La "mort parfaite" : au procès de militants du suicide assisté, elle témoigne de la fin de vie de sa cousine

Se tuer en douceur plutôt que succomber en souffrant : au deuxième jour du procès de militants du suicide assisté , ce mardi 16 septembre, des témoins ont plongé le tribunal de Paris dans le huis clos poignant des derniers jours de leurs proches malades, qui ont choisi leur fin en ingérant un barbiturique. 

Âgés de 74 à 89 ans, douze adhérents de l'association pro-euthanasie Ultime Liberté sont jugés pour avoir, entre août 2018 et novembre 2020, aidé des dizaines de personnes à acheter sur internet du pentobarbital, un barbiturique entraînant une mort rapide et sans douleur. Ces retraités ne sont poursuivis que pour des délits liés au trafic de substances illicites, non pour incitation au suicide.

Les bras le long du corps, le maintien droit, la témoin Andrée Le Bras, 78 ans, dégage encore à la barre cette autorité de la professeure d'espagnol qu'elle était jusqu'à sa retraite. Émue, elle se tourne d'abord vers les prévenus aux cheveux blancs, assis aux premiers rangs, pour les remercier d'avoir permis en 2017 la "mort parfaite" de sa cousine.

"Sept ans après, tant ses fils que moi, sommes encore sous l'effet bienfaisant de la sérénité, de la paix que nous avons ressenties. Nous sommes encore imprégnés de cette sérénité absolue", confie au tribunal cette petite femme grisonnante, petites lunettes rondes, gilet noir à liseré beige.

Sa cousine atteinte d'un cancer du pancréas

Cette partisane de l'aide à mourir a accompagné le crépuscule de sa cousine de 82 ans, atteinte d'un cancer du pancréas. Alors membre de l'antenne nantaise, Andrée Le Bras lui a procuré une dose de pentobarbital en poudre que détenait une veuve, dont le couple avait fait l'acquisition préventive de deux doses mais que le mari, décédé de façon naturelle, n'avait jamais utilisé. 

Ayant vu deux ans auparavant son époux succomber à un cancer du foie dans d'atroces souffrances, sa cousine était décidée à "mourir dans de bonnes conditions". Elle avait prévenu de son geste ses fils, qui lui avaient donné leur accord, et rédigé une lettre pour en revendiquer l'entière responsabilité.

Je lui ai apporté le verre d'eau avec le sirop. Elle a versé la poudre dans le verre et elle l'a bu. Comme elle était petite, menue, elle s'est endormie en moins de cinq minutes.

Andrée Le Bras, témoin au procès

La semaine précédente, Andrée Le Bras s'est installée chez sa parente "pour que les derniers jours soient le plus agréables et joyeux possible". Puis est arrivée la date fatidique. "La soirée s'est passée exactement comme un jour ordinaire. Comme elle n'avait pas pris sa dose de morphine, elle a décidé vers 23h d'aller se coucher. Elle nous a dit 'je vais me coucher'. Elle était extrêmement méticuleuse. Elle a posé ses lunettes, son peignoir. Je lui ai apporté le verre d'eau avec le sirop. Elle a versé la poudre dans le verre et elle l'a bu. Comme elle était petite, menue, elle s'est endormie en moins de cinq minutes. Elle n'a plus bougé. Je pense que son décès est arrivé au bout de sept, huit minutes."

Très clivant, le combat d'Ultime Liberté va au-delà de la revendication des associations pro-euthanasie traditionnelles d'un "droit à l'aide à mourir" pour les patients en fin de vie et en grande souffrance. L'organisation revendique le droit à un suicide "serein" pour toute personne en pleine possession de ses moyens, malade ou non.

Des militants de l'aide à mourir sont-ils allés trop loin ? C'est le thème du premier épisode du Choix info RTL, votre nouveau podcast quotidien. Chaque soir à 18h, Sébastien Rouxel choisit un titre qu’il raconte à l’aide des reportages de nos journalistes, des témoignages inédits & des invités de RTL. Un récit sonore pour tout comprendre d’un événement dans l’actualité.

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