Jean-Claude Romand : pourquoi sa libération conditionnelle ne passe toujours pas ?

C'est un mystère criminel rapidement résolu, mais dont l'auteur a verrouillé tous les mécanismes. Le 11 janvier 1993 sont retrouvés dans une maison en proie aux flammes, les corps mutilés de la famille Romand, Florence Romand et ses enfants, Antoine 5 ans et Caroline 7 ans. Seul le docteur Jean-Claude Romand a survécu au massacre. Quelques heures plus tard, les parents du rescapé sont découverts assassinés, à leur domicile dans le Jura. 

Personne n'a jamais su ce qui s'est vraiment passé dans la tête de Jean-Claude Romand pour qu'il tue son épouse, leurs deux enfants et ses parents. Cet homme estimé, bon père de famille et médecin sérieux, apparaît alors comme un meurtrier glacial et un mythomane. Ce dernier menait une existence parallèle qu'il s'était fabriquée, une brillante carrière de médecin à l'Organisation Mondiale de la Santé, à Genève et profiteur de l'argent que lui confiaient ses proches. Un mensonge qui l'a rattrapé, l'a consumé, par peur que tout son entourage ne découvre son vrai visage, celui d'un menteur qui avait tout raté. 

"On n'a rien vu venir", se rappelle Emmanuel Crolet, le frère de Florence Romand, dans L'Heure du crime. "Le scénario et le rôle de Romand était tellement bien ficelé. Il a berné beaucoup de monde. Il était très fort. De toute façon, c'était son job numéro 1 de mentir et il le peaufinait à merveille. On ne pouvait rien voir ". Interrogé, le faux médecin de l'OMS a reconnu les assassinats. Il est mis en examen, écroué, l'enquête est cependant loin d'être bouclée. Si l'assassin menteur est arrêté, la raison du massacre est restée sous silence. Pas moins de trois collègues d'experts, psychiatres et psychologues, ont été mandatés par la justice pour tenter de percer le mystère Romand. 

Sa personnalité n'a pas évoluée en détention

Laure Moureu, avocate des frères et de la mère de Florence.

"Il est indiscernable", explique Jean-Olivier Viout, procureur général honoraire et l'avocat général au procès de Jean-Claude Romand. "On a vraiment du mal à pouvoir percer la cuirasse de cet homme tout en rondeur, qui se terre dans le box des accusés, et on se dit : va-t-on parvenir, à l'issue de ce procès, à pouvoir gratter la carapace et aller véritablement à l'intérieur du personnage. On n'y est pas parvenu". Condamné en 1996, le faux médecin et assassin passe de longues années de prison. Après 26 ans, il obtient sa libération conditionnelle. 

Une décision contestée par la famille Crolet. "Nous avons été rendus destinataires en qualité de partie civile des éléments concernant la détention, de l'évolution psychologique et de la personnalité de monsieur Romand. Un certain nombre d'intervenants estiment que la personnalité de Monsieur Romand n'a pas évoluée lors de sa détention", détaille Laure Moureu, avocate des frères et de la mère de Florence. 

Elle poursuit : "Ils ne disent pas pour autant qu'il représente un danger et qu'il est dangereux au sens criminologique du terme, mais que sa personnalité n'a pas évolué. C'est étonnant au terme d'une si longue détention que de faire ce constat-là. Quand on sait que cette personne a mené aux faits que nous connaissons, naturellement cela ne peut qu'inquiéter les parties civiles que nous sommes". 

Les invités de "L'Heure du crime"

- Jean-Olivier Viout, procureur général honoraire. Il a été l’avocat général au procès de Jean-Claude Romand. Auteur du livre A la barre des cours d'assises savoyardes, aux éditions La fontaine de Siloé (sortie en 2020)
- Emmanuel Crolet, frère de Florence Romand
- Me Laure Moureu, avocate des frères et de la mère de Florence