ÉDITO - Commémoration du 8 mai 1945 : "Aujourd'hui, la prédation redevient légitime", constate Étienne Gernelle

Il y a 80 ans l’Allemagne nazie capitulait, marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cet anniversaire sonne aujourd'hui comme la fin d’un monde, estime le directeur du magazine "Le Point".

Avant la cérémonie, Donald Trump a rencontré dans la basilique son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, une entrevue jugée "très productive" par les deux parties.

Crédit : Handout / UKRAINIAN PRESIDENTIAL PRESS SERVICE / AFP

COMMÉMORATION - Un 8 Mai pas comme les autres, qui ressemble un peu à un enterrement

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Aujourd’hui, il ne faudra pas confondre les bougies et les couronnes, parce que cet anniversaire est aussi, un peu, un enterrement pour l’ordre mondial né après 1945. Il faut se rendre compte du séisme que l’on vit : ces jours-ci se discute un accord de paix en Ukraine, et les États-Unis de Donald Trump envisagent sérieusement, dans ce cadre, de reconnaître la souveraineté russe sur la Crimée.

Ce serait la première fois depuis 1945 que les Etats-Unis, reconnaîtraient des modifications de frontières par la force en Europe. Cela veut dire que non seulement on entre dans une ère de prédateurs, mais que la prédation redevient légitime.

Sans compter que Donald Trump a ses propres appétits : Panama, le Groenland... Et ces prétentions sont à la fois délirantes et lourdes de conséquences. Il faut voir comment Vladimir Poutine a commenté les ambitions américaines sur le Groenland, laissant entendre que pour lui c’était parfaitement normal. Forcément, en miroir, cela conforte ses propres appétits.

Un encouragement pour les puissances "révisionnistes"

Tout cela est un encouragement pour ce que l’on appelle les puissances "révisionnistes". Révisionnistes, parce qu’elle veulent réviser des traités qu’elles contestent, des frontières, le droit international, en clair, l’ordre de 1945.

Alors il y a la Russie, bien sûr, la Chine, qui veut croquer Taïwan, la Turquie, qui occupe une zone en Syrie via ses alliés locaux, et une moitié de Chypre, ou encore l’Azerbaïdjan, qui a mangé le Haut-Karabagh, en veut encore avaler des morceaux de l’Arménie. Les nouveaux impérialistes sont désinhibés.

C’est un tableau bien sombre, mais il ne faut pas désespérer. Evidemment, l’Europe a pris un coup sur la tête quand elle a compris que son protecteur, depuis 1945, l’Amérique, était désormais défaillant. Mais elle commence à s’organiser. L’élection mardi de Friedrich Merz en Allemagne, malgré un petit coup de chaud au Bundestag, est un bon signe.

L'Europe, née pour la paix, se fait à l'idée de préparer la guerre

Et puis demain, c’est un autre anniversaire, celui de la déclaration Schuman. L’Europe, qui a été bâtie pour la paix, commence à se faire à l’idée de se préparer pour la guerre. Et demain, donc, il y aura à Nancy la signature d’un traité d’amitié entre la France et la Pologne, qui n’oublions pas, possède une puissante armée.

Le même jour, à Moscou, il y aura le grand défilé militaire, en présence de Xi Jiping, et des troupes chinoises ! Deux salles, deux ambiances. Mais comme disait Robert Dalban dan Les Tontons flingueurs :" Quand ça change, ça change, faut jamais se laisser démonter".

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