"A coup sûr, la France restera la France, en tout cas je ferai tout pour". Voici l'engagement pris par Emmanuel Macron. Lors d'une conférence de presse visant à présenter les objectifs de la présidence française du Conseil de l'Union européenne, le président s'est longuement exprimé sur sa vision de l'Europe.
Il a aussi assuré par ailleurs qu'il travaillerait "jusqu'au dernier quart d'heure". Interrogé sur le télescopage de cette présidence avec l'élection présidentielle, le chef de l'État a indiqué : "Nous n'avons pas choisi ce calendrier (...) Il est aussi le fruit de la mise en œuvre du Brexit qui a déréglé l'ordre de nos présidences" tournantes des 27.
"Il nous faut tenir notre rang, notre rôle avec l'esprit de responsabilité, en considérant que c'est la France, qu'il y a aussi une continuité, que les sujets dont on parle sont poussés depuis plusieurs années et qu'ils sont l'intérêt de la France et de l'Europe", a poursuivi le président.
Au cours d'une longue conférence de presse solennelle à l'Élysée, le chef de l'État a affirmé sa détermination à faire que cette présidence de six mois s'avère "utile" même si elle va percuter de plein fouet la campagne pour la présidentielle d'avril et les législatives de juin.
Selon lui, cette coïncidence ne pose pas de problème car "peut-être que la politique de la France changera" à l'issue du second tour le 24 avril.
Alors que ses opposants l'accusent d'être déjà "en campagne", il a répété qu'il gouvernerait "jusqu'au dernier quart d'heure" de son mandat et qu'il allait donc continuer à faire des "choix" sur "les défis", "qu'ils soient sanitaires, migratoires".
Debout derrière une table face à une centaine de journalistes dans la salle des fêtes, Emmanuel Macron a longuement défendu l'importance cruciale de renforcer la souveraineté européenne en soutien à la souveraineté nationale. "S'il fallait résumer en une phrase l'objectif de cette présidence, je dirais que nous devons passer d'une Europe de coopération à l'intérieur de nos frontières à une Europe puissante dans le monde, pleinement souveraine, libre de ses choix et maître de son destin", a-t-il déclaré.
"Face à toutes ces crises qui percutent l'Europe, nombreux sont ceux qui voudraient ne s'en remettre qu'à la seule nation. Ces nations sont notre force, notre fierté, mais l'unité européenne est leur complément indispensable", selon lui. "Nous devons agir en Européens, nous devons penser en Européens", a-t-il martelé.
Depuis son élection en 2017, célébrée au son de l'hymne de l'UE, Emmanuel Macron se pose en chef de file des pro-Européens face aux "nationalistes" et "populistes", et vante les avancées obtenues à 27, comme le plan de relance post-Covid 19 de 750 milliards d'euros adopté en 2020.
Pour la présidence française (la PFUE), Paris a choisi comme devise "Relance, puissance et appartenance" et comme emblème un U et un E bleu et rouge traversés par une flèche blanche, symbole de "l'ambition d'aller de l'avant", a expliqué le secrétaire d'Etat aux Affaires européennes Clément Beaune.
Pendant une introduction d'une heure, Emmanuel Macron a détaillé ses multiples chantiers pour cette 13e présidence tournante française et la première depuis 2008. Dont celui, jugé prioritaire, de réformer l'espace Schengen pour que l'UE "protège ses frontières" face aux crises migratoires qui se succèdent.
Emmanuel Macron souhaite "repenser le cadre budgétaire" de l'Europe jusqu'ici défini par les critères de Maastricht, estimant que la question du "pour ou contre le 3%" était "dépassée". Avec la crise sanitaire, "nous avons mis entre parenthèse l'application de nos règles budgétaires", a expliqué le chef de l'Etat.
"Nous devrons revenir à des règles qui seules permettent la convergence de nos économies", "mais nous ne pouvons pas faire comme si rien ne s'était passé" et "revenir au cadre budgétaire créé au début des années 90", a-t-il souligné. Il plaide ainsi pour "une discussion stratégique" sur les règles budgétaires européennes, assurant "qu'il nous faut sortir de nos vieux tabous et de nos vieux fétiches".
"La question n'est plus pour ou contre le 3%. Elle est dépassée", a expliqué le chef de l'Etat, en allusion à la règle qui empêche les pays membres de la zone euro de dépasser un seuil de 3% de déficit budgétaire, assouplie lors de la crise sanitaire.
Il a proposé de "repenser le cadre budgétaire" de l'Europe jusqu'ici défini par les critères de Maastricht, estimant que la question du "pour ou contre le 3%" de déficit était "dépassée".
Il a aussi annoncé la tenue d'un sommet entre l'Union africaine et l'UE les 17 et 18 février à Bruxelles afin de "refonder en profondeur" la relation "un peu fatiguée" entre les deux continents.
Parmi les autres propositions, figurent "la mise en œuvre concrète et véritable" d'un "service civique européen" de six mois pour les moins de 25 ans, et le lancement "un grand travail sur l'histoire de l'Europe" face au "révisionnisme" qui "s'installe dans plusieurs pays".
Le président de la République veut aussi faire de l'Europe une "puissance du numérique" via des fonds de financement de start-up et la finalisation d'une "vraie taxation des multinationales". Afin de "réussir à créer une Europe du numérique, en tout cas à la parachever", Paris entend "européaniser" sa stratégie de soutien à "l'innovation et la croissance" des start-up, notamment via la levée de fonds pour les créer, a-t-il indiqué.
La France poussera donc à la création de fonds européens pour financer ces start-up et autres "acteurs du numérique" en mobilisant les "investisseurs institutionnels". Parmi "les 10 premières capitalisations mondiales", il y a aujourd'hui "huit entreprises de la tech et aucune européenne", constate Emmanuel Macron qui veut "créer un vrai marché intégré du numérique" européen aux règles "simplifiées" via la suppression des "barrières" entre les 27 États membres.
Pour aider au développement de champions européens, l'Europe doit approfondir son "agenda d'attractivité des talents" et attirer les financements en mobilisant "l'épargne institutionnelle des Européens". Pour "ne pas subir la loi des autres puissances", l'Europe doit poursuivre son travail de régulation qui a mené à un "accord international sur la taxation des multinationales et en particulier des géants du numérique", a souligné le président.
Faire "avancer les négociations sur la mise en place d'un instrument européen de lutte contre la déforestation importée". Voici un autre objectif affiché par Emmanuel Macron. Cet instrument "visera à interdire l'importation dans l'Union européenne de soja, bœuf, huile de palme, bois, cacao, café, quand ils contribuent à la déforestation" dans leurs pays de production, a déclaré le chef de l'Etat.
Un autre objectif de cette présidence française sera "la mise en place du mécanisme d'ajustement carbone aux frontières, cette fameuse taxe carbone aux frontières de l'Europe", a-t-il ajouté. "Cela consiste à corriger le fait que nous allons demander des efforts, décarboner notre industrie, mais nous continuerons à importer des biens de régions qui ne font toujours pas le même effort. Nous compenserons à nos frontières ce différentiel", a-t-il assuré.
En outre, "la présidence française sera un moment clé pour pousser les 'clauses miroirs' (qui obligent à respecter les mêmes normes qu'au sein de l'UE, ndlr) et avoir des exigences environnementales et sociales dans nos accords commerciaux", a-t-il complété, notant que "c'est là aussi un question d'équité".
Emmanuel Macron a appelé le gouvernement britannique à "travailler de bonne foi" avec la France sur des sujets de désaccords comme la pêche, la gestion des migrants ou la coopération en matière de défense.
"Le gouvernement (britannique) actuel ne fait pas ce qu'il dit" et "j'ai terriblement envie d'avoir un gouvernement qui souhaite travailler simplement de bonne foi avec nous", a-t-il déclaré en conférence de presse, en souhaitant que Londres instaure "une filière légale d'instruction du droit d'asile" alors que "le modèle économique britannique repose sur le travail illégal d'étrangers".
Décider d'un boycott purement diplomatique mais pas sportif des Jeux olympiques d'hiver de Pékin serait une mesure "toute petite et symbolique", a estimé Emmanuel Macron. "Il faut être clair, soit on dit : on fait un boycott complet, on n'envoie pas d'athlètes, soit on dit on essaie de réengager les choses et d'avoir une œuvre, une action utile comme toujours à l'international", a-t-il déclaré, alors que la France a dit qu'elle prendrait une décision à l'unisson avec l'Union européenne.
Les Etats-Unis, le Canada et le Royaume-Uni ont décidé d'un "boycott diplomatique", accusant notamment Pékin de fouler au pied les droits de l'homme, notamment dans sa région à majorité musulmane du Xinjiang (Nord-Ouest).
Quelque 400 rendez-vous sont prévus, essentiellement sur les trois premiers mois en raison de la présidentielle en France. Ils débuteront par un discours suivi d'un débat au Parlement européen le 19 janvier et seront répartis aux quatre coins de la France. Un sommet européen informel se tiendra les 10 et 11 mars, soit un mois juste avant le premier tour de la présidentielle.
Les marges de manœuvre françaises seront toutefois limitées car si la présidence tournante permet de donner un élan à certaines priorités, il reste ensuite à construire des consensus à 27, ce qui n'est jamais aisé.
"Pour peser en Europe, la France doit en finir avec cette image d'arrogance qui lui colle à la peau depuis le début de la présidence Macron", a attaqué la candidate du parti Les Républicains à la présidentielle Valérie Pécresse. Le chef de l'Etat "a parfois le bon discours, mais il y a une pratique qui est à l'opposé", a déploré le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure.
Selon un sondage Odoxa pour Le Figaro, les Français sont deux fois plus nombreux (32% contre 15%) à considérer que présider l'UE sera un atout plutôt qu'un handicap pour Emmanuel Macron et 63% assurent que les propositions des candidats sur l'Europe compteront dans leur choix de vote.
A l'extrême droite, Eric Zemmour demande à Emmanuel Macron "d'imposer le principe de non-admission des migrants dans l'Union européenne". L'agenda européen du chef de l'Etat sera chargé jusqu'à Noël avec la réception du nouveau chancelier allemand Olaf Scholz, qui fera son premier déplacement international à Paris vendredi. Puis Emmanuel Macron se rendra lundi en Hongrie pour rencontrer le Premier ministre souverainiste Viktor Orban, avant le sommet européen du 16 décembre.
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