Langue française : qu'est-ce qu'une "litote" ?

C'est un Bonbon inspiré par la page Facebook de RTL Matin Week-End, amis des mots. D'abord par notre post de la semaine dernière. Une épatante vidéo de Stéphane Carpentier fouillant son sac à dos à 5h du matin, en quête de pièces pour la machine à café. Elle était accompagnée du texte suivant : "Dire que c’est un bonheur de vous retrouver, c’est un euphémisme". Et c’est ce qui m’a donné envie de vous parler de cette figure de style, l’euphémisme. Ce que nous entendions par là, c'était : "C'est plus qu’un bonheur de vous retrouver !"

C'est ce qu’on voulait dire, en tout cas. Mais vous allez voir que, d'après nos dicos, c'est un peu plus précis que ça. Euphémisme vient du grec ancien : eu (bien), et phêmê (la parole). En grec, euphêmismos désignait "l'emploi d’un mot favorable" ("à la place d’un mot de mauvais augure"), explique le Dictionnaire historique de la langue française. Son sens en français actuel est plus restreint que ce qu'on croit en général : "Euphémisme désigne l'expression atténuée d'une notion dont l'expression directe serait jugée vulgaire ou brutale." "Par euphémisme, on dit 'Il nous a quittés' pour 'Il est mort'", précise ainsi le Petit Larousse.

L'euphémisme est très proche de ce qu'on appelle une litote, du grec litotês (la simplicité), une figure consistant, selon le Larousse toujours, "à dire moins pour faire entendre plus", l'exemple le plus fameux étant la célèbre réplique de Chimène, dans Le Cid : "Va, je ne te hais point", qui en fait signifie "Je brûle d’amour pour toi". Souvent, la litote s'appuie sur une négation. Quand on dit : "Dis donc, il est pas mal !", c’est une litote, puisque, en fait, ça signifie "Dis donc, quel canon !" Litote encore quand on dit : "C'est pas faux" pour dire "c'est vrai". 

Oxymore : le rapprochement de deux mots contradictoires

En somme, comme la plupart des figures de style, la litote sert, en manipulant la langue d’une façon un peu originale, à mettre en valeur le propos. Ah, il y a une autre figure de style que j'aime beaucoup, souvent poétique, c'est l'oxymore, c'est-à-dire le rapprochement de deux mots a priori contradictoires.

À lire aussi

langue française

"Grouillos", "shallow", "culaccino"... Ces mots qui manquent au français

Si je dis : "Je me suis fait une douce violence" (pour accepter un troisième croissant, par exemple), c'est un oxymore. Une "obscure clarté", c'est un oxymore. Ou encore un "illustre inconnu", un "silence éloquent"... Oxymore vient du grec ancien, fondé sur deux termes opposés : oxus (aigu) et moros "émoussé".

Ne pas confondre l'oxymore avec l'antiphrase

Attention également à ne pas confondre l'oxymore avec l'antiphrase. Une antiphrase, c'est l'utilisation d'un mot dans un sens contraire à son sens véritable, souvent par ironie. Ainsi, si je dis "Eh bien Stéphane, vous avez mangé tous les croissants, c'est du joli !" Je dis que c'est joli alors que je pense que ce n'est pas joli joli, au contraire. Ou si je dis "Bien joué, Jean-Sébastien !" au moment où il vient de renverser son café, c'est une antiphrase aussi.