Je reçois quantité de messages d’auditeurs et de lecteurs, pour me demander d’expliquer une curiosité de la langue, mais encore plus souvent pour se plaindre de fautes qui les agacent. Ils ont souvent raison… parfois tort ! (Merci à tous, au passage, pour ces témoignages, auxquels je ne peux pas toujours répondre, pardon, mais que je déguste toujours avec délices.)
C’est un homonyme à moi, Gilbert (sauf que lui c’est Gilbert de son prénom), qui se dépeint comme un “boomer chatouilleux sur l’orthographe et la grammaire”, qui inspire le Bonbon d’aujourd’hui. Le message qu’il m’a adressé s’intitule : “Première phrase, une faute !” “Bonjour madame Gilbert, m’écrit Gilbert. Je viens de commencer à lire La Servante écarlate, de Margaret Atwood. Il y a une préface de l’auteure, constituée d’un discours qu'elle a prononcé. Première phrase : ‘C’est pour moi un immense bonheur et une grande joie (…) de m’être vu décerner ce prix...’”.
C’est ce petit vu qui agace Gilbert – oui, encore ce diable de participe passé ! Pour Gilbert, il aurait fallu écrire VUE, puisque c’est une femme qui parle. “Je ne fais pas le reproche à Margaret Atwood, précise-t-il, mais au traducteur. Sauf bien entendu si c'est moi qui me trompe.”
Et vous vous trompez, Gilbert ! Avec l’auxiliaire être, c’est vrai, le participe passé s’accorde… en principe… Mais les verbes pronominaux (se laver, se rencontrer… se voir…) font partie de ces cas particuliers qui nous embrouillent ! Le participe passé s’accorde si le sujet de se voir est aussi le sujet du verbe à l’infinitif qui suit. Ici, Margaret Atwood s’est vu décerner un prix. Ce n’est pas elle qui l’a décerné, donc elle n’est pas le sujet, alors on n’accorde pas : elle s’est vu décerner un prix, VU.Mais elle aurait pu décerner un prix à quelqu’un d’autre.
Certes, c’est moins probable, comme situation, mais dans ce cas, on aurait accordé : VUE ! Autres exemples : Ils se sont vu/s séduire ; si ce sont eux les séducteurs, on accorde VUS, si c’est quelqu’un d’autre qui les séduit… on n’accorde pas : VU ! Elles se sont vues mourir…, on accorde forcément, car ce sont elles qui meurent !
Et tenez, une autre histoire de traqueuse de fautes trompée par un participe passé avec être. C’est Jacqueline, d’Autun, en Saône-et-Loire, qui me fait part de son outrage d’avoir lu dans Le Monde : “les sept jeunes femmes se seraient succédé dans l’appartement” (alors que Jacqueline attendait succédées…).
Et elle aussi fait erreur ! Vous savez que l’accord du participe passé est une histoire de complément d’objet direct placé avant le verbe. Eh bien, certains verbes ne peuvent pas avoir de complément d’objet direct (celui qui répond à la question “qui ?” ou “quoi ?”), donc ils ne s’accordent jamais. C’est le cas de se succéder, mais aussi de se plaire, se complaire, se déplaire, se rire, se sourire, se ressembler, se parler, se nuire, se survivre, se suffire, se convenir.
Elles/ils se sont succédé, elles/ils se sont déplu, elles/ils se sont parlé, elles/ils se sont souri… une fois pour toutes, tous ces participes sont in-va-riables !
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