Tout le monde connaît la Tour Eiffel, mais personne ne connaît vraiment Gustave Eiffel. Il y a du Eiffel dans la tour qui porte son nom, dans la statue de la Liberté, deux des monuments les plus célèbres au monde. Mais celui qui a été aussi un entrepreneur de génie a laissé plus de 500 constructions sur les cinq continents à une époque où la révolution industrielle a permis des progrès prodigieux.
Cette histoire commence au bord du canal de Bourgogne à Dijon, le 15 décembre 1832. Alexandre est son prénom, Bonickhausen son nom. Gustave n’était que son deuxième prénom et Eiffel un nom d’usage. Bonickhausen, c’est le nom d’un ancêtre de la famille qui a quitté Marmagen en Allemagne en 1700.
Cette région pauvre au Sud de Cologne est ruinée par la Guerre de Sept Ans. La famille trouve refuge en France, y fait sa vie, et évidemment ce nom de famille imprononçable va donner du fil à retordre à chaque démarche administrative.
Wilhelm Heinrich Bonickhausen prend donc l’habitude de se faire appeler Jean-René, et il donne un nom d’usage plus facile, Eifel, comme sa région d’origine, avec un seul -F. L’Eifel est un massif montagneux allemand de moyenne altitude, entre la Moselle, le Rhin et le Luxembourg.
Assez peu d’Allemands savent qu’ils ont dans leur pays une région de volcans encore actifs au sens géologique, et encore moins d’Allemands savent qu’il y a une connexion entre le constructeur de la Tour Eiffel et leur pays.
Qu’importe pour l’étudiant que Gustave est devenu. Il va louper Polytechnique, mais il peut se présenter à la toute nouvelle École Centrale des Arts et Manufactures à Paris. Centrale va être la grande école du XIXe siècle puisqu’elle forme le nouveau Graal du progrès en marche : l’ingénieur. Gustave Eiffel sera ingénieur, au siècle qui voit arriver la révolution du fer.
Le fer était fait pour Gustave Eiffel, Gustave Eiffel était fait pour le fer. Cette nouvelle matière solide et souple à la fois est en train d’ouvrir des perspectives vertigineuses à l’Europe et permet d'envisager de battre tous les records.
Gustave Eiffel va se faire les dents d’abord dans des forges en Bourgogne, puis aux établissements Nepveu et compagnie, spécialisés dans le matériel pour chemins de fer. Mais c’est en Gironde qu’il va avoir l’occasion de se faire connaître. Le chemin de fer est une nouvelle technologie en plein essor, mais tout est à faire.
Depuis Paris, on peut déjà aller en train jusqu’à Bordeaux, grâce à la compagnie des Chemins de Fer d’Orléans, mais qui s’arrête à la gare de Bordeaux-Bastide, sur la rive droite de la Garonne. Si l’on veut continuer vers Toulouse ou l’Espagne, il faut descendre du train, traverser la ville, à pied par le Pont de pierre ou le fleuve sur un bac, et remonter dans des wagons de la Compagnie du midi à la gare de Bordeaux Saint-Jean, sur la rive gauche.
Les frères Pereire, propriétaires de la Compagnie du midi, veulent régler ce problème, en construisant le pont de Bordeaux. Le jeune ingénieur qui va diriger le chantier a 26 ans, il s’appelle Gustave Eiffel.
La Garonne est large, peu commode à cet endroit, les courants changent deux fois par jour avec les marées, c'est le défi qui se présente au jeune ingénieur, qui doit réaliser le pont en fer le plus long d'Europe.
Et avant de s’élever très haut, Gustave Eiffel sera le spécialiste des profondeurs, puisqu'il va construire les piles du pont. Il faut atteindre le lit du fleuve sous cinq mètres d'eau puis creuser la vase et le gravier pour appuyer les fondations sur un sol solide, encore 20 mètres plus bas.
Eiffel va utiliser pour cela la technique du fonçage par caisson à air comprimé, dont il deviendra un grand expert. On immerge des caissons de métal dans l'eau, puis on y insuffle de l'air comprimé pour chasser l'eau. Les ouvriers peuvent descendre ensuite par un sas et travailler au sec, comme dans un sous-marin.
Puis ce sera le lançage du tablier, ou plutôt de la cage dans laquelle passeront les trains. Jamais des ponts en cage aussi longs n’ont été construits. Mais Gustave Eiffel va assembler les tronçons sur les bords du fleuve et les lancer en porte-à-faux, avec des leviers à cliquet en bois, qui font avancer la structure de quelques mètres par jour.
Elle est dans un état impeccable aujourd’hui cette cage en fer, d’une grande pureté, simple et efficace, et on reconnaît déjà le style de l’ingénieur.
Le premier ouvrage qui l’a fait connaître a aussi failli disparaître, quand avec l’arrivée du TGV un nouveau pont beaucoup plus large est construit juste à côté.
En 2008, tout se joue à quelques semaines. Les grues sont positionnées sur les rives pour commencer les travaux de démolition. Mais les descendants de l'ingénieur réunis en association alertent les pouvoirs publics, et la passerelle va être classée en urgence monument historique car elle est dans le périmètre du port de la lune, lui-même classé patrimoine mondial par l'Unesco. Les grues doivent donc repartir, et la passerelle est toujours là aujourd'hui.
Elle a connu un dernier chantier d'entretien et est dans un état impeccable mais désaffectée pour le moment. Les interrogations subsistent quant à l'usage qui pourrait en être fait à l'avenir.
En tout cas, le chantier est un succès et va lancer la carrière d’un jeune ingénieur qui va se consacrer à ce nouveau matériau si prometteur. 163 ans plus tard, la passerelle même désaffectée est dans un état remarquable, comme tous les ouvrages Eiffel, car il va construire des ponts, des halles, des charpentes, des bâtiments, des églises, qui sont restés des monuments remarquables et parfois inattendus.
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