Isabelle Morini-Bosc : "LCI a beau être la plus ancienne chaîne d'info, elle est forcée d'innover"

ÉDITO - LCI est disponible en clair depuis ce mardi matin. La chaîne fait face à la concurrence d'i-Télé et BFM et devra innover notamment fin août, lorsqu'elle présentera sa nouvelle grille.

Les locaux de LCI à Boulogne Billancourt

Crédit : KENZO TRIBOUILLARD / AFP

Dans les médias, dire d'un présentateur de journal qu'il fait "du Jean-Pierre Pernaut", ce n'est pas l'insulte suprême, mais cela s'en rapproche. C'est comme évoquer un nouveau film jugé pas terrible en précisant "cela ferait tout au plus un bon téléfilm". La formule est dans les deux cas agaçante. Concernant les fictions, je glisserai simplement que j'ai vu cette année plus de bons téléfilms que de bons films. Et je me garderai bien de citer ces longs-métrages qui auraient été parfaits s'ils étaient restés sous la forme de bande-annonce.

Quant au 13 heures de Jean-Pierre Pernaut, j'avoue le trouver bien fait quand il m'est donné de pouvoir le suivre. Une fois l'actualité chaude traitée, qu'elle soit nationale ou internationale, pourquoi serait-il choquant de le voir évoquer ce qui intéresse les Français, c'est à dire ce qui se passe ici-ou-là en France ? Et pourquoi citer Jean-Pierre Pernaut ce matin ?

Pourquoi LCI ne ferait-elle pas du Pernaut ?

Parce que cité, il l'a été abondamment par la "France qui pense", se dépasse, se surpasse, et se demande si la nouvelle LCI ne va pas être une chaîne "qui fait du Pernaut puissance X". Autrement dit une chaîne qui va surtout évoquer la dernière couturière faisant dans la dentelle, le meilleur boulanger menant son monde à la baguette, le fabriquant de cloches savoyarde exportant dans le monde entier (les cloches, ça voyage bien, même après Pâques), ou le chat égaré de madame Michu retrouvant le droit chemin.

Et où serait le mal ? À une époque où le nationalisme régional est bien vu, avec patois étudié à l'université, on voit mal pourquoi ce serait suspect de saluer un bastion de la joaillerie française ou une fabrique de "bas" français (ayant justement connu des hauts et des bas, de soie ou pas). C'est vrai qu'avec le passage de LCI en clair, c'est à dire accessible à tous sur le canal 26 depuis ce mardi 5 avril à 5h59, se pose le problème d'une grille "génératrice d'infos généralistes". Pas question de faire du BFM ou du i-Télé, c'est à dire de l'info d'abord, de l'info d'accord, de l'info encore, de l'info raccord, de l'info réassort, bref de l'info jusqu'au remplissage.

Un chantier passionnant

LCI a beau être la plus ancienne chaîne d'info, elle est la moins connue du public, et la plus "forcée" d'innover. La logique l'y oblige, le CSA l'y contraint. Elle devra présenter le 29 août une grille complète et complètement harmonieuse. 30% d'info pure et dure, le reste en magazines et en émissions sur la culture, l'art-de-vivre, la conso, la santé, l'environnement, et bien sûr les médias.

J'espère y voir aussi pour ma part des formats courts racontant avec humour, que sais-je, la petite histoire d'un tableau, d'un objet, d'une dictée célèbre, les grandes histoires de cul de l'Histoire de France, la vie des bêtes, etc. Je comprends, certes, l'inquiétude d'une rédaction passée de l'exaltation à la crainte. Exaltation d'avoir survécu à la menace de l'écran noir. Crainte de faire peu de reportages à chaud. Mais que l'on me pardonne de trouver le "chantier" LCI passionnant. Car dans un contexte férocement concurrentiel il en faudra, des ajustements, pour que LCI devienne LCI, c'est à dire "La Chaîne Indispensable".

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