Loi Travail : ce que prévoit Emmanuel Macron dans sa réforme
ÉCLAIRAGE - Dès le début de son mandat, le président Macron passe à la vitesse supérieure avec sa réforme du marché du travail.

En classant la loi Travail parmi les priorités de son début de quinquennat, Emmanuel Macron a décidé d'entrée de s'affranchir de François Hollande. L'ancien ministre de l'Économie, à qui la défense de la loi a été retirée au profit de Myriam El Khomri en 2016, a assisté aux premières loges à la séquence qui a vu s'affronter le gouvernement et la rue. Maintenant qu'il est à la manœuvre, pas question pour lui de reproduire l'erreur de son prédécesseur en mettant cette réforme à l'ordre du jour à la fin de son mandat.
Mardi 23 mai, moins de 10 jours après son intronisation, le chef de l'État a pris les devants en rencontrant les leaders des principaux syndicats du patronat et de salariés. Pierre Gattaz (Medef), Philippe Martinez (CGT), François Asselin (Confédération des petites et moyennes entreprises), Laurent Berger (CFDT), Jean-Claude Mailly (Force ouvrière) se sont ainsi succédé dans le bureau du président pour se voir annoncer la couleur.
Car Emmanuel Macron entend aller vite. Pour lui, sa victoire à la présidentielle valide la mise en application de cette réforme largement annoncée pendant la campagne. Une série d'ordonnances sur le sujet devraient être prises d'ici à la rentrée de septembre pour une entrée en vigueur à l'automne 2017. Pour justifier cette accélération de tempo, le président invoque la lenteur de la concrétisation des effets que pourrait produire une telle réforme. Qu'entend-il faire dans les faits ?
L'accord d'entreprise supérieur à l'accord de branche
François Hollande l'avait partiellement autorisé en 2016. L'inversion de la "hiérarchie des normes" toute entière, préconisée par le rapport de Jean-Denis Combrexelle, est cette fois bien au cœur de la loi Travail 2 proposée par Emmanuel Macron. Accorder de la souplesse aux entreprises faisant partie des objectifs du nouveau président.
Aujourd'hui, la Constitution et le code du travail érigent dans cet ordre-là les règles qui régissent l'organisation du travail, à savoir la durée légale du temps de travail ou encore le salaire minimal. Arrivent ensuite les accords de branche (entre un ou plusieurs groupements d'entreprises appartenant à un même secteur d'activité et une ou plusieurs organisations syndicales représentatives), qui ne peuvent entrer en vigueur seulement s'ils sont plus avantageux que le code du travail. Par exemple, ces accords permettent la prise en compte de la spécificité de certains métiers comme la pénibilité. La dernière strate est l'accord d'entreprise, qui doit, pour être ratifié, être plus attractif pour les salariés que l'accord de branche.
Dans les faits, un accord d'entreprise peut depuis 2016 être moins bénéfique qu'un accord de branche pour la question du temps de travail dans les limites du code du travail (35 heures par semaine étant la durée légale que le nouvel exécutif entend conserver). Emmanuel Macron veut étendre la négociation en entreprise à tous les domaines, comme le salaire et les conditions de travail, ajoute Le Monde.
Pour avoir une chance d'entrer en vigueur, cette inversion des normes doit convenir aux syndicats représentant plus de 50% des salariés. Avec la réforme d'Emmanuel Macron, les employeurs pourront être à l'initiative en organisant un référendum à destination des salariés directement afin de contourner les syndicats. Sans accord interne en revanche, l'accord de branche supplantera l'accord d'entreprise.
Le retour du plafonnement des indemnités prud'hommales
Il l'avait déjà défendu lorsqu'il était ministre de l'Économie. Le plafonnement des indemnités prud'hommales accordées aux salariés licenciés "sans cause réelle, ni sérieuse", qui avait été retoqué par le Conseil constitutionnel, fera l'objet d'une ordonnance. En clair, en cas de licenciement abusif, les indemnités obtenues aux prud’hommes seront limitées. Un barème, qui n'est aujourd'hui qu'indicatif, avait décidé d'une indemnité d'un montant variant entre 1 et 22,5 mois de salaires en fonction de son âge, son ancienneté et de sa difficulté à retrouver un emploi. L'objectif d'Emmanuel Macron est d'instaurer un plafond et un plancher, sauf en cas de discrimination ou de harcèlement.
La fusion des institutions représentatives du personnel
Oubliez les délégués du personnel (obligatoires à partir de 11 salariés), le comité d'entreprise (à partir de 50 salariés) et le comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail (à partir de 50 salariés). Pour plus d'"efficacité" du dialogue social, Emmanuel Macron veut regrouper toutes ces entités au sein de la Délégation unique du personnel (DUP). L'autre objectif est d'encourager les employeurs à embaucher. Ils ne seraient en effet pas contraints de créer une de ces instances s'ils venaient à franchir le seuil de 11 ou de 50 salariés.
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