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Mort de Jacques Chirac : avec Bernadette, plus d'un demi-siècle à l'épreuve du pouvoir

Jacques et Bernadette Chirac formaient le couple présidentiel le plus politique de la Ve République après "un mariage d'amour", mais aussi "un mariage d'ambition", a déclaré l'ancienne Première dame.

Le Premier ministre Jacques Chirac et son épouse Bernadette voyagent le 02 août 1976 à bord à bord du train rapide "Tokaido" entre Tokyo et Osaka à l'occasion de leur voyage officiel de trois jours au Japon.
Le Premier ministre Jacques Chirac et son épouse Bernadette voyagent le 02 août 1976 à bord à bord du train rapide "Tokaido" entre Tokyo et Osaka à l'occasion de leur voyage officiel de trois jours au Japon.
Crédit : Jean-Claude DELMAS / AFP
Jacques et Bernadette Chirac, plus d'un demi-siècle à l'épreuve du pouvoir
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Thomas Pierre & AFP

Avec son épouse Bernadette, Jacques Chiracmort ce jeudi 26 septembre à l'âge de 86 ans, formait le couple présidentiel le plus politique de la Ve République. "Ce n'était pas qu'un mariage d'amour, mais un mariage d'ambition", reconnaissait d'ailleurs en 2015 la seule Première dame à avoir exercé une véritable carrière politique, pendant plus de 40 ans.

Novembre 2014, musée du Quai Branly à Paris : c'est la dernière sortie publique d'un Jacques Chirac déjà très diminué, constamment appuyé sur l'épaule d'un garde du corps. Le président François Hollande rend hommage à son prédécesseur, qu'il a affronté à plusieurs reprises sur ses terres corréziennes. 

Bernadette, elle, omet ostensiblement de serrer la main d'Alain Juppé. Quelques semaines auparavant, elle a même osé s'en prendre au protégé de son mari, qui vient de se déclarer pour 2017 : "Qu'est-ce qu'Alain Juppé a à voir avec Nicolas Sarkozy ? Il est très, très froid et il n'attire pas les gens, les amis, les électeurs éventuels". Quasi muet depuis 2007, Jacques Chirac vole aussitôt au secours du "meilleur d'entre nous" : "J'ai toujours su qu'Alain Juppé serait au rendez-vous de son destin et de celui de la France".

Tel était le couple Chirac : plus qu'un "simple" duo présidentiel, un véritable couple politique. Ce qui a fatalement pu entraîner des désaccords. "Heureusement qu'on vous a", lançait-elle déjà à Nicolas Sarkozy en 2004, entre les deux tours d'un scrutin régional calamiteux pour la droite, alors que son président de mari n'a jamais pardonné la trahison Balladur, à celui qu'il considéra un temps comme son fils.

"Les filles, ça galopait..."

Bernadette Chirac n'a pas été une "Première dame" comme les autres. Élue dès 1971 conseillère municipale de Sarran, devenue en 1979 la première femme conseillère générale de Corrèze, elle a exercé un mandat local jusqu'en... 2015. L'épouse discrète, fille d'une famille de diplomates du XVIe arrondissement, mariée en 1956 avec ce talent prometteur rencontré à Sciences-Po, est d'abord une femme effacée.

Pour conquérir Bernadette Chodron de Courcel, Jacques "appelle chez elle chaque jour, lui glisse de petits mots tendres dans son sac d'étudiante", raconte en 2015 Candice Nédèlec, journaliste politique et auteur du livre Bernadette et Jacques (Stock). Reléguée dans l'ombre par sa fille Claude qui règne alors sans partage sur la communication de son père, l'émancipation de Bernadette Chirac n'en sera que plus spectaculaire. 

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En 2001, dans un livre d'entretiens avec Patrick de Carolis (Conversations), elle distille savamment des confidences conjugales : "Les filles, ça galopait, je les connais toutes". Une anecdote parmi d'autres est racontée par la journaliste Candice Nédèlec. Le 31 août 1997, alors que Lady Diana vient de mourir, le préfet de Paris téléphone chez les Chirac, mais Jacques est introuvable. Il se trouve en réalité avec la comédienne Claudia Cardinale. 

Quelques mois plus tard, Bernadette est en Corrèze. Sur le terrain et devant une nuée de journalistes, elle s'étonne naïvement : "je ne comprends pas toute cette presse autour de moi, je ne suis pas Claudia Cardinale"... Face à l'infidélité de son mari, Bernadette oscille entre un "fatalisme mélancolique" et la "jalousie", brandissant à plusieurs reprises la menace du divorce, raconte Candice Nédèlec. 

Un couple uni par les drames familiaux

À la suite du succès fulgurant de son "opération pièces jaunes", de ses sorties de terrain en veste treillis Dior époque Galliano : en 2002, la première dame devient un des principaux artisans du maintien de son mari à l'Élysée. On lui prête même d'avoir été la seule à l'avertir du danger Jean-Marie Le Pen, qu'il affronta au second tour.

Sous la saga politique percent cependant les drames familiaux : l'anorexie de la fille aînée, Laurence, dont le décès soudain en avril 2016, à 58 ans, a bouleversé le clan. "Le drame de ma vie", avait confié un jour le pudique Jacques Chirac... "Souffrance" d'une mère et "très grande solitude des familles" face à la maladie, avait renchéri Bernadette.

Quelques mois plus tard, en septembre 2016, Bernadette et Jacques Chirac avaient été tous deux hospitalisés à quelques jours d'intervalle à la Pitié-Salpetrière, lui pour une infection pulmonaire, elle "pour récupérer un peu". La vie politique de Jacques Chirac, diminué depuis son accident vasculaire cérébral de 2005, s'était arrêtée en 2007 avec son départ de l'Élysée. 

Avant d'exprimer son soutien public à Alain Juppé, l'ancien président n'a dérogé au silence observé sur la scène politique qu'une seule fois : en clamant, devant les caméras et sous les sourires gourmands de l'intéressé, qu'il voterait pour François Hollande en 2012. "Humour corrézien" s'était empressé de minimiser son "entourage". Bernadette, elle, avait continué son activité politique.

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