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"Les Français ont voulu renverser la table, mais le menu ne leur convient pas"
ÉDITO - À moins de huit jours du premier tour de la présidentielle, les électeurs font montre de beaucoup d'envies contradictoires.
Des bulletins de vote (image d'illustration).
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On répète inlassablement que cette élection présidentielle est incertaine, que rien n'est joué, que quatre candidats se disputent la première et la deuxième place et que c'est le grand flou à une semaine du premier tour. On répète que les électeurs sont perdus et perplexes. Que veulent les Français ? C'est le vrai sujet. On a compris qu'au moment des primaires, il y avait une volonté farouche de ne plus voir les mêmes têtes. Les Français voulaient du changement, ils voulaient du renouvellement, ils voulaient virer les anciens.
François Hollande l'a compris en décidant de ne pas se représenter. La primaire de droite a balayé Nicolas Sarkozy et Alain Juppé. La primaire de gauche a sanctionné Manuel Valls. Mais cette clarification-là n'a pas pour autant dissipée le brouillard. Les Français ont voulu renverser la table, mais le menu du jour ne leur convient pas tout à fait. Sinon il n'y aurait pas quatre candidats dans la marge d'erreur des sondages. Les Français découvrent quatre candidats. Mais quatre candidats dans lesquels ils ne se reconnaissent pas ou pas totalement.
Qu'est-ce qui est vraiment incertain ?
Si le scrutin semble incertain, c'est évidemment parce que les Français le sont. On pourrait aussi dire inversement que les Français sont incertains parce que le scrutin apparaît incertain. C'est l'histoire de la poule et de l'œuf. Qu'est-ce qui est flou ? Qu'est-ce qui est incertain ? C'est l'offre politique, ou nous les Français qui ne savons pas vraiment ce que nous voulons ? Il y a forcément des deux. En tout cas, l'un ne va pas sans l'autre. C'est ce qui rend le sentiment des Français instable, flottant.
Est-ce que les Français sont prêts à la rupture ? C'est ce que l'on entend. Mais quelle rupture ? La rupture Fillon, celle du programme ? La rupture Mélenchon, celle du changement de modèle ? La rupture Le Pen, celle de la sortie de l'euro ? Ou la rupture Macron, celle qui veut en finir avec les partis traditionnels ? Voulons-nous une rupture classique ou une rupture abrupte ? Et cette rupture, y sommes-nous prêts vraiment ?
Bon choix à tous et bon courage !
Parce que bien souvent, nous, les Français, voulons le beurre et l'argent du beurre. Nous voulons les réformes de François Fillon, mais sans perdre nos retraites. Nous voulons le ni droite-ni gauche d'Emmanuel Macron, tout en voulant qu'il tranche un peu plus. Nous voulons la franchise brutale de Marine Le Pen, mais pas la sortie de l'euro ni le repli sur soi. Nous voulons le romantisme de Jean-Luc Mélenchon, mais sans l'alliance bolivarienne.
Cette élection, c'est une espèce de psychanalyse collective qui nous oblige à choisir, à trancher. Cela fait trente ans que l'on dit que nous sommes soumis au jeu des partis traditionnels et que nous n'avons pas le choix. Là, nous avons le choix. Alors bon choix à tous et bon courage !
