"La République a gagné", s'est félicité jeudi 9 janvier 2014 le ministre de l'Intérieur, à l'origine en début de semaine d'une circulaire préconisant l'interdiction au cas par cas du spectacle de Dieudonné pour troubles à l'ordre public.
Manuel Valls a-t-il raison de parler de victoire ? Quand un homme politique descend comme cela dans l’arène, il n'a pas le droit de perdre. La République doit donc avoir gagné, sinon c'est lui qui perd. Il ne pouvait pas laisser le tribunal administratif de Nantes le contredire en quelque sorte. C'est pour cela qu'il a remué ciel et terre, qu'il a demandé au Conseil d'État de se saisir en urgence absolue. D'ordinaire, cela prend quinze jours.
Le ministre a certes remporté une victoire. Mais il y a Tours et Orléans. La guerre continue. Manuel Valls n'a plus le choix. Il est descendu dans l'arène. Il ne peut plus jeter les armes. Tourner les talons, c'est une défaite. Il est piégé par sa propre décision. Il ne peut plus faire machine arrière. Il est obligé d'aller jusqu'au bout.
Dans cette affaire, de toute façon, le ministre était inarrêtable. Il est parti comme un boulet de canon, avec la ferme intention de "dissoudre" Dieudonné comme il aurait dissous un groupuscule skinhead. Il a embarqué avec lui tout le gouvernement et le président de la République.
Puisque l'État s'est mouillé, de Beauvau à l’Élysée, il faut que l’État l'emporte. Le statut quo serait une défaite. Le phénomène Dieudonné, Manuel Valls ne l'a pas découvert il y a trois semaines. Cela fait des mois qu'il alerte ses amis socialistes. Il en avait parlé à La Rochelle, en août. C'est monté en puissance.
A titre personnel, Manuel Valls joue (pour le moment) la marque de l'intransigeance, la détermination, la fermeté. C'est ce que Nicolas Sarkozy appelait "la valeur courage", au sens de "téméraire" : celui qui n'a pas peur. Rappelez-vous de Nicolas Sarkozy qui allait défier Tariq Ramadan sur les plateaux de télé. La petite différence, c'est que Manuel Valls n'a pas débattu avec Dieudonné.
Valls a montré qu'il était obstiné, intraitable sur les valeurs et capable de tout mettre en œuvre pour obtenir ce qu'il voulait. Le risque est double : le débordement et l'enlisement. D'abord, imaginez un spectacle annulé qui tourne à l'émeute : on dira que le ministre de l'ordre a créé le désordre. Ensuite, avec ce feuilleton judiciaire quotidien qui s'annonce, ni Valls, ni le gouvernement ne peuvent continuer à vivre au rythme des spectacles interdits ou pas de Dieudonné.
Paradoxalement, c'est Christiane Taubira qui peut sauver Manuel Valls. Les deux ministres, qui se sont souvent fait la guerre au sein du gouvernement, pourraient se donner la main dans cette affaire. En tout cas, la garde des Sceaux pourrait prendre le relais de Valls, ou jouer la deuxième lame.
Ce qui pourrait soulager Manuel Valls, c'est que la justice fasse la démonstration que Dieudonné s'est rendu insolvable, qu'il serait coupable de détournement de fonds, et que les accusations d'incitation à la haine raciale soient converties en peine de prison, puisque le polémiste refuse de payer.
En clair, la meilleure porte de sortie pour Manuel Valls, ce serait que l'on arrête de faire de la politique et que l'on applique la loi, mais rien que la loi dans toute sa rigueur.
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