Charlie Hebdo : pourquoi le journal porte-t-il ce nom ?

Dans un mois, la France commémorera les dix ans de l'attentat contre le média satirique Charlie Hebdo. Un livre-hommage aux victimes, Charlie Liberté, le journal de leur vie, est sorti le 5 décembre. Charlie Hebdo est né en 1970 de l’imagination de François Cavana et de Georges Bernier, le père de Michèle Bernier. Il était surnommé le Professeur Choron, du nom de la rue où se situait le siège de Hara-Kiri, le journal sur les cendres duquel est né Charlie Hebdo.

À l’origine, Charlie n’était pas le journal qu’on connait aujourd’hui : c’était un magazine de BD pour adultes qui paraissait en parallèle de Hara-Kiri, l’hebdo "bête et méchant" comme il s’auto-qualifiait, créé en 1960. 

Charlie, lui, était un mensuel qui s’était largement inspiré d’un journal italien baptisé Linus, du nom de Linus Van Pelt, un des personnages des Peanuts, un comic-strip américain créé par Charles Schultz. Et le meilleur ami de Linus, c’est Charlie Brown. Qui va donc, pour garder la filiation avec le journal italien, donner son nom au magazine Charlie. La première Une montre le chien de Charlie Brown, le célèbre Snoopy. Le magazine devient hebdomadaire en 1970 à la suite de la mort du Général de Gaulle.

Le 16 novembre 1970, après le décès du Général, Hara-Kiri publie la une suivante : "Bal tragique à Colombey : un mort". En double référence à Colombey-les-Deux-Églises où s’était éteint l’ancien Président. Et à un incendie tragique dans une discothèque de l’Isère qui avait fait 146 morts. 

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Cette Une provocatrice vaut au journal Hara-Kiri d’être interdit dès le lendemain par Raymond Marcellin, le ministre de l’Intérieur de l’époque, officiellement en raison de son caractère pornographique. Il s'agit toutefois d'une censure politique.

Pas question pour les créateurs d’Hara-Kiri de baisser les bras. Ils ont l’idée de contourner cette interdiction en utilisant Charlie. Finie la BD : Charlie Mensuel devient Charlie Hebdo. Ils gardent un encart BD comme dans le mensuel, détournent les noms des rubriques-phares de Hara-Kiri mais en les gardant identifiables. Idem pour la maquette du journal qui conserve une typo identique. 

Mais la provocation est toujours là. La preuve cette accroche : "L’hebdo Hara-Kiri est mort. Lisez Charlie Hebdo, le journal qui profite du malheur des autres". Quant à l’irrévérence, elle est plus que jamais là. Charlie, ce n’est plus seulement Charlie Brown. C’est aussi un clin d’œil, une façon familière d’appeler Charles De Gaulle, indirectement responsable de la création de l’hebdomadaire.