Faut-il réguler TikTok pour protéger les jeunes ? Deux ans après une enquête sénatoriale sur les liens de la plateforme avec Pékin, l’Assemblée nationale va créer une commission d’enquête sur l’application chinoise. Les députés vont cette fois s’intéresser aux effets psychologiques du réseau social sur les enfants et les adolescents.
Conçu pour pousser à la consommation de vidéos sans interruption, TikTok est accusé d’exposer les mineurs à des contenus violents, sexualisés ou pouvant inciter au suicide. Les parlementaires entendent tirer la sonnette d’alarme en dressant le constat objectif de l’impact de la plateforme sur la santé des mineurs. Que voient les ados lorsqu’ils font défiler les vidéos sur TikTok ? Dans quelle mesure les rend-elle addicts ? A quel point l'application les enferme dans des bulles de vulnérabilité ? Quel impact a-t-elle sur les pensées suicidaires ? Les élus veulent poser le même regard sur TikTok que sur l’alcool et la cigarette.
La création de la commission doit être approuvée ce jeudi 12 mars avec le vote dans l'hémicycle d'une résolution transpartisane portée par la députée macroniste Laure Miller. Le feu vert de l'Assemblée fait peu de doute, après le vote à l'unanimité de cette résolution la semaine dernière en commission des Affaires sociales.
Une fois actée, les députés auront 6 mois pour étudier l'algorithme de TikTok et examiner les répercussions psychologiques de l'application sur les mineurs. La commission entend aussi profiter de ses pouvoirs d'investigation pour convoquer et interroger les responsables de TikTok sur ces problématiques.
Dans un second temps, si les auditions permettent d'établir un lien direct et incontestable entre l'application et la dégradation de l'état de santé mentale des jeunes, l'objectif sera de faire émerger des mesures concrètes pour protéger les adolescents. La commission s'attellera alors à examiner quels sont les leviers juridiques des législateurs français pour pour fixer des limites, réguler les contenus et accompagner les parents.
Jusqu'à l'interdiction ? Les députés ne s'interdisent rien. Mais une telle décision ne pourrait pas être décidée de façon unilatérale par la France sans entrer en contradiction avec les textes européens. Certains pays ont déjà pris des mesures contre les plateformes jugées dangereuses pour les jeunes. L'Albanie va couper TikTok pour au moins un an dans les prochains jours après avoir pointé son implication dans un rixe mortelle dans une école. Le Venezuela a infligé une amende de 10 millions de dollars à la plateforme pour "négligence" après la mort de trois adolescents.
Cette initiative intervient dans un contexte où TikTok n'a jamais semblé aussi influent chez les jeunes. Au niveau mondial, les mineurs y passent en moyenne 1h47 chaque jour, selon une étude récente. En France, 70% des utilisateurs de l’application ont moins de 24 ans. Et si l'on regarde les 11-12 ans, les enfants qui entrent au collège et qui n’ont pas le droit d’être sur TikTok puisqu’il faut avoir au moins 13 ans, la moitié sont déjà sur l’application.
En parallèle, les cris d'alarmes se sont multipliés ces dernières années sur la dégradation de la santé mentale des jeunes. L'an passé, un jeune français sur quatre révélait avoir déjà eu des pensées suicidaires, selon une enquête de l'IFOP. Explosion du temps d'écran, confinements, éco-anxiété... Les raisons sont nombreuses. Les députés veulent savoir dans quelle mesure une application comme TikTok peut amplifier ce malaise. "De nombreux cliniciens confirment que la plateforme tend à exacerber les fragilités psychologiques des plus vulnérables", peut-on lire dans la proposition de résolution. En 2022, une étude américaine avançait que les jeunes inscrits sur l'application et manifestant un mal-être recevaient en moyenne douze fois plus de vidéos sur le suicide et l'automutilation.
Pour la député macroniste Laure Miller, à l’origine de la résolution : l’algorithme de TIkTok “enferme nos jeunes dans des spirales mortifères”. C'est aussi l'avis de 11 familles françaises qui ont porté plainte contre TikTok après des suicides d'adolescents. Elles reprochent à la plateforme de ne pas avoir modéré des contenus en ligne avec le suicide et l'automutilation.
Sur le banc des accusés, TikTok affirme à RTL "être impatient d'expliquer à la commission d'enquête la façon dont il relève certains de ces défis, qui concernent l'ensemble du secteur". L'entreprise rappelle qu'elle supprime "98% des contenus qui enfreignent ses conditions" et qu'elle a mis en place des mesures ces dernières années pour que la plateforme "reste un espace sûr et positif pour les adolescents", notamment "une limite de temps d'écran de 60 minutes et l'impossibilité d'accéder à la messagerie directe pour les moins de 16 ans.
Hasard du calendrier, TikTok a lancé mardi en France et en Europe une série de nouveaux outils pour permettre aux parents de limiter le temps passé par les ados sur son application. Le réseau social assure que cette annonce n'est "absolument pas liée" à la commission d'enquête créée par la France. Le groupe serait toutefois en train d'œuvrer en coulisses pour circonscrire le périmètre de la commission. D'après Politico, un courrier a été adressé au ministère de la Justice et aux députés pour avancer que l'investigation risque de se heurter aux procédures judiciaires en cours, arguant que les travaux d'une commission ne peuvent se pencher sur des faits déjà traités par la justice.
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