaucoup de temps pour expliquer et dire quels moyens étaient mis pour que ça marche. (...) C'est la chance qu'on a aussi à Luzi d'avoir un tissu associatif. Et cette réunion avec la population, il y a eu des échanges constructifs, des réponses avec un engagement de tous ces partenaires. On avançait bien, avant qu'une "quinzaine de personnes qu'on ne connaissait pas se dispersent dans la salle". "Ils sont allés tellement loin dans la violence verbale qu'à un moment donné, les Luzycois les ont sifflés, leur ont criés 'dehors' et ils ont été obligés de partir", explique-t-elle avant d'ajouter : "Dès qu'il y a une fragilité, le Front national y trouve une brèche..."

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