Klaus Barbie : le récit de l'interview qui a fait tomber le "boucher de Lyon"

Pendant 40 ans, Klaus Barbie a échappé à la justice. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, rester en Allemagne est décidément risqué pour Klaus Barbie. Six ans après la fin du conflit, le "boucher de Lyon" a quitté le pays, en douce, grâce à l'aide du Vatican. Il a fui ensuite en Amérique latine où il a été protégé par les services de renseignement, notamment américains, qui se servent de lui pour traquer les communistes. 

Mais grâce à la détermination et à l'énergie des chasseurs de nazis Serge et Beate Klarsfeld, la cavale du fugitif Barbie va prendre fin au début des années 80. 

Remis à la justice française, Klaus Barbie va répondre de ses crimes lors d'un procès historique à double titre. C'est la première fois qu'un homme est jugé en France pour crime contre l'humanité et c'est aussi la première fois qu'un procès est intégralement filmé. 

Klaus Barbie et Klaus Altmann

Après avoir fui l'Allemagne, Klaus Barbie s'est rendu en Italie, puis a rejoint l'Amérique du Sud avec une nouvelle identité : Klaus Altmann. Au service de la CIA, il a sillonné le continent à la chasse des communistes pour le compte des dictatures argentines, péruviennes, boliviennes. Comme pendant la guerre, ses méthodes d'interrogatoire étaient musclées. 

Barbie était aussi un homme d'affaires. Il a dirigé une entreprise d'exploitation de bois et une compagnie maritime qui a fait dans le trafic d'armes et de drogues. Mais un couple, Serge et Beate Klarsfeld, était bien décidé à le capturer. Les Klarsfeld se sont battus pour demander la réouverture du dossier Barbie et sont convaincus que Barbie se cache quelque part en Amérique du Sud. 

Ils disposaient de deux photos assez intrigantes. L'une, prise pendant la guerre, montrait Klaus Barbie. Une autre montrait un homme d'affaires bolivien qui lui ressemblait comme deux gouttes d'eau. Ces photos circulent dans la presse péruvienne et quelques semaines plus tard, un Allemand vivant à Lima, la capitale du Pérou, communique le nom de cet homme : il s'appelle Klaus Altmann. 

Une interview qui se transforme en piège pour Barbie

Les Klarsfeld en voulaient pour preuve que les enfants d'Altmann étaient nés au même endroit et aux mêmes dates que ceux de Barbie sur les papiers officiels. C'est une interview qui a permis de démasquer une bonne fois pour toutes Klaus Barbie. Le journaliste français qui travaille pour l'ORTF, la télévision publique française, Ladislas de Hoyos, a demandé à rencontrer Klaus Altman pour une interview. 

Et Barbie va tomber dans le piège tendu par Ladislas de Hoyos : Klaus Altmann prétend ne pas parler français, mais lorsque Ladislas de Hoyos lui demande s'il a vécu à Lyon, Barbie se trahit et répond "oui", en français.

Altmann a accepté de répondre à toutes les questions et même de répéter en français certaines phrases du journaliste, car Klaus Altmann a affirmé qu'il ne parlait pas le français. Et quand Ladislas de Hoyos lui montre des photos de Jean Moulin, Barbie les touche, laissant ses empreintes digitales.

Barbie a avoué sa véritable identité

Peu de temps après, dans une interview à un journal brésilien, Barbie a avoué sa véritable identité. Dans cet entretien, il parlait d'Adolf Hitler comme d'un "génie", il niait l'existence de la Shoah et il était fier de dire qu'il était venu incognito par deux fois en France depuis la fin de la guerre, notamment pour fleurir la tombe de Jean Moulin qu'il a fait assassiner.

Pour autant, l'extradition de Barbie vers la France s'est fait attendre. Mais après la chute du dictateur bolivien, l'étau s'est, peu à peu, resserré. La France a livré des mitraillettes à la Bolivie et elle a obtenu en échange la possibilité d'extrader le bourreau nazi, arrêté officiellement par les Boliviens pour escroquerie. Cette fois, c'en est fini. Klaus Barbie a été extradé vers la Guyane française, puis en métropole. 

Klaus Barbie a été reconnu coupable de crimes contre l'humanité. Il fut condamné à la prison à perpétuité. On attribue à Klaus Barbie 4.342 assassinats, 7.581 déportations de juifs, ainsi que 14.311 arrestations et actes de torture de résistants en France. Incarcéré dans une prison lyonnaise, Barbie est mort d'un cancer et ses cendres ont été transportées en Autriche. 

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