Une grande enquête RTL vous propose toute cette semaine une plongée saisissante au port d'Anvers connu pour ses réseaux de narcotrafiquants. Deuxième plus grand port d'Europe, où 12 millions de containers sont déchargés chaque année, il est devenu le principal point d'entrée de la cocaïne sur le continent. L’année dernière, les douaniers ont saisi 90 tonnes de poudre blanche. Un record.
Dans un grand hangar, au bord d'une autoroute, coincé entre les fumées des usines pétrochimiques et les éoliennes du port, un camion s'avance dans un petit tunnel. Le contenu de son container est scanné : des tonnes de bananes en provenance du Brésil doivent être contrôlées par Jakob, agent des douanes…
"Une fois que c'est scanné, nous ouvrons et déchargeons la marchandise. Je procède à des vérifications visuelles. J'utilise un petit bâton pour m'assurer qu'il n'y a pas de paquets à l'intérieur des cartons et de la drogue mélangée avec les fruits", explique-t-il.
Son collègue, Yanis, inspecte chaque recoin du container à l'aide d'une lampe torche.
"C'est difficile, il faut être très concentré pour ne commettre aucune erreur. Dans les cartons ou les boîtes de conserve, les trafiquants utilisent chaque espace disponible" raconte l’agent des douanes. "La cocaïne a une odeur particulière, parfois, tu peux la sentir, mais c'est évidemment plus difficile", poursuit-il.
Les ballots de drogues sont parfois dissimulés dans la structure même du container, scellés dans des troncs d'arbre ou des cylindres métalliques. Les douanes le concèdent : elles n'ont pas les capacités de tout contrôler. Ainsi, seulement 15% de la cocaïne importée est découverte.
De plus, les trafiquants s'infiltrent jusque dans les bureaux, comme l'explique Kristian Vanderwaeren, l’administrateur général des douanes belges. L'an dernier, trois fonctionnaires ont été suspendus et certains poursuivis par la justice pour trafic de drogue.
C'est plus facile d'entrer ici que d'aller braquer une banque
Paul, un ancien trafiquant de drogue
Mais pourquoi le port d'Anvers est-il si perméable ? Il s'étend sur plus de 12.000 hectares, soit la surface de Paris, une ville à part entière, impossible à verrouiller. Pour s'en rendre compte, il suffit de longer les kilomètres de quais et d'entrepôts à bord de la BMW de Paul. Lunettes fumées, cheveux gris plaqués en arrière, ce Néerlandais de 59 ans est un ancien trafiquant international.
"Là, nous nous dirigeons vers le port où les bateaux arrivent. Dans cette zone, vous pouvez circuler librement : il n'y a pas d'entrée, personne ne vous contrôle, c'est une route ouverte", raconte Paul.
L’homme est sorti de prison en 2019, depuis, il promet d'avoir raccroché le trafic de cigarettes, de cannabis, d'héroïne et de cocaïne depuis l'Amérique du Sud. Il a importé ici pour plus de 700 millions d'euros de marchandises.
"Voici les containers, et là-bas les bateaux. Je vais tourner ici, je peux aller très près des bateaux. Normalement, quelqu'un devrait s'approcher, vous demander où vous allez avec votre voiture de luxe, mais personne ne fait ça ici. C'est plus facile d'entrer ici que d'aller braquer une banque. En plus, là-bas, il n'y a pas d'argent !", détaille-t-il.
La voiture ralentit et s'arrête à proximité des grues de déchargement. Paul baisse sa vitre et nous montre le chemin emprunté par les trafiquants.
"Tu coupes le grillage ici, tu rentres à l'intérieur, (...) il n'y a pas de caméras. Et le mec, qui est sur cette grue, il connaît tous les emplacements et les codes des containers. Tu l'as rencontré dans un café et tu lui as demandé une faveur : peux-tu déplacer le bon container contre 10.000 euros ? Et voilà, il ne te reste plus qu'à l'ouvrir. Combien de temps il te faut ? 30 minutes ? Non, 10 minutes suffisent", explique l’ancien trafiquant.
La clef du trafic, c'est la corruption des personnels qui travaillent sur les quais, les agents de sécurité et surtout les dockers, d'après Yves, chauffeur depuis plus de 35 ans. "Il peut gagner jusqu'à 75.000 euros (...) cela c'est très très dommage je veux dire", raconte le chauffeur.
Des messages de sensibilisation sont affichés sur les murs du port et une hotline anonyme a aussi été récemment mise en place par les autorités.
Alors qui sont ces groupes criminels qui profitent de la drogue à Anvers ? Selon une source judiciaire, cinq familles belgo-marocaines se disputent le marché à Anvers, ce que l’on appelle ici, la "Mocro Maffia", implantée dans plusieurs quartiers. Des procès ont lieu chaque semaine.
Dans la ville, les règlements de comptes entre groupes criminels se sont multipliés ces dernières années, accompagnés de jets de grenades et de tirs sur des maisons. Le niveau de violence augmente, les réseaux tentaculaires s'étendent sous l'influence des cartels sud-américains, ce qui inquiète Frédéric Van Leeuw, le procureur fédéral de Belgique.
"On a vu des photos de règlements de comptes, des personnes coupées en morceaux, torturées vivantes jusqu’à la mort”, relate le procureur.
D’après lui, "il y a des photos d’appartement où on rassemble tous les billets pour que des personnes viennent les chercher avec un niveau aussi de corruption et de violence insoupçonné et c’est ce que j’appelle du narco-terrorisme finalement, parce que l’idée est de décourager les gens de s’attaquer à ces problématiques sous peine de risquer sa vie".
La police judiciaire fédérale mobilise désormais 20 % de ses effectifs sur ces affaires de drogue, notamment au port d'Anvers. Et selon nos informations, plusieurs magistrats du parquet fédéral, menacés par les cartels, sont désormais sous protection.
Bienvenue sur RTL
Ne manquez rien de l'actualité en activant les notifications sur votre navigateur
Cliquez sur “Autoriser” pour poursuivre votre navigation en recevant des notifications. Vous recevrez ponctuellement sous forme de notifciation des actualités RTL. Pour vous désabonner, modifier vos préférences, rendez-vous à tout moment dans le centre de notification de votre équipement.
Bienvenue sur RTL
Rejoignez la communauté RTL, RTL2 et Fun Radio pour profiter du meilleur de la radio
Je crée mon compte